«Akousma  est le seul festival en Amérique du Nord où l'on peut vraiment profiter d'un "orchestre" de 56 haut-parleurs plusieurs soirs d'affilée, et ainsi absorber toute la sensualité du son. L'information sonore passe d'abord par les sens et la musique électroacoustique nous permet de vivre cette immersion dans un tel contexte. On peut venir à ressentir la texture du son, ses mouvements, sa lumière ou sa chaleur. Somme toute une expérience sensorielle et aussi très sensuelle», dixit le compositeur Louis Dufort, directeur artistique du festival Akousma, qui démarre aujourd'hui. Voici notre parcours suggéré.

Quintette d'éponges

Eastern Block, vendredi 20 octobre, 20 h

«L'éponge est un instrument de musique numérique qui a un peu l'allure d'un coussin. Dans un rectangle de mousse se trouvent des capteurs, des boutons et un émetteur radio qui permettent de détecter et d'envoyer vers un ordinateur des données sur les déformations et l'orientation de l'instrument. La synthèse sonore et le mappage sont pris en charge par l'ordinateur», explique-t-on sur le site d'Akousma. Voilà le concept imaginé par un étudiant au doctorat en composition à la Faculté de musique de l'Université de Montréal. L'éponge de Martin Marier a fait du chemin depuis sa conception, car on en est rendu à imaginer une interaction en temps réel avec cinq interprètes et improvisateurs: Martin Marier, Preston Beebe, Ana Dall'Ara Majek, Francis Lecavalier et Émilie Payeur.

Blinded by the Dust

Conservatoire de musique, lundi 23 octobre, 20 h

Dans le cadre du 75e anniversaire du Conservatoire de musique de Montréal, Akousma met en valeur les ondes Martenot, ancêtre des claviers électroniques né en 1928; le Conservatoire est l'une des rares institutions à l'enseigner. L'ondiste Estelle Lemire y est professeure et y présentera des musiques avec des compositeurs d'ici, dont Gilles Gobeil. Pour cette soirée, on mettra également l'accent sur le duo français Blinded by the Dust, constitué de l'ondiste virtuose Nadia Ratsimandresy et de l'électroacousticien bruitiste Nicolas Thirion. Dans ce tandem, ce que produisent les ondes Martenot est modifié par l'interaction en temps réel. Tout ça n'a rien de clinique, soyez-en assuré!

Fousek/Hansen/Tellier-Craig

Le Vivier (Gesù), mardi 24 octobre, 20 h

Les Montréalais Karl Fousek, Devon Hansen et Roger Tellier-Craig ont constitué ce trio d'improvisation. L'instrumentation consiste en une panoplie de synthétiseurs modulaires analogiques et d'outils numériques. La combinaison de ces deux modes électroniques se veut au service de cette rencontre entre trois personnalités connues des scènes expérimentales, au-delà de l'électroacoustique. Tellier-Craig fut jadis membre de Godspeed You! Black Emperor et Fly Pan AM, et il s'exécute encore dans le récent duo A/V Le Révélateur. Karl Fousek, pour sa part, explore les sonorités des synthétiseurs modulaires et différents logiciels de traitement audio dans une diversité de contextes: generative music, drone, minimalisme ou improvisation. Californien transplanté à Montréal, Devon Hansen se produit sous divers pseudos, dont Stefan Jós et Lotide. Ce concert en trio s'inscrit dans un programme différent des autres présentés par Akousma 14, cette fois au Gesù. Y participeront les musiciennes et conceptrices Émilie Mouchous et YlangYlang, sans compter Ida Toninato et Ana Dall'Ara Majek, du tandem Jane/Kin.

Natasha Barrett

Usine C, mercredi 25 octobre, 20 h

La Britannique Natasha Barrett ratisse méticuleusement le territoire acousmatique (diffusion exclusivement sonore), fait preuve d'un grand raffinement, d'une utilisation optimale de l'espace en exploitant le plein potentiel d'un orchestre de haut-parleurs. Plus précisément, son travail touche le design sonore, le concert acousmatique «multi-canaux», l'improvisation devant public ou encore les installations sonores impliquant l'architecture et la science. On affirme même qu'elle exploite des techniques permettant «de dévoiler des détails que l'oreille normale raterait».

Photo fournie par Akousma

Les Montréalais Karl Fousek, Devon Hansen et Roger Tellier-Craig ont constitué un trio d'improvisation. L'instrumentation consiste en une panoplie de synthétiseurs modulaires analogiques et d'outils numériques.

Oren Ambarchi

Usine C, jeudi 26 octobre, 20 h

Multi-instrumentiste mais surtout guitariste et percussionniste, l'Australien Oren Ambarchi présente à Akousma 14 une oeuvre pour guitare préparée avec traitement en temps réel - pédales, effets larsen, objets concomitants, etc. Ce musicien est internationalement reconnu, il figure parmi les plus éminents praticiens des techniques étendues à la guitare, ses travaux gravent plusieurs sillons: free jazz, bruitisme, minimalisme, avant-rock, drone, électroacoustique. On l'a entendu devant public, notamment au Festival international de musique actuelle de Victoriaville. Il a travaillé auprès de pointures comme John Zorn, Otomo Yoshihide, Keiji Haino, Richard Pinhas, Merzbow, etc.

Rashad Becker

Usine C, vendredi 27 octobre, 20 h

Renommé pour ses qualités d'ingénieur du son, spécialiste du mixage et du matriçage, le Berlinois Rashad Becker est un compositeur dont la carrière est encore jeune, mais à qui on promet le plus brillant avenir. Entre autres productions, on lui doit les deux excellents albums d'une série intitulée Traditional Music of Notional Species, sous étiquette Pan. Brillamment, Rashad Becker cultive le paradoxe de la dissonance et de la fluidité simultanées. Il propose des structures à la fois étranges, subtiles et très séduisantes. Ce n'est pas n'importe quoi! Également au programme du 27 octobre, il ne faut pas rater la très douée compositrice américaine Elizabeth Anderson (installée en Belgique), le trio québécois d'art numérique Falaises, ou l'Argentin (transplanté en France) Horacio Vaggione, soit le compositeur et théoricien «chouchou» et «hyper organique» de Louis Dufort.

Byron Westbrook

Usine C, 20 h, samedi 28 octobre

Le Brooklynois Byron Westbrook vient de lancer un album excellent, au croisement de multiples courants électros - vaporwave, post-minimalisme, generative music, techno, etc. Le compositeur a mis au point des musiques très chargées rythmiquement, auxquelles il greffe des filons à la fois texturés et minimalistes harmoniquement ou mélodiquement. Lancé il y a quelques jours à peine, l'album Body Consonance (étiquette Hands in the Dark Records) illustre l'envergure de cet artiste visionnaire, très inspiré, assurément l'une des meilleures prises d'Akousma 14.

Photo fournie par Akousma

L'ondiste Estelle Lemire présentera des musiques avec des compositeurs d'ici, dont Gilles Gobeil.