Avis aux femmes guitaristes en quête de modèles sur la planète rock, en voici un de taille: Marnie Stern, 34 ans, s'amène à Pop Montréal.

Des femmes guitaristes y seront-elles tout ouïe? Et que dire des femmes amatrices de rock? Pas évident. C'est connu, le sexe féminin n'est pas friand des formes avancées de rock. Les guitarheroïnes n'y brillent pas, les Steve Vai et Joe Satriani  de ce monde attirent une majorité écrasante de fans mâles.

Marnie Stern, avez-vous une explication?

«Franchement, je n'en ai pas. Le côté abrasif de ce jeu et son côté spectaculaire ont peut-être une connotation machiste. Pour les femmes, cela peut sembler inutile, un peu stupide à la limite»

Les femmes virtuoses brillent de plus en plus dans les sphères de la musique classique et du jazz. Dans le rock? Hmmm... Les femmes capables de jouer au niveau des meilleurs hommes sont encore rarissimes.

«C'est vrai, corrobore Marnie Stern, lorsqu'il s'agit de musique classique, les femmes s'intéressent davantage à la virtuosité. Dans le rock, c'est encore mal perçu. Plusieurs femmes, remarquez, jouent la basse et les claviers au sein des groupes. Et je vois de plus en plus de très bonnes guitaristes. Mon style est un peu plus criard, c'est pourquoi il attire un peu plus l'attention je suppose..»

Criard? À tout le moins spectaculaire! Des guitaristes rock du niveau de Marnie Stern, on les trouve au compte-gouttes. Technique de tapping, rapidité d'exécution, précision exemplaire sont au service de son art, c'est-à-dire un rock pour power trio ou quartette d'élite dans lequel elle chante en plus de jouer.

«J'ai mis beaucoup de temps à mettre ce style au point, à trouver mon propre son. Lorsque j'ai commencé, je jouais comme n'importe qui... Et lorsque je l'ai trouvé, j'ai essayé de le conserver tout en cherchant à évoluer, c'est-à-dire en y ajoutant de nouveaux éléments formels. Pour certains, je peux comprendre que cela peut devenir ennuyeux.»

À 34 ans, Marnie Stern a parfait son style en découvrant  plusieurs groupes des années 90 mais aussi des artistes plus anciens qui s'intéressaient au bruitisme et autres formes d'expérimentation sonore. Au bout du fil, elle cite Hella, Deerhoof, Lightning Bolt, Erase Errata, The Boredoms, Ruins,  Royal Trux, The Shaggs, Frank Zappa, «et tous ces guitaristes qui jouent des choses étranges. Ma musique réfère à ce qui m'a marquée.»

«J'aime aussi le rock classique, j'aime des guitaristes comme Mark Kkopfler, les Allman Brothers ou Richard Lloyd de Television, ce qui est différent de plusieurs musiciens rock d'aujourd'hui. Vous savez, ce que j'ai fait sur mon nouvel album ne me semble pas du tout  expérimental mais peut être perçu comme tel par quiconque n'a pas été exposé aux références qui m'ont marquée. Tout est référentiel, en fait.»

Sur scène, Marnie Stern se produira en quartette alors que son album à paraître le 5 octobre (étiquette Kill Rock Star) a été enregistré en trio. «Sur scène, en tout cas, je ne veux pas que ce soit trop expansif, trop big rock», prévient-elle.

Si Marnie Stern veut rester modeste, elle fait d'ores et déjà figure de modèle de guitare héroïne, qu'elle le veuille ou non.

«Si ce que vous dites est vrai, c'est ahurissant! Encore aujourd'hui, on s'intéresse davantage  à l'image des femmes dans le rock qu'à  la nature de leur musique. Et lorsqu'on se penche sur le travail des musiciennes, on a tôt fait de sortir les clichés. Eh bien non, je ne suis pas une femme dure, énigmatique ou chienne (rires). Je suis une femme normale. Mes modèles féminins se trouvent plutôt du côté de Patti Smith, ces artistes vraies qui tiennent à rester elles-mêmes.»

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Marnie Stern se produit ce samedi, 22 h 30, au Cabaret Juste Pour Rire.