Le Salon du livre de Montréal, c'est un peu l'équivalent des séries éliminatoires de hockey pour le monde de l'édition. La plupart des maisons ont programmé leurs publications pour ces six jours consacrés à l'industrie du livre, et nous présentent leurs meilleurs joueurs depuis la fin du mois d'août. Tous les jours, nous recevons des propositions d'entrevues avec cet argument massue: «Oui, mais notre auteur sera au Salon du livre!»

«Oui, mais ils y seront tous!» qu'on n'a pas le choix de répondre.

Et c'est vrai. Des centaines d'auteurs se plieront au supplice ou aux délices des dédicaces, tandis que la Place Bonaventure se transformera en vaste librairie prise d'assaut par des milliers de visiteurs. Au terme d'un marathon de prix littéraires ici et à l'étranger, c'est comme s'apprêter à redescendre l'Everest après avoir atteint un sommet, c'est le Festival de Cannes des lettres au Québec. Vétérans et starlettes se bousculent sur le tapis rouge de la Place Bonaventure, on chasse les signatures, on fait des emplettes, tout le monde semble vibrer sur la Planète Livre. Pour votre information, La Presse fera la couverture quotidienne de cette fête dès mercredi.

 

Qu'on aime ou pas l'événement, il suffit d'y passer quelques heures pour retrouver sa foi de lecteur. Sur place, on dirait vraiment que les gens sont fous des livres et que tout va bien dans ce domaine. D'ailleurs, les nouvelles sont bonnes: pendant que l'industrie du disque en arrache, les ventes de livres neufs ont connu une hausse de 9% en 2007, un marché de 835 millions de dollars (selon les données de l'Observatoire de la culture et des communications du Québec).

Mais quand on regarde de plus près les données, on constate que le parent pauvre de l'industrie, c'est la fiction, la poésie. La littérature, en fait. On publie et on vend de plus en plus de livres au Québec, mais que lit-on au juste? C'est cela qui inquiète Foglia quand il nous parle de culture... L'écrivain et chroniqueur Nicolas Dickner racontait dernièrement que les bibliothèques sont redevenues des objets de luxe chez les riches américains, un élément de décor extrêmement chic et à la mode, comme les «coffee table books», j'ai même appris qu'il existe des services pour remplir votre bibliothèque de beaux livres à votre goût sans vous déplacer à la librairie. Et Dickner de conclure: «La lecture est dépassée, le livre revient en force.»

Bref, si le livre est «in» et tendance, qu'il s'agence bien avec le mobilier du salon ou la couleur des murs, on ne va pas s'en plaindre, mais seulement espérer que la lecture l'est aussi. Le temps qu'il faut pour lire est quelque chose qui ne s'achète pas.

La lecture en cadeau

J'y reviens chaque année et j'insiste, parce que j'estime que c'est l'une des plus belles initiatives au Salon du livre. La lecture en cadeau de la Fondation pour l'alphabétisation fête ses 10 ans. Le projet consiste à offrir des livres neufs aux enfants pauvres, ce que vous pouvez faire sur place, en achetant un livre et en le déposant aux endroits prévus à cet effet au salon. Il est très important que le livre soit neuf, car enfin, si le livre est «in», ces enfants ont le droit eux aussi de profiter de la beauté de l'objet avant d'en découvrir sa véritable utilité (et sa vraie beauté). Jusqu'à maintenant, La lecture en cadeau a permis de distribuer 165 000 livres dans les foyers dépourvus de bibliothèques. Pour plus d'informations: www.fondationalphabetisation.org ou 1 800 361-9142.

Blogue

On n'arrête pas le progrès. J'anime depuis quelques jours un blogue littéraire sur Cyberpresse, où vous êtes tous invités à commenter et partager vos plaisirs (ou déplaisirs) de lecture. C'est un rendez-vous à cette adresse: www.cyberpresse.ca/guy.