Projet conjoint d'Arsenal Art contemporain, du Musée d'art contemporain de Montréal (MACM) et du groupe Banque TD, les Ateliers TD permettent à six artistes visuels de la relève québécoise de créer des oeuvres durant sept semaines sous la supervision de sept mentors et le jugement de trois experts. Leur expérience fera l'objet d'une série diffusée sur ARTV à l'automne. La Presse les a rencontrés, hier.

L'expérience aurait pu ressembler à la série de téléréalité américaine d'art contemporain Work of Art mais le but des Ateliers TD n'était pas de mettre des artistes en compétition à huis-clos. «On se demandait juste ce qu'on pourrait faire pour mieux outiller des artistes de la relève en vue de leur carrière internationale», expliquait, hier, Jean-François Bélisle, directeur général de l'Arsenal, lors d'une visite de presse.

À la suite d'un concours auquel 600 personnes avaient répondu, six artistes visuels de 20 à 29 ans ont été sélectionnés: Frances Adair-McKenzie, Guillaume Boudrias-Plouffe, Charles Lavoie, Manuel Mathieu, Caroline Monnet et Karine Payette. Tous ont débuté l'expérience il y a deux semaines. Chaque jour, ils se rendent, entre 8h et 22h, à l'Arsenal, au 2020, rue William, dans le quartier Griffintown, pour travailler dans un espace qui a été défini pour chacun d'entre eux. Durant sept semaines, ils doivent créer sept oeuvres inspirées par le thème défini par un artiste de renom.

«Voir autrement»

La première semaine, la photographe Isabelle Hayeur leur avait soumis de «voir autrement» en utilisant des photos personnelles pour créer leur oeuvre. Chaque vendredi, le jury formé de Mark Lanctôt, conservateur au MACM, Jo-Ann Kane, conservatrice de la collection de la Banque nationale, et du critique d'art Nicolas Mavrikakis, pose un regard sur le travail des artistes, soulignant points forts et points faibles. Puis un autre mentor vient les rencontrer et propose un autre thème d'inspiration pour la semaine suivante.

Quand La Presse est passée à l'Arsenal, hier, le sculpteur David Altmejd (qui vient de vernir une nouvelle exposition à la galerie Andrea Rosen de New York) était sur place pour discuter avec les artistes. «Ils ont tous une pratique sérieuse, a dit David Altmejd. Je voulais qu'ils pensent à construire un objet qui va potentiellement exister intensément dans le monde. Pour qu'ils poussent leur vision le plus possible.»

Les autres mentors qui encadreront les artistes sont le sculpteur Jean-Pierre Gauthier, la peintre Cynthia Girard, l'artiste et professeur François Morelli, le peintre Marc Séguin et l'artiste Bettina Hoffman. Régulièrement, quelque 35 artistes, commissaires d'expositions, conservateurs, critiques et galeristes visiteront les six jeunes artistes pour voir leurs oeuvres. Avant-hier, c'était le cas du collectionneur Stephen Bronfman.

Même s'il ne s'agit pas d'une compétition, un total de 10 000 $ sera remis à un ou plusieurs gagnants après délibération du jury. Les oeuvres créées sont visibles sur place mais le MACM et l'Arsenal en exposeront une sélection à l'issue du projet.

Pendant les sept semaines, une équipe d'ARTV dirigée par Bernar Hébert est sur les lieux pour filmer le processus de création et d'apprentissage. Il en résultera une série documentaire en sept épisodes d'une heure, Artistes à l'oeuvre, qui sera diffusée l'automne prochain. «ARTV va aller toucher un public qui ne va pas nécessairement dans les galeries et les salles d'exposition», dit Jean-François Bélisle.

Les six artistes

Frances Adair-McKenzie

Artiste multimédia de Colombie-Britannique qui travaille depuis sept ans à Montréal. Hier, inspirée par David Altmejd, elle montait une vidéo de 30 sec après avoir filmé six personnes jouant une muse avec des masques de théâtre.

Sa démarche part de l'esthétique baroque. La semaine dernière, elle avait créé Les Soeurs, une sculpture en papier mâché et mousse synthétique inspirée de deux portraits photographiques et d'une photo de cactus.

Guillaume Boudrias-Plouffe

Longueuillois passionné par les liens entre générations et la culture folklorique, sa première oeuvre créée dans le cadre des Ateliers, Long de même, a été démantelée.

Elle comprenait des photos de famille placées sur des plaques de bois, des bottes de pluie et du bois de chauffage.

Hier, il fabriquait des blocs de bois pour une performance pendant laquelle «quelque chose pourrait tomber tout le temps». L'idée de préciosité du bois l'intéresse tout comme le travail sur la mémoire.

Photo: Hugo-Sébastien Aubert, La Presse

Guillaume Boudrias-Plouffe

Charles Lavoie

Sculpteur de 20 ans ayant étudié en cinéma d'animation, il est originaire d'Alma.

Avec le thème d'Isabelle Hayeur, il a associé des photos personnelles sous la forme de deux verres de lunettes.

Hier, sur le thème «le plus intense possible», il créait un double objet en forme de poumons et faisant penser à une fourmilière, en utilisant de l'herbe artificielle, des billes de plastique et du fil de cuivre qu'il tortillait pour le faire ressembler à des bronchioles.

Photo: Hugo-Sébastien Aubert, La Presse

Charles Lavoie

Manuel Mathieu

Artiste d'origine haïtienne qui a entamé l'automne dernier des études à la Goldsmith University de Londres.

Une de ses oeuvres, Spooky, est actuellement exposée au Musée de la civilisation, à Québec.

Après avoir réalisé un triptyque photographique (I had a dream, Dimanche après-midi et Strange fruit) avec des photos personnelles, il s'est mis cette semaine à créer un immense tableau dont la structure est inspirée de la peinture Woman in Bathtub d'Alexander Colville.

Photo: Hugo-Sébastien Aubert, La Presse

Manuel Mathieu

Caroline Monnet

Autodidacte multidisciplinaire d'origine algonquine, elle a étudié en sociologie et communication avant d'embrasser les arts visuels.

Cette semaine, elle crée une installation avec un vieux bureau qu'elle va détruire à coups de flèches avec un arc, une performance qu'elle filmera.

La semaine dernière, elle avait assemblé six photos sur un plexiglas pour créer une photo longue exposition qu'elle avait éclairée, filmant en même temps son intervention.

Photo: Hugo-Sébastien Aubert, La Presse

Caroline Monnet

Karine Payette

Artiste montréalaise utilisant l'installation, la photo et la vidéo, elle sculptait hier «un bloc de neige sur lequel quelqu'un aurait fait pipi» avec du polystyrène, de la neige artificielle et de la résine.

Sur le thème «voir autrement», elle avait réalisé la semaine précédente une installation au moyen de volumes et d'une marmotte en peluche qui représentaient les éléments d'une chambre d'enfant.

Photo: Hugo-Sébastien Aubert, La Presse

Karine Payette