La technologie, le multimédia, le numérique habitent l'oeuvre de Robert Lepage depuis 25 ans. Son travail dépasse d'ailleurs le plus souvent le contexte théâtral. Le créateur est donc ravi de voir qu'Elektra et son directeur artistique, Alain Thibault, organisent une première Biennale d'art numérique à Montréal (BIAN), à laquelle il participe avec Fragmentation.

«Je travaille beaucoup à l'étranger, notamment à New York, et je trouve vraiment étonnant qu'il n'y ait pas un tel événement ailleurs, dit-il. En Europe, oui, mais en Amérique du Nord, seul Montréal en a un. Et il était temps! Moi, je viens plus du théâtre, mais c'est dans des événements comme ça, en Europe, que je fais la rencontre d'artistes qui changent ma façon de raconter des histoires et attirent mon attention sur de nouveaux vocabulaires et de nouveaux outils pour parler, raconter et exprimer.»

Robert Lepage apprécie la grande variété artistique qui prévaut dans ce carrefour consacré à l'art numérique. La BIAN présente 30 projets dans 26 lieux artistiques.

«On y rencontre des artistes accomplis, d'autres moins, précise-t-il. Il y a une grande liberté dans ce genre d'événement. Et beaucoup de possibilités. À Montréal, il y a la convergence des ressources et de l'intérêt pour ce genre de choses.»

Un autre regard sur son oeuvre

À propos de l'installation Fragmentation, Robert Lepage dit apprécier ce contact entre l'art de la scène, l'art visuel et la technologie.

«Dans le monde du théâtre et des arts de la scène, nous faisons un petit peu bande à part, explique-t-il. Nous avons un rapport éphémère avec le public. Ici, avec Fragmentation, c'est un rapport différent, déstabilisant, qui nous fait regarder notre oeuvre de façon différente. Si on veut garder les arts de la scène vivants, il faut se renouveler et se colleter avec des gens qui travaillent d'une autre façon.»

Le dramaturge veut poursuivre sa quête d'idées avec la même ouverture à toutes les expressions artistiques. «Je présente souvent mon travail dans des contextes qui s'ouvrent au-delà des arts de la scène. Ça ramène un peu à la belle époque qui m'a beaucoup inspiré, dans les années 80, quand les gens faisaient de la performance. Depuis, les gens des arts de la scène se sont beaucoup assagis. À cette époque, il y avait une grande liberté. C'est l'effet que me fait cette biennale.»

Pour Robert Lepage, ReACTOR permet de prolonger l'existence de sa pièce Lipsynch dans un autre univers, comme pour sa pièce Le dragon bleu, qui était devenue une bande dessinée.

«C'est un grand privilège de pouvoir visiter une oeuvre et pas seulement la regarder, dit-il. Mais on va attendre de voir comment les gens réagissent, pour savoir ce que ça apporte.»