Le British Museum de Londres présente, depuis mardi, une nouvelle exposition d'objets afghans anciens faits d'or, de verre, de pierre et d'ivoire que les archéologues croyaient perdus à jamais. L'Afghanistan s'est révélé être, au fil des ans, un véritable carrefour de cultures, de commerçants, d'artisans et d'armées.

Le fait que ces objets aient survécu à des milliers d'années d'histoire est remarquable. Qu'ils aient survécu à l'invasion soviétique, à la guerre civile, au vandalisme des talibans et au conflit actuel pourrait être qualifié de miraculeux.

Les artéfacts afghans ont amorcé mardi une tournée d'exposition lancée par le président afghan Hamid Karzaï.

Les objets étaient considérés comme perdus par les spécialistes, qui pensaient qu'ils avaient été éliminés lors de la destruction du Musée national de l'Afghanistan, dans les années 1990. Ils avaient plutôt été cachés par le personnel du musée, juste avant le retrait des soviétiques en 1989. Les employés du musée avaient gardé le secret, en dépit des risques qu'ils encouraient sous le régime des talibans.

Abdul Wasey Feroozi, de l'Institut afghan d'archéologie, a raconté que les forces talibanes se rendaient fréquemment au musée pour demander où avaient été placés les objets anciens. M. Feroozi a rappelé que les employés du musée feignaient, à chaque visite, de l'ignorer.

Soixante-dix pour cent des artefacts ont été pillés ou endommagés pendant les années qui ont suivi le passage des troupes soviétiques. D'autres ont été détruits par les talibans, qui ont démoli la plupart des objets de l'art pré-islamique du pays sous prétexte qu'ils étaient «idolâtrés».

Deux ans après le renversement du régime des talibans, en 2001, le président Karzaï avait annoncé la découverte de six coffres-forts remplis d'objets anciens dans les sous-sols du palais présidentiel. Quand les archéologues les ont ouverts, ils ont découvert rien de moins qu'un véritable trésor: quelque 22 000 objets en or provenant du cimetière d'une tribu nomade vieux de 2000 ans.

Un archéologue de la société National Geographic, Fredrik Hiebert, a qualifié cette découverte de moment unique, la comparant à «se retrouver dans la tombe de Toutankhamon», l'un des plus célèbres pharaons égyptiens.

Les employés du musée afghan, qui n'avaient pas revu les objets depuis plusieurs années et qui ne savaient pas ce qui leur était arrivé, ont explosé de joie en apprenant qu'ils avaient été retrouvés.

L'exposition à Londres met de l'avant ces artefacts issus de quatre sociétés anciennes, tous retrouvés sur le territoire actuel de l'Afghanistan. Les objets proviennent d'une civilisation agricole de l'Âge du bronze, d'une citée grecque classique, d'un palais de la Route de la soie et d'un cimetière nomade.

Une couronne en or datant du 1er siècle.

Parmi les autres objets présentés figurent également des trésors de la Chine, de l'Inde et de l'Empire romain ayant été cachés il y a 2000 ans à Bagram, au nord de Kaboul. Les archéologues ne s'entendent toujours pas quant à savoir si le site était un entrepôt utilisé par les marchands de la Route de la soie ou si les objets sont les trésors d'un palais ayant été cachés en cas d'invasion.

Le premier objet présenté dans le British Museum est une petite statue de pierre datant de la période grecque qui représente un petit garçon nu. La statue, déjà endommagée lors de sa découverte en 1971, avait ensuite été décapitée par les talibans. La statue a été restaurée, mais n'a pas retrouvé sa tête.

L'exposition de Londres ne manque pas de rappeler la véracité du slogan du Musée national de l'Afghanistan, soit «Une nation qui est vivante est celle qui garde en vie sa culture».

Un verre égyptien datant du 1er siècle découvert à Bagram.