Artiste vivant le plus cher du monde, le peintre britannique Lucian Freud, petit-fils du fondateur de la psychanalyse Sigmund Freud, a rendez-vous à partir de mercredi avec la France où le Centre Pompidou présente une cinquantaine de ses toiles, principalement des nus et des autoportraits. Saisissant.

Ces toiles rares, essentiellement de grand format, proviennent en partie de collections privées. Les visiteurs vont pouvoir découvrir le fameux Benefits Supervisor Sleeping (Cadre d'une société de prévoyance endormie), actuellement le tableau le plus cher du monde pour un artiste en vie.

Représentant une femme obèse (Sue Tilley), entièrement nue, assoupie sur un canapé, il a été peint par l'artiste en 1995 et acheté aux enchères en mai 2008 pour près de 34 millions $ par, dit-on, le milliardaire russe Roman Abramovitch.

Alors que Lucianh Freud a vu sa notoriété décoller à l'international depuis les années 1990, Paris ne lui avait pas consacré d'exposition monographique depuis 22 ans. En 1987, le Centre Pompidou avait accueilli pendant un mois une rétrospective consacrée au peintre, mais la rencontre avec le public n'avait pas vraiment eu lieu.

«Puisse le visiteur, lavé des préjugés, recevoir à l'estomac le choc de ces oeuvres puissantes», écrit le président du Centre Pompidou, Alain Seban, dans la préface du catalogue.

Âgé de 87 ans, Lucian Freud, dont les apparitions publiques sont rares, était présent lors de la visite en avant-première dimanche soir. Entouré de certains de ses enfants et petits-enfants, l'artiste au regard bleu perçant a pris son temps pour parcourir les 900 mètres carrés de l'exposition bâtie autour du thème de l'atelier.

Un fil conducteur qui a séduit l'artiste et qui s'impose par sa pertinence. Lucian Freud peint exclusivement depuis son atelier, y compris les extérieurs, souligne Cécile Debray, commissaire de l'exposition. Ses paysages urbains sont vus de sa fenêtre, il peint son propre jardin depuis son atelier.

Né à Berlin en 1922, Lucian Freud émigre à Londres avec ses parents en 1934 devant la montée du nazisme. Il obtient la nationalité britannique en 1939 et s'installe dans la quartier populaire de Paddington en 1943. Depuis, il a changé plusieurs fois d'atelier mais il est resté dans l'ouest de Londres.

Présentées en fin d'exposition, les photos de son atelier prises par son assistant et modèle David Dowson, sont éloquentes. Des amas de peinture font vibrer les murs, des draps tachés de pigments jonchent le sol.

Lucian Freud ne travaille pas avec des modèles professionnels: il choisit ses proches, ses nombreux enfants, ses compagnes successives. En 1990, il rencontre le performer Leigh Bowery, personnage des nuits londoniennes, qui va poser pour lui deux années durant, parfois plusieurs jours par semaine.

«Je veux que la peinture fonctionne comme la chair (...) Pour moi, le tableau est la personne. Je veux qu'il fonctionne comme la chair», a expliqué l'artiste.

L'artiste excelle dans les autoportraits incisifs. En 1993, il se peint entièrement nu, dans des godillots sans lacets, affrontant le reflet du miroir.

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Lucian Freud. L'Atelier - Du 10 mars au 19 juillet. Centre Pompidou.