Le Musée des beaux-arts de Montréal célèbre aujourd'hui son 150e anniversaire. Sa directrice Nathalie Bondil fait le point. Et nous parle des 150 prochaines années...

À 150 ans, le Musée des beaux-arts de Montréal n'a jamais été aussi affamé. Dans les cinq dernières années, la valeur des oeuvres acquises par l'institution a fait un bond prodigieux de 7 à 21 millions de dollars, résultat d'intenses campagnes de sollicitation de dons auprès des collectionneurs. Un dynamisme qui se traduit également par les multiples projets en cours, qui vont de l'agrandissement des lieux à la remise en valeur de la collection permanente.

Au cas où vous ne le saviez pas, le musée inaugurera en 2011 son nouveau pavillon Claire et Marc Bourgie, réalisé grâce à l'appui financier de la famille du même nom. Cette annexe nécessaire, qui sera située dans l'ancienne église Erskine&American de la rue Sherbrooke (juste à côté du musée), va permettre au MBAM de doubler sa superficie pour l'art canadien et de s'offrir une salle de concert qui sera gérée par la toute récente Fondation Arte Musica, mise sur pied par Pierre Bourgie.

«On a toujours été interdisciplinaires, mais là on va intégrer de plus en plus de musique, souligne la directrice et conservatrice en chef Nathalie Bondil. Parce que la musique vient chercher un public qui ne venait pas au musée.»

Cette tendance, déjà éprouvée avec Warhol, Yoko Ono et plus récemment J.W. Waterhouse (musique sélectionnée par Kent Nagano), devrait se confirmer dans la plupart des expositions temporaires à venir. À commencer par celle sur le trompettiste Miles Davis, qui sera produite l'été prochain en partenariat avec le Festival de jazz de Montréal.

Sans frontières

D'autres changements sont à prévoir pour la collection permanente qui, dans la foulée des changements en cours, sera largement réorganisée et remise en valeur.

On pense à la collection d'art canadien, qui pourra se dévoiler plus généreusement dans son nouvel espace, mais aussi au département des cultures anciennes (art précolombien, art africain, art traditionnel chinois ou japonais) qui sera désormais mieux exploité, à la suite de l'embauche d'un conservateur attitré.

«On ne peut pas rester dans une vision ethnocentriste, observe Nathalie Bondil. Nous sommes une société multiculturelle et ce département est une facette importante du Musée. Nous en avons fait une priorité.»

L'autre priorité, c'est de mieux faire parler la collection permanente. En adoptant «l'approche transversale», Mme Bondil veut donner un nouvel éclairage à des oeuvres trop longtemps exposées hors contexte.

«On ne va pas seulement mettre en valeur les objets, mais aussi les techniques, les styles, les différents matériaux. On va introduire des éléments de musique, de littérature afin de mieux contextualiser les oeuvres. Je veux qu'on soit sans frontières», résume-t-elle, en espérant que ces «sésames» serviront de «passerelles» entre l'institution et le public. «Ces ensembles vont permettre à des gens qui ne connaissent pas trop les musées de relier les oeuvres à leur propre histoire.»

Et Jean-Paul Gaultier

Et les expos temporaires? Elles resteront les véritables vedettes du Musée, qui en a fait sa marque de commerce internationale. La rétrospective consacrée au designer de mode Jean-Paul Gaultier s'annonce à ce chapitre comme le gros morceau de l'été 2011, son univers éclectique et «décloisonné» résumant à lui seul la grande volonté d'ouverture de la vénérable institution, qui souhaite également faire une belle part à la mode, une avenue déjà explorée avec l'expo Yves Saint Laurent.

De moins en moins perçu comme élitiste, le MBAM poursuit donc sa longue marche vers la démocratisation. Plus d'accessibilité, c'est toujours plus de visiteurs. Et plus de visiteurs, c'est encore plus de sous pour nourrir une collection qui se chiffre actuellement à 36 000 objets et qui ne cesse d'augmenter avec la multiplication des acquisitions.

À noter que 99 % des oeuvres acquises le sont à la suite de dons et que le Musée est subventionné à 50 % par le gouvernement provincial, le reste dépendant directement de l'autofinancement.

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À lire samedi: 150 ans de grands et de petits moments. L'histoire du MBAM vue par La Presse.