Phénomène mondial sans précédent, la mort de Michael Jackson reste l'événement de l'année sur la planète musique. Mais sa disparition hyper médiatisée ne doit pas occulter le fait que d'autres musiciens ont aussi passé l'arme à gauche en 2009.

C'est le cas du légendaire Les Paul, décédé le 14 août à l'âge vénérable de 94 ans. Si vous pensiez que ce nom n'était qu'une marque de guitare, détrompez-vous. L'homme était toujours bien vivant. Mais qu'une Gibson porte son nom en dit long sur son importance dans l'histoire de la musique pop. En résumé, ce patenteux de génie a été le premier à créer une guitare électrique «hard body» (sans caisse de résonance), ce qui a changé pour toujours la face du rock. C'est aussi Les Paul qui a inventé le premier multipiste portatif, une véritable révolution dans le domaine de l'enregistrement sonore. Comme si ce n'était pas assez, l'homme jouait de la guitare comme un pro. Son jeu jazzy fluide, ludique et inventif lui a permis de connaître quelques succès impérissables (Mockin' Bird Hill et How High the Moon) avec sa femme Mary Ford, dans les années 50.

 

Ron Asheton possédait-il une Les Paul? A-t-il révolutionné le rock? Peut-être pas, mais le guitariste du groupe The Stooges, mort le 6 janvier à 60 ans, n'en reste pas moins un grand modèle de simplicité pour les amateurs de musique punk et hardcore. Ses riffs syncopés et primitifs ont jeté les bases d'un certain rock sauvage, et permis au toujours vivant Iggy Pop de prendre sa place dans l'asile des fous furieux de la planète rock.

Lien tout trouvé pour revenir au très lysergique Sky Saxon, auteur du célèbre succès garage Pushin'Too Hard, qui a fait la pluie acide et le beau temps en technicolor dans la Californie des années 60 avec son groupe The Seeds. Pauvre Sky: son plus grand drame aura été de crever le même jour qu'un certain Michael Jackson, ce qui a eu pour effet de reléguer sa disparition au rayon des notes de bas de page. Il avait peut-être 65 ans, mais personne n'en est vraiment certain.

Dans un registre plus calme, soulignons en outre le décès de l'auteur-compositeur britannique John Martyn (mort le 29 janvier à 61 ans), du folkeux américain Mike Seeger (demi-frère de Pete), décédé le 7 août à 75 ans, mais aussi et surtout de la blonde Mary Travers (du trio folk Peter, Paul&Mary), qui est allée chanter Puff the Magic Dragon sur un nuage, le 16 septembre à l'âge de 73 ans. Soit dit en passant: ne pas confondre avec notre Bolduc nationale, qui portait exactement le même nom, et qui aurait 115 ans aujourd'hui...

En vrac, mentionnons aussi les départs plus ou moins prémédités du chanteur américain Mink Deville (56 ans), du batteur de jazz Louie Bellson (85 ans), de la chanteuse argentine Mercedes Sosa (74 ans), du guitariste de NRBQ Steve Ferguson (60 ans) et du batteur Dewey Martin (66 ans), qui a été membre du groupe «west coast» The Buffalo Springfield.

Achtung Bashung!

Chez les francophones, Alain Bashung demeure le plus grand disparu de l'année. Emporté par le cancer le 14 mars à l'âge de 61 ans, le diamant noir de la chanson française est parti rejoindre Gainsbourg au panthéon des originaux devenus intouchables. En 30 ans de carrière, cet auteur-compositeur-interprète de premier plan avait gravé 13 albums, une dizaine de tubes (Gaby, Vertige de l'amour, Osez Joséphine) et remporté 11 Victoires de la musique (équivalent français de nos Félix).

Plus près de chez nous, rappelons que le crooneur Raymond Berthiaume s'est éteint le 22 juin à 78 ans. Actif depuis la belle époque des cabarets, ce chanteur à la «voix de velours» s'était fait connaître dans les années 50 au sein du groupe les Three Bars, en popularisant la chanson N'oublie jamais. Discret de nature, ce chanteur sans défauts n'a jamais été une star flamboyante. Mais il était un des rares artistes québécois à avoir vu ses chansons paraître sur 78 tours, 33 tours et disque compact. C'est dire la longévité de sa carrière!

Celle de Réginald Breton a été clairement beaucoup plus courte. Mais on s'en voudrait de ne pas souligner la mort du chanteur du groupe yéyé Les Excentriques, à l'âge de 63 ans. On se souvient un peu des Excentriques pour leurs succès traduits des Beach Boys (Fume, fume, fume, Aide-moi chérie), mais surtout pour leurs costumes et leurs cheveux roses qui faisaient fureur à l'émission Jeunesse d'aujourd'hui. Mais cela n'a pas été suffisant, hélas, pour garantir la survie de la formation, qui a tiré la «plogue» en 1966, après deux ans d'existence. Réginald Breton était depuis retourné vivre en Abitibi, où il était devenu agent d'immeuble.

Dernier hommage, enfin, à monsieur Jean-Paul Rickner, mort oublié à l'âge de 81 ans. À la fin des années 50, cet homme d'affaires avait fondé la maison de distribution Trans-Canada, jetant pour ainsi dire les bases de l'industrie du disque québécoise actuelle. Trans-Canada s'est ensuite muée en Musicor, puis en GAM musique, deux sociétés aujourd'hui absorbées par Sélect, le plus important distributeur de disques au Québec.

Qu'il repose en paix.