Pour proposer de nouveaux services, les opérateurs mobiles sont condamnés à s'entendre avec les acteurs de l'Internet, mais ils comptent bien faire de leur énorme clientèle un atout à monnayer, et dans ce rapport de force, chacun devra faire des compromis.

Pour proposer de nouveaux services, les opérateurs mobiles sont condamnés à s'entendre avec les acteurs de l'Internet, mais ils comptent bien faire de leur énorme clientèle un atout à monnayer, et dans ce rapport de force, chacun devra faire des compromis.

Le congrès mondial 3GSM de la téléphonie mobile, à Barcelone, bruisse depuis lundi d'une rumeur, lancée par le journal britannique Sunday Telegraph: les opérateurs voudraient s'associer pour créer un moteur de recherche Internet sur mobile qui leur éviterait d'utiliser ceux de Yahoo! ou Google.

Si rien n'est confirmé officiellement, cette rumeur illustre la partie qui se joue entre ces deux univers: «il y a un jeu de pouvoir entre les acteurs de l'informatique et de l'Internet et les opérateurs mobiles, qui parfois rassemble à du poker menteur», commente Nicolas Petit, directeur de la division Mobilité de Microsoft France.

«Depuis un an, de nombreux partenariats se sont noués», note Vincent Poulbère, analyste à l'institut d'études Ovum: Vodafone et Yahoo! sont associés dans la publicité sur mobile, tandis que les sites Internet YouTube, eBay et Myspace sont progressivement rendus accessibles sur mobile.

Mais le choc des cultures, et surtout des modèles économiques, pourrait être dur à absorber, selon l'analyste: «le mobile est l'environnement du tout-payant pour l'utilisateur, Internet est celui du tout-gratuit financé par la publicité».

Pour l'instant, le tout-payant prévaut: le client paie selon le temps qu'il passe à surfer sur son mobile, avec des débits bien inférieurs à l'ADSL. Seuls 10% des clients utilisent ce service.

Le tout-gratuit rebute les opérateurs: ayant lourdement investi pour construire leur réseau et conquérir leurs clients, ils ne sont pas prêts à se montrer philanthropes.

«L'Internet sur mobile ne va pas devenir une fonctionnalité gratuite», a déclaré mardi, comme pour les rassurer, Marco Boerries, directeur de l'activité Vie connectée de Yahoo!.

Mais ce service peut devenir moins cher grâce à la publicité, «le lien manquant», selon lui, entre les deux industries: Yahoo! lance ainsi une plateforme publicitaire sur mobile dans 19 pays.

Si les acteurs de l'Internet se montrent si respectueux vis-à-vis de ceux du mobile, c'est que ces derniers ont quelque chose qu'ils n'auront jamais: la quasi-totalité de la population mondiale pour clients potentiels.

«Le nombre d'utilisateurs de la téléphonie mobile a dépassé les 2 milliards de personnes (2,6 fin 2006, ndlr), alors qu'il y a seulement 300 à 400 millions de PC dans le monde», explique Nicolas Demassieux, directeur européen de la recherche chez Motorola.

«Pour une grande quantité de gens, le seul équipement informatique est le mobile: ce sera leur seule manière de se connecter à Internet», poursuit-il.

Mais Internet peut faire valoir sa popularité avec des services comme Yahoo!, Google ou la messagerie instantanée Windows Live Messenger de Microsoft.

Beaucoup de tentatives des opérateurs mobiles de créer leurs propres services «ont plus ou moins échoué», relève M. Poulbère, car les utilisateurs veulent retrouver sur mobile ce qu'ils aiment sur Internet: pour générer de nouveaux revenus, ils devront adopter les services de l'internet, quitte à partager les revenus, comme Orange avec Microsoft sur leur service commun de messagerie instantanée.

Chaque industrie a donc des atouts en main pour négocier avec l'autre: «2007 sera l'année de l'expérimentation de nouveaux modèles économiques», prédit Hamid Akhavan, directeur technique de T-Mobile.

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