Le Château s’est peut-être écroulé après plusieurs années difficiles, mais un détaillant ontarien a quand même décidé de donner une deuxième chance à la marque de la chaîne québécoise qui liquidait ses actifs.

Établie au nord du centre-ville de Toronto, YM, qui est propriétaire d’enseignes comme les détaillants de vêtements Suzy Shier, Stitches et Urban Planet, a mis la main sur la propriété intellectuelle – comme des marques de commerce, les noms de domaines web et brevets – et d’autres actifs, comme des stocks, du détaillant fondé en 1959.

Selon des documents déposés auprès des autorités réglementaires, le prix payé oscille aux alentours de 5,25 millions de dollars. Le montant payé par YM devrait en principe être redistribué aux créanciers. L’entente a obtenu l’aval de la Cour supérieure du Québec mardi et la conclusion de la transaction a été annoncée vendredi. L’acquéreur est le détaillant de mode féminine Suzy, mais l’enseigne appartient à YM.

Déficitaire depuis 2010, Le Château, qui éprouvait des difficultés bien avant la pandémie de COVID-19, s’était tourné vers la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies en octobre dernier. L’entreprise était au cœur d’un processus de liquidation supervisé par la firme new-yorkaise Hilco Streambank qui devait se terminer au printemps. La crise sanitaire a retardé les choses.

Il n’a pas été possible dans l’immédiat d’obtenir des commentaires chez Le Château ainsi que du côté de YM. On ignore donc les intentions de l’entreprise ontarienne. En principe, les boutiques Le Château doivent mettre la clé sous la porte le 30 juin. Tous les administrateurs et dirigeants du détaillant ont démissionné à la suite de la clôture de la transaction.

L’acheteur a trouvé dans Le Château quelque chose qu’il n’avait pas avantage à bâtir de zéro. Construire une marque est difficile. Avec Le Château, il y a des repères.

Francine Rodier, professeur à l’École des sciences de la gestion de l’UQAM, en entrevue avec La Presse

YM a ouvert sa première boutique Stitches au centre-ville de Toronto en 1975. Son réseau compte 650 établissements et quelque 5400 employés, d’après son site web. La compagnie est propriétaire de 10 enseignes. Aucune n’est toutefois présente dans le créneau des tenues de soirée et des robes de bal.

Mme Rodier estime que le nouveau propriétaire de la marque Le Château devra la « positionner plus clairement » afin de capter l’intérêt des consommateurs.

« La marque voulait s’adresser aux professionnelles de 35 ans et plus et, à la base, ce n’était pas le cas, a illustré l’experte. Le détaillant avait diversifié son offre avec des chaussures et des accessoires et cela n’a pas suffi. C’est là qu’il y a du travail à faire. »

D’après la convention d’achat, l’offre de YM a été présentée le 21 mai dernier et une entente a été conclue vendredi dernier.

Le Château avait affiché une perte nette de 69,2 millions de dollars au terme de l’exercice terminé le 25 janvier 2020. Ses derniers profits remontent à 2010, lorsque l’entreprise exploitait 236 boutiques au Canada et deux points de vente au sud de la frontière, d’après le rapport annuel de l’époque.

Plusieurs détaillants du secteur de la mode, comme Aldo, Reitmans et Groupe Dynamite, ont été contraints de se placer à l’abri de leurs créanciers en raison de la pandémie. En octobre dernier, Le Château avait toutefois été plus loin en annonçant qu’il mettrait la clé sous la porte après avoir exploré une série d’options, comme un refinancement ainsi qu’une vente de la société.