Surveiller les émissions de méthane dans l’atmosphère, cartographier l’évolution des zones côtières et des océans : la solution des défis sur Terre passe en partie par les satellites. De Montréal à Rimouski, des PME québécoises œuvrent à libérer le plein potentiel de l’espace. Survol.

Chaque jour, l’équipe de GHGSat déchiffre les dernières données collectées par ses satellites, Claire et Iris, qui, équipés d’une caméra infrarouge, détectent et quantifient la présence de gaz à effet de serre dans l’atmosphère.

Les données sont ensuite vendues à des compagnies pétrolières, des producteurs d’électricité et autres opérateurs soumis à des plafonds d’émissions de gaz à effet de serre.

« On est la seule entreprise du genre au monde », lance fièrement le président de la PME montréalaise, Stéphane Germain.

La jeune pousse installée boulevard Saint-Laurent, à Montréal, fait partie des 16 entreprises canadiennes, dont cinq au Québec, qui ont reçu des contributions de l’Agence spatiale canadienne (ASC) dans le cadre de son initiative utiliTerre. L’objectif ? Mettre sur pied un projet de recherche et développement qui maximise l’utilisation des données d’observation de la Terre.

GHGSat a obtenu 300 000 $ pour allier l’intelligence artificielle à sa technologie de télédétection dans l’objectif de faciliter la détection de fuites de méthane.

Une pétrolière peut avoir des infrastructures partout à travers le monde. C’est impossible pour elle de tout surveiller. On veut les aider à trouver leurs fuites rapidement.

Stéphane Germain, président de GHGSat

Dans une ville dense comme Montréal, l’intelligence artificielle permet d’identifier, parmi tous les signaux et sources potentielles d’une imagerie satellite, le point de fuite exact sur une superficie de 25 m sur 25 m.

Du Bas-Saint-Laurent jusque dans l’espace

Établie à Rimouski, Arctus utilise les données des agences spatiales du monde pour suivre l’évolution des environnements aquatiques comme les rivières, les lacs et les rives.

« On sait que les zones côtières sont particulièrement sensibles aux changements climatiques. On peut penser à la hausse du niveau de la mer et à la fonte des glaces. Les données satellitaires sont très intéressantes, car elles permettent de suivre un environnement dynamique en temps quasi réel », explique son directeur scientifique, le Dr Simon Bélanger.

Avec la subvention de 300 000 $ de l’ASC, Arctus développe un observatoire de veille environnementale dans la baie de Sept-Îles. L’idée est de surveiller la fonte des glaces le long des rives, les sédiments en suspension et autres paramètres de qualité de l'eau dans cette zone portuaire riche en vie marine.

Mission : rendre les données accessibles

Que ce soit pour visualiser son futur quartier, planifier sa route, prévoir un orage ou par simple curiosité, l’imagerie satellitaire fait partie de notre quotidien. « C’est un outil d’aide à la décision », résume Stéphane Hardy, directeur de Dromadaire Géo-Innovations, installée dans l’est de l’île de Montréal.

Sa petite équipe de trois employés a reçu une contribution de 84 483 $ pour mettre au point un outil pour simplifier l’accès aux données satellitaires. Ainsi, ce ne seraient pas seulement les gestionnaires de barrage électrique, avec qui Dromadaire Géo-Innovations a l’habitude de faire affaire, mais l’ensemble de la population qui pourrait profiter des technologies d’observation de la Terre.

Toujours plus loin

L’ASC s’est basée sur trois critères pour octroyer les subventions liées au programme utiliTerre : l’innovation de la proposition, le mérite technique et les bénéfices pour les Canadiens.

« Ce qu’on cherche, ce sont des solutions pour tout le monde », précise Steve Iris. Le chef en applications et utilisations en observation de la Terre de l’ASC s’attendait à recevoir dix propositions, tout au plus.

« Avec la pandémie, on a senti un plus grand besoin des entreprises, donc on a bonifié notre programme. »

Selon l’agence fédérale, ces contributions devraient mener à la création de 240 emplois au pays. Pour les PME comme Dromadaire Géo-Innovations, ouvrir un nouveau poste représente déjà beaucoup.

« C’est porteur d’espoir, pour nous, de remporter un concours comme ça. On est une petite entreprise, je me bats contre de grosses entreprises. Les petites victoires font du bien par les temps qui courent », se réjouit M. Hardy.

En plein élan, l’équipe de GHGSat prévoit dépasser 100 employés au cours des prochains mois, alors qu’elle en comptait 58 à la fin d’août 2020.

Un troisième satellite de la boîte montréalaise rejoindra Claire et Iris en janvier prochain.