Même cause, mêmes effets: les deux majors du pétrole Total et BP ont vu leurs bénéfices plonger au premier trimestre, touchées de plein fouet par la chute des prix du brut et obligées de tailler dans leurs dépenses et leurs coûts et de céder des actifs pour tenir le choc.

Le géant pétrolier français Total a publié un bénéfice net en baisse de 20% à 2,66 milliards de dollars, tandis que celui du britannique BP a reculé de 26% à 2,6 milliards de dollars.

Le bénéfice net ajusté, qui fait référence sur le marché, s'affiche en baisse de 22% chez Total (2,6 milliards de dollars), et plonge de 40% pour BP (2,1 milliards de dollars).

Les deux majors payent la chute des cours du brut depuis la mi-2014. Le baril de Brent s'est réduit de moitié sur un an pour atteindre 53,9 dollars en moyenne entre janvier et mars.

Toutefois, ces résultats sont moins pires que prévu, estiment les analystes, qui attendent jeudi les publications d'Exxon Mobil et Shell.

Total affiche un «début d'année impressionnant» avec «probablement l'une des meilleures performances du secteur» sur son bénéfice ajusté, notent les analystes de Barclays.

Le groupe a particulièrement bien résisté dans la production, en hausse de 10%, grâce à ses projets en Angola et en Norvège et une prise de participation dans une concession à Abou Dhabi.

Les résultats de BP sont eux «moins mauvais que ce que les marchés craignaient grâce aux bénéfices robustes dans l'aval», juge Victoria Webb, courtier chez London Capital.

Ces performances ont d'ailleurs été saluées par les marchés. Total prenait 1,49% à 49,9 euros ce matin à la Bourse de Paris, tandis que l'action BP progressait de 1,58% à 479,65 pence au même moment à Londres, dans des marchés orientés à la baisse.

Cette résistance est le fruit de mesures de réduction des coûts, de baisse des investissements et de programmes de cessions annoncés ces derniers mois et qui permettent de limiter les dégâts.

BP a ainsi gelé les salaires de ses 84 000 employés et a commencé à réduire ses effectifs, notamment en mer du Nord, quand Total compte réduire ses effectifs de 2000 postes dans le monde (sur environ 100 000) et a revu à la hausse son plan de réduction de coûts mi-février, avec un objectif de 1,2 milliard de dollars au lieu des 800 millions prévus.

Le Britannique n'investira aussi que 20 milliards de dollars cette année, contre les 24 à 26 milliards annuels jusque-là. Total va réduire ses investissements de 10% pour les contenir entre 23 et 24 milliards de dollars.

Perspectives prudentes

Enfin, BP vise les 10 milliards de dollars de cessions d'ici la fin de l'année. Dans le même temps, Total prévoit de vendre pour 5 milliards de dollars d'actifs cette année et 10 milliards d'ici 2017.

Ce trimestre, le Français a finalisé la cession de sa filiale Bostik et des participations dans des blocs onshore au Nigeria. Et il a confirmé son intention de se délester de 20% du gisement de Laggan-Tormore en mer du Nord.

Et ses résultats «illustrent les progrès (...) d'une part dans le démarrage de nouveaux projets et d'autre part les effets des économies de coûts», évaluent les analystes de Morgan Stanley.

Côté britannique, «la bonne performance dans le raffinage (...) montre que BP est proactif pour s'adapter à la chute des prix du brut en concentrant plus d'efforts hors des coûteuses activités de prospection et de production», avance Augustin Eden, d'Accendo Markets.

Toutefois, les analystes restent prudents dans leurs perspectives.

Chez Total, des questions subsistent sur «l'impact sur la rentabilité des annonces récentes dans le raffinage en France», et «les avancées dans le démarrage de plusieurs projets clés, cinq étant attendus en 2015», relève Biraj Borkhataria, analyste à la Banque Royale du Canada (RBC).

Si BP «s'est positionné pour une période potentiellement longue de prix bas du pétrole (...) il y a encore beaucoup de choses à faire, et le chemin vers les niveaux passés de rentabilité reste compliqué», prévient Richard Hunter, du courtier Hargreaves Lansdown.

Le Britannique, sur lequel des rumeurs de rachat se sont multipliées, continue aussi de payer les conséquences de l'explosion de la plateforme Deepwater Horizon en 2010 dans le Golfe du Mexique et a dû encore provisionner 332 millions de dollars ce trimestre.

Total lui a dû aussi passer 1,05 milliard de dollars de dépréciations notamment liées à la dégradation des conditions de sécurité en Libye et au Yémen.