Nicholas Polyzos n'agit pas seulement comme notaire. Un jugement le dépeint comme un homme d'affaires méprisant, qui a habilement floué l'un de ses partenaires après avoir investi avec de l'argent liquide.

Le jugement de Marie-Christine Laberge, de la Cour supérieure, a été rendu à la fin de septembre, après qu'une multitude de procédures entre les parties eurent avorté. La juge conclut que Nicholas Polyzos a abusé de la confiance de son partenaire, un fait «encore plus grave du fait qu'il est notaire, un professionnel dont on s'attend à une conduite exempte de tout reproche», écrit la juge.

Nicholas Polyzos est apparu sur les écrans radars de la GRC lors de l'opération Colisée contre la mafia, qui s'est terminée en 2006. L'organisation criminelle a eu recours à ce notaire pour effectuer certaines grosses transactions immobilières par le truchement de l'entreprise Malts Financing. Cette firme de financement était considérée par la GRC comme un outil pour blanchir des fonds provenant du trafic de la drogue. M. Polyzos n'a jamais été accusé dans cette affaire.

Le présent litige oppose M. Polyzos au restaurateur Panagiotis Kostopoulos à propos d'un investissement qui a mal tourné dans un restaurant La Belle Province, à Rawdon. Durant les procédures, M. Kostopoulos est décédé, c'est donc sa femme, Irène Jonas, qui a poursuivi les démarches.

Le partenariat entre les deux parties commence entre 2001, lors du lancement du restaurant à Rawdon. En 2003, ils achètent à parts égales l'immeuble où est situé le restaurant, route 125, à Rawdon.

Pour son investissement, M. Polyzos paie environ 30 000$ en argent liquide, parfois par l'entremise de sa conjointe, Sylvie Gouron, qu'il utilise comme prête-nom. La juge trouve surprenant que le notaire ne tienne aucune comptabilité de ses mises de fonds. Les deux parties contractent également, entre autres, un prêt hypothécaire atteignant 204 000$ auprès de la Banque TD.

La chicane explose entre les deux parties en 2006, lorsque le restaurant fait face à des difficultés financières. Dans le contexte de la faillite du restaurant, Nicholas Polyzos procède à une série de transactions immobilières touchant l'immeuble et les terrains adjacents qui ont pour effet de déposséder M. Kostopoulos de sa part du gâteau.

La juge parle d'une «habile stratégie» à laquelle ont participé la conjointe Sylvie Gouron et même la Banque TD. L'institution financière, écrit la juge, «a manqué à son obligation d'agir équitablement et de bonne foi à l'égard de son client Kostopoulos».

En somme, par des transactions complexes, Nicholas Polyzos a réussi à s'attribuer tous les actifs du partenariat pour un montant bien moindre que leur valeur. «Pour la somme de 147 292$, il acquiert un immeuble valant plus de 250 000$», explique notamment la juge.

»Agressif et suffisant»

Selon le jugement, M. Polyzos n'a pas agi de bonne foi, préfère l'ambiguïté à la clarté et est prêt à prendre toutes les mesures pour arriver à ses fins.

«Devant le tribunal, Polyzos a une attitude suffisante et méprisante, écrit la juge. Il se présente à la Cour sans aucun dossier. Il parle rapidement comme si les questions l'importunaient. Il s'absente de l'audience car des affaires très importantes, beaucoup plus importantes que son procès, l'attendent.»

«Témoigner à la Cour n'est, en effet, pas très payant et Polyzos manifeste plusieurs fois qu'on lui fait perdre du temps, poursuit la juge. Il est narquois et agressif. Il a des restrictions mentales et des commentaires déplaisants. Il répond de façon à montrer que tout cela ne l'intéresse pas et qu'il a des choses plus intéressantes à faire. Polyzos dit une chose et son contraire. Il est aidé en cela par son avocat qui, habilement, lui fait comprendre qu'il a dit une chose invraisemblable. Alors, Polyzos affirme son contraire.»

Malgré la responsabilité de M. Polyzos, la juge n'accorde pas une grande indemnité à la succession de M. Kostopoulos parce que le restaurateur n'a pas été en mesure de documenter les dommages subis et de prouver qu'il pouvait éviter la faillite. Elle exige tout de même de M. Polyzos qu'il verse 10 000$ à la succession pour des dommages moraux et 10 000$ pour des dommages exemplaires.

Le notaire n'en est pas à son premier jugement défavorable ces derniers temps. Le 23 septembre, le Tribunal des professions a confirmé le jugement du comité de discipline de la Chambre des notaires et imposé une radiation de deux mois à Nicholas Polyzos. La radiation est entrée en vigueur le 30 septembre.

Essentiellement, Nicholas Polyzos a été sanctionné pour avoir approuvé une transaction entérinant la donation des biens d'une dame de 86 ans qui n'était pas lucide. La transaction ayant eu lieu en 2004, il a donc fallu six ans avant que ce dossier même à une radiation.