Pour bien gérer son patrimoine, il faut utiliser les bons outils financiers. Ce huitième texte d'une série de 12 porte sur les revenus fixes. La semaine prochaine, on abordera les actions.

On ne prêtera pas de la même façon à Bill Gates, immensément riche, qu'à General Motors, au bord de la faillite, ou à notre beau-frère, un gars bien ordinaire.

«Pour prêter, il faut avoir confiance en l'emprunteur, en sa capacité de rembourser et de faire les paiements d'intérêt», rappelle Gabriel Lancry, administrateur associé chez ScotiaMcLeod.

Or, une obligation n'est rien d'autre qu'une reconnaissance de dette. L'investisseur qui l'achète prête de l'argent aux gouvernements ou aux entreprises. En contrepartie, il est rémunéré régulièrement sous la forme de coupons d'intérêt, et récupère sa mise initiale à l'échéance.

D'où l'importance de bien choisir l'émetteur. Car s'il fait faillite, il ne pourra pas respecter ses engagements, et l'obligation n'aura plus aucune valeur.

Au Canada, l'émetteur le plus solide est le gouvernement fédéral. «Ça vient du fait qu'il peut soit taxer davantage, soit imprimer de l'argent pour respecter ses engagements», explique Benoit Durocher, président d'Addenda Capital.

Les gouvernements provinciaux et les municipalités, qui ont un pouvoir de taxation limité, arrivent juste derrière. Quant aux entreprises, elles comportent plus de risque, car leurs revenus dépendent de leurs activités, de leur succès commercial...

On peut s'informer sur la réputation et la santé financière des émetteurs en consultant les cotes de crédit octroyées par les agences de notation (Moody's, Standard & Poors, DBRS).

Les obligations de «meilleure qualité» sont celles dont la cote va de AAA à BBB. En deçà de ce seuil, on tombe dans les «obligations de pacotille».

«Des études démontrent que les obligations de pacotille comportent un risque de défaut plus grand et que ce risque augmente au fur et à mesure que la cote descend», dit M. Durocher.

«C'est sans compter qu'une cote de crédit est quelque chose de dynamique. Elle peut fluctuer en fonction de la santé financière de l'émetteur», prévient Diane Moisan, chef de produit à la Banque Nationale.

Ainsi, si une obligation subit la décote, sa valeur au marché diminuera, mais le coupon d'intérêt restera inchangé, ce qui augmentera le rendement pour les futurs acheteurs. C'est qu'une cote de crédit moindre ou une échéance plus longue - le temps étant un facteur de risque puisque la situation de l'émetteur peut changer - sera normalement compensée par un rendement plus élevé.

Voilà pourquoi les obligations du gouvernement du Québec donnent présentement un rendement annuel de 2,52% pour l'échéance d'octobre 2013, comparativement à 2,98% pour décembre 2014.

Jeu de l'offre et de la demande

L'offre et la demande peuvent également influer sur le prix de ces titres. «À preuve, pendant la crise du crédit, les investisseurs ont senti le besoin de se réfugier dans la qualité. Résultat: la demande d'obligations corporatives a chuté, propulsant l'écart entre leur rendement et celui des obligations fédérales à un sommet historique», raconte Mme Moisan.

Toutefois, depuis décembre 2008, les investisseurs regagnent confiance et reviennent tranquillement dans ce marché. L'écart de rendement s'est automatiquement réduit. «Mais la marge de manoeuvre est encore intéressante», pense M. Lancry.

L'autre risque important, dans le cas où il faudrait vendre le titre avant l'échéance, est le mouvement des taux d'intérêt dans l'économie.

Comme le coupon d'intérêt d'une obligation est fixe, si le taux d'intérêt déterminé par la politique monétaire monte, cela aura pour effet de faire diminuer le prix de l'obligation. Plus la durée de l'obligation est longue, plus la baisse de prix sera ressentie.

« Certains profitent de la situation, dit Gabriel Lancry. Ils achètent une obligation avec un coupon de 3% lorsque le taux d'intérêt courant est de 4%. L'obligation se vend alors à escompte, disons 95$, par rapport aux 100$ remboursés à l'échéance. Ainsi, ils réalisent à terme un gain en capital de 5$, imposable à 50% seulement. »

Un marché encore plus pépère

Les titres négociés sur le marché monétaire servent essentiellement à stationner de l'argent en attendat de prendre des décisions de retrait ou d'Investissement.

On les utilisera, par exemple, pour la partie liquidité du portefeuille, pour des placements à court terme. Car ces titres - moins risqués que les obligations - viennent à échéance dans moins d'un an.

Les bons du Trésor, par exemple, sont très sûrs. On peut les revendre en tout temps.

Il y a aussi les acceptations bancaires, qui sont des billets au porteur émis par des entreprises de qualité et garantis par une banque.

Sans compter le papier commercial, émis par des débiteurs ayant un excellent crédit.

Mais en dépit de cette solidité légendaire, le marché monétaire a été durement secoué, à la fin de l'été 2007, par la crise du papier commercial adossé à des actifs (PCAA) émis par des institutions non bancaires. Soudainement, la demande pour ce papier s'est tarie, empêchant toute négociation.

«Le problème, explique Diane Moisan de la Banque Nationale, c'est qu'il s'agissait d'une innovation financière complexe et mal comprise que seule l'agence de notation DBRS évaluait.» Le risque a été mal estimé.

«Par contre, les autres titres du marché monétaire existent depuis très longtemps, sont bien compris et sont moins complexes, poursuit-elle. On peut donc dormir sur nos deux oreilles, sachant que leur cote de crédit est plus fiable.»