Ce n'était pas un combat contre la délinquance. Lorsqu'il a fondé le club de boxe l'Espoir, en 2005, dans le quartier Saint-Michel, le policier Evens Guercy cherchait d'abord à occuper les jeunes.

L'idée lui était venue après que lui et son collègue eurent abordé des jeunes désoeuvrés qui flânaient dans une station de métro du quartier.

La réplique de l'un d'eux l'avait frappé comme un jab. Il ne flânait pas, il n'avait simplement nulle part d'autre où aller.

Né en Haïti et arrivé à 15 ans au Québec, Evens Guercy a émergé de l'adolescence à Saint-Hyacinthe, où il a appris le «noble art».

Après un baccalauréat en sociologie et un emploi au Service correctionnel Canada, il s'est inscrit en techniques policières.

«Comme policier, j'avais plus de chances de travailler en amont, pour la prévention, avec des jeunes qui ne sont pas encore criminalisés», explique-t-il.

L'espoir est un havre qui se bâtit patiemment. Evens Guercy a d'abord recueilli 4000 $ auprès de la Ville de Montréal, une somme à peine suffisante pour des gants et des cordes à sauter.

Avec le soutien de la communauté haïtienne, de ses collègues du Service de police de la Ville de Montréal et de la Commission scolaire de Montréal, qui lui a prêté un local adjacent à l'école secondaire Louis-Joseph-Papineau, le club s'est peu à peu garni d'équipements... et de jeunes.

Sa plus grande difficulté a consisté à gagner leur confiance.

«Il était inconcevable pour un jeune du quartier qu'un policier puisse faire un projet de bénévolat comme celui-là.»

Ça l'est devenu.

Près de 70 jeunes fréquentent maintenant le club. Des médecins du monde, des infirmières et une pharmacienne viennent y donner des séances d'information. Un volet compétitif s'est ajouté. Un de ses jeunes boxeurs a remporté une médaille de bronze au championnat canadien.

«Le succès du club, c'est le succès des jeunes, pas le mien, dit-il. Ce sont eux qui font les sacrifices, qui combinent sport, études et travail. Ce sont eux qui se dépassent au quotidien. Pas moi.»

Mais il fallait que quelqu'un leur en donne l'occasion.