Le maire de l'Assomption, Jean-Claude Gingras, sera malgré lui le premier à témoigner, à l'ouverture de l'enquête publique sur l'administration de sa municipalité de Lanaudière.  Ainsi en a décidé la Commission municipale du Québec (CMQ), ce matin, lors d'une audience afin de déterminer le statut des différents acteurs municipaux appelés à témoigner au cours des deux prochains mois.

L'avocat représentant le maire, Me Pierre Éloi Talbot, a tenté en vain de convaincre la présidente des audiences de la CMQ, Sandra Bilodeau, de retarder son témoignage le temps qu'il se prépare, particulièrement au sujet d'une douzaine de cadres congédiés, suspendus ou en congé de maladie à la suite de l'élection municipale de 2013. La requête a été rejetée.

Le procureur en chef de l'enquête, Me Joël Mercier, s'est opposé à ce report en plaidant qu'il ne voyait pas «la préparation (du maire) à faire» concernant la gestion de son capital humain. Il a annoncé que le deuxième témoin qui sera appelé à témoigner, lors des travaux qui débuteront mercredi prochain, sera le directeur général de la Ville, Jean Lacroix. Ce dernier et le maire ont été visés par l'Union permanente anticorruption (UPAC), l'été dernier, pour entrave à la justice.

Présent à l'audience, le maire Gingras a répété lors d'un entretien avec La Presse qu'il n'a rien à se reprocher, au contraire. «Je n'ai pas été accusé d'abus de confiance, mais d'entrave à la justice», a-t-il fait valoir. Juste avant les fêtes, il avait évité une destitution devant les tribunaux faute de preuves.

D'autres élus, dont le conseiller Richard Prenevost, un allier du maire, une bonne dizaine de cadres, des dirigeants de firmes privées ayant décroché des contrats avec la municipalité, de même que des avocats, seront appelés à témoigner. La liste sera dévoilée cette semaine. 

À ce sujet, le procureur en chef a demandé à l'avocat représentant la municipalité, Me André Comeau, de demander au conseil municipal de l'Assomption d'adopter une résolution afin que des avocats susceptibles de témoigner puissent être levés du secret professionnel. Il pourrait s'agir d'avocats de la municipalité, mais également de cabinets externes qui ont accompagné la Ville dans l'octroi de contrats. À la sortie de l'audience, Me Mercier a expliqué aux avocats qu'il déposera d'ici vendredi les documents servant à remonter le fil du temps, dont des procès-verbaux des séances du conseil.

«J'ai demandé certains documents, mais j'attends toujours, a-t-il déploré. Certaines personnes à la municipalité m'ont répondu qu'ils (les documents) relevaient du directeur général.»

D'ici le 19 février prochain, à raison de trois jours semaine, la CMQ se penchera donc sur de possibles accrocs dans le processus d'appel d'offres, la gouvernance, et les relations de travail au sein de l'administration municipale de l'Assomption. L'enquête ne portera pas sur les événements avant les élections de 2013. Elle débouchera sur un rapport de recommandations qui sera déposé au gouvernement. À l'instar de la Commission Charbonneau, l'enquête peut donner suite à des avis de blâme, allant de la réprimande, à la suspension, jusqu'à la destitution.

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La CMQ a attribué des statuts de «participants» ou «d'intervenants» aux témoins qui participeront à l'enquête publique, aujourd'hui. Les participants pourront intervenir lors des différents témoignages, contrairement aux intervenants, qui devront attendre la fin de l'enquête pour prendre la parole ou déposer un mémoire. Le maire Gingras, le conseiller Prevenost, et la Ville de l'Assomption ont obtenu un statut de participants. L'Association des cadres municipaux du Québec a un statut d'intervenant. Les cadres congédiés, suspendus ou en congé de maladie, pourront réclamer un statut ou l'autre quand ils seront convoqués.