Depuis cinq ans, les finances publiques du Québec n'ont jamais été aussi mal en point, selon un relevé fait par La Presse. De fait, le gouvernement accumule un déficit au rythme de 375 millions de dollars par mois depuis un an, soit trois fois plus vite que prévu.

Le gouvernement péquiste fait donc face à un défi colossal à la veille de son premier budget, le 20 novembre. L'atteinte du déficit zéro l'an prochain n'est pas garantie.

Pour connaître la tendance budgétaire, nous avons additionné les déficits mensuels du gouvernement des 12 plus récents mois pour lesquels les données sont connues, soit d'août 2011 à juillet 2012. Nous avons ensuite comparé ce déficit annuel aux périodes correspondantes des cinq années précédentes.

Les résultats sont éloquents. Si l'année financière s'était terminée le 31 juillet dernier, le Québec aurait engrangé un déficit de 4,5 milliards de dollars, soit une moyenne de 375 millions par mois. En comparaison, le déficit pour cette période a oscillé entre 2,7 et 3,0 milliards au cours des trois années précédentes. Le Québec engrangeait des surplus de 1,0 et 2,1 milliards il y a cinq ans, soit en 2006-2007 et 2007-2008.

La détérioration des finances publiques depuis un an s'explique par une économie qui ralentit. «Les perspectives économiques se détériorent partout au Canada, mais en particulier au Québec. On peut affirmer sans trop se tromper que le déficit sera plus élevé», a déclaré Benoit P. Durocher, économiste au Mouvement Desjardins.

Depuis la deuxième moitié de 2011, la croissance économique est de moins de 1% au Québec, comparativement à plus de 2% pour l'ensemble du Canada. En particulier, le niveau des ventes au détail a reculé au cours du premier semestre de 2012, entre autres en raison de la hausse de la TVQ. «L'économie avance à pas de tortue. C'est une quasi-stagnation», explique Hélène Bégin, également économiste chez Desjardins.

Selon M. Durocher, le Québec pourrait imposer des réductions budgétaires comme des hausses d'impôt. Il pourrait aussi faire comme le gouvernement fédéral et reporter d'un an l'équilibre budgétaire.

Pour l'année financière en cours, qui se terminera le 31 mars 2013, le gouvernement du Québec table sur un déficit de 1,5 milliard. Le déficit zéro serait atteint l'année suivante, en 2013-2014, selon les prévisions actuelles.

Cette semaine, le gouvernement fédéral a annoncé que l'équilibre de son budget est reporté d'un an, soit en 2016-2017. Pour l'année financière en cours, le déficit fédéral atteindra 26 milliards, soit 5 milliards de plus que prévu.

Malgré le contexte difficile, le Québec a certains atouts dans son jeu. Au début de 2013, il recevra 733 millions de dollars du gouvernement fédéral pour l'harmonisation de la TVQ avec la TPS. Une même somme sera versée pour chacune des deux années suivantes.

Autre baume: quelque 114 000 emplois ont été créés au Québec depuis décembre 2011, ce qui devrait avoir un effet bénéfique sur l'économie et, conséquemment, sur les rentrées fiscales du gouvernement, croit Hélène Bégin.

L'Ontario vit une situation autrement plus difficile. Certes, la croissance économique est plus forte et devrait atteindre 2,2% en 2012, estime Mme Bégin. Toutefois, le gouvernement ontarien vogue vers un déficit de 14,8 milliards.

Ce déficit est l'équivalent de 2,2% de la taille de l'économie ontarienne, mesurée avec le produit intérieur brut (PIB). En comparaison, le déficit prévu au Québec, de 1,5 milliard, équivaudrait à 0,4% de notre PIB, estime Desjardins.