Pour avoir tronqué la vérité devant la Cour du Québec dans le but de faire sortir son fils cadet de prison, Guy Lafleur écope d'une «sentence suspendue» d'un an, et doit faire un don de 10 000$ à la Fondation Dollard-Cormier, une ressource pour gens aux prises avec des problèmes de drogue et d'alcool.

C'est la peine que lui a infligée le juge Claude Parent, hier après-midi, au palais de justice de Montréal. Assis entre ses deux avocats, le célèbre numéro 10 du Canadien a accueilli la décision sans broncher. Sa femme, Lise, se trouvait dans la première rangée de la salle avec des proches. Une «sentence suspendue» est en quelque sorte une probation au cours de laquelle la personne doit «garder la paix, avoir une bonne conduite et se présenter au tribunal lorsque requis». Elle n'entraîne aucune peine de prison, mais agit comme une épée de Damoclès.

La procureure de la Couronne, Lori Weitzman, demandait une peine de moins de deux ans à purger dans la collectivité, alors que Me Jean-Pierre Rancourt suggérait une amende pour son client. L'absolution, même conditionnelle, n'était pas possible, vu que M. Lafleur a été déclaré coupable d'avoir livré des témoignages contradictoires, une accusation voisine du parjure passible d'un maximum de 14 ans de prison.

M. Lafleur en appelle déjà du verdict de culpabilité. Il est représenté par Me Gilles Ouimet pour cette procédure. Aussi, M. Lafleur a intenté une poursuite civile de plus de 3 millions de dollars contre le Procureur général du Québec.

Après l'audience, M. Lafleur s'est entretenu avec ses avocats dans un petit local, puis s'est dirigé vers les greffes pour aller signer les documents d'usage. Le teint basané et vêtu d'un chic complet bleu avec chemise blanche et cravate rouge, il était escorté par plusieurs constables spéciaux qui empêchaient les journalistes de s'approcher de lui. Il y avait une foule impressionnante de journalistes et de caméramans. Il s'est refusé à tout commentaire. Son avocat, Jean-Pierre Rancourt, a parlé aux journalistes simplement pour leur dire qu'il ne ferait pas de commentaire lui non plus, vu que la cause est en appel.

Dormir à l'hôtel

Rappelons que les incidents dans cette affaire sont survenus le 19 septembre 2007. M. Lafleur témoignait alors dans le cadre d'une enquête sous cautionnement de son fils Mark. Ce dernier était en attente de procès pour différents incidents survenus avec une petite amie. En raison de son comportement problématique, le jeune Lafleur venait de se faire expulser de L'Exode, une ressource en réinsertion sociale.

Devant le juge Robert Sansfaçon, Guy Lafleur se disait alors prêt à prendre son fils Mark sous son aile, s'il était libéré de prison. Il soutenait que son fils s'était amélioré dans les mois précédents, et qu'il avait toujours respecté les conditions de son couvre-feu lorsqu'il était venu passer les fins de semaine à la maison familiale, avec la permission de L'Exode. Environ trois semaines plus tard, devant un autre juge, M. Lafleur était cependant contraint d'admettre que Mark n'avait pas toujours dormi à la maison les fins de semaine. Avec sa nouvelle petite amie, il était allé coucher à l'hôtel à quelques reprises, avec l'accord de M. Lafleur.

En rendant sa décision, hier, le juge Parent a indiqué qu'il n'y avait pas de circonstances aggravantes dans le cas de M. Lafleur. Il a agi pour ravoir son fils. «Ça ne l'excuse d'aucune façon, mais c'est une circonstance atténuante», a conclu le juge.

Comme M. Lafleur en appelle de sa condamnation, il pourrait demander à la Cour d'appel de suspendre la peine qui lui a été imposée hier, en attendant qu'une décision soit rendue.