Québec s'en remet entièrement à Ottawa pour sauver une Montréalaise qui croupit depuis plus de trois semaines dans une prison iranienne.

La professeure irano-canadienne Homa Hoodfar, de l'Université Concordia, est détenue depuis le 6 juin à la prison d'Evin, à Téhéran, sans pouvoir avoir accès à un avocat, et sans que l'on connaisse les accusations qui pèsent contre elle. Les autorités iraniennes la soupçonnent d'être mêlée à des affaires liées au féminisme et qui pourraient compromettre la sécurité.

L'opposition péquiste à Québec a dénoncé l'inaction du gouvernement Couillard, mais la ministre des Relations internationales, Christine St-Pierre, préfère d'abord miser sur l'action diplomatique du fédéral menée par son homologue, Stéphane Dion.

«Je fais confiance à mon homologue, M. Dion, pour continuer de faire les efforts et les pressions sur le gouvernement iranien», a-t-elle déclaré à la sortie de la séance du conseil des ministres, mercredi après-midi, à Québec. Les autorités canadiennes font tout en leur pouvoir pour faire libérer cette ressortissante d'origine iranienne, a-t-elle poursuivi.

Mme St-Pierre n'est pas entrée en contact avec la famille de Mme Hoodfar à Montréal, mais a indiqué que M. Dion l'avait fait. Le député de Québec solidaire Amir Khadir, lui-même d'origine iranienne, a également contacté les proches de cette professeure de sociologie pour tenter de faire avancer les démarches en vue de sa libération.

La ministre dit avoir des inquiétudes quant aux conditions de détention de Mme Hoodfar. Elle est incarcérée dans un établissement dont la réputation est sinistre: c'est là où la photographe canadienne d'origine iranienne Zahra Kazemi a été enfermée et torturée à mort en 2003.

«L'affaire Kazemi) était une situation très malheureuse, qui a été médiatisée énormément, et il faut s'assurer que cette femme (Mme Hoodfar) ne soit pas dans cette même condition», a déclaré Mme St-Pierre.

Néanmoins, Mme St-Pierre a affirmé qu'elle attendait de voir «comment la situation allait évoluer» avant d'entreprendre d'autres démarches. La ministre a assuré qu'elle allait essayer de déployer tous les moyens pour convaincre les autorités iraniennes que Mme Hoodfar devait revenir au pays, à l'instar de ce qui a été fait en faveur du blogueur saoudien Raif Badawi.

À titre de comparaison, le gouvernement Couillard a plaidé vigoureusement en faveur de la libération de Raif Badawi, dont la conjointe et les enfants vivent à Sherbrooke. Il a été arrêté pour avoir osé critiquer le régime wahhabite le 17 juin 2012, il y a donc maintenant quatre ans. Il a été condamné à 10 ans de prison et 1000 coups de fouet. La peine a été suspendue, mais il demeure détenu.

Un porte-parole du ministre des Affaires étrangères Stéphane Dion a affirmé que le gouvernement fédéral est engagé activement dans le dossier de Mme Hoodfar et qu'il fait ce qu'il peut pour lui venir en aide. Amnistie internationale avait déjà demandé aux autorités iraniennes de libérer Mme Hoodfar.

Mme St-Pierre a rappelé que l'Assemblée nationale avait adopté à l'unanimité une motion qui allait dans le même sens. La motion a été transmise à l'ambassade d'Iran et au Parlement iranien.

Toutefois, «l'important, c'est que le gouvernement fédéral continue ses efforts», a-t-elle estimé.

Homa Hoodfar est née en Iran, mais vit à Montréal depuis 30 ans. Cette professeure de sociologie s'est envolée vers la République islamique en février pour aller visiter sa famille et faire de la recherche à la bibliothèque parlementaire de Téhéran.

Elle a été arrêtée en mars, s'est fait confisquer son passeport et son ordinateur, puis a été incarcérée le 6 juin.

Selon les renseignements diffusés par sa famille, le procureur de Téhéran a annoncé qu'elle faisait l'objet d'une enquête pour des activités à caractère féministe et d'autres activités qui auraient compromis la sécurité du pays. Des articles suggéreraient même qu'elle aurait tenté de fomenter une «révolution tranquille féministe» en Iran.

La nièce de Mme Hoodfar, Amanda Ghahremani, a affirmé que la famille ignorait si Mme Hoodfar était accusée d'un crime.