Les municipalités du Québec se réunissent dans un contexte d'espoir, mais aussi d'inquiétude, à compter de jeudi, alors que les négociations viennent de débuter avec le gouvernement Couillard pour conclure un nouveau pacte fiscal pour les prochaines années. Et les régions sont encore secouées par les dernières compressions budgétaires.

Au cours d'une entrevue avec La Presse Canadienne, la présidente de l'Union des municipalités du Québec, Suzanne Roy, a parlé d'assises «assez costaudes» qui se tiendront du 21 au 23 mai à Montréal et réuniront 1500 délégués.

Elle a rappelé que de nombreux dossiers suscitent un intérêt soutenu de ses membres, tant face au gouvernement fédéral que provincial: voies ferrées, pipelines, antennes de télécommunications, Postes Canada, investissements gouvernementaux dans les infrastructures, pacte fiscal Québec-municipalités, allègement réglementaire, gestion des matières résiduelles, reconnaissance des municipalités comme un véritable gouvernement de proximité, reddition de comptes. La liste est longue.

«On est vraiment à la croisée des chemins avec le monde municipal», a commenté Mme Roy, elle-même mairesse de Sainte-Julie.

D'ailleurs, nombreux seront les dirigeants politiques à venir courtiser les maires: le premier ministre Philippe Couillard, le ministre des Affaires municipales, Pierre Moreau, le chef de la Coalition avenir Québec, François Legault, le chef du Parti québécois, le ministre fédéral de l'Infrastructure et des Collectivités, Denis Lebel, et le chef du Nouveau Parti démocratique, Thomas Mulcair.

Mardi dernier, le ministre Moreau a prévenu que le prochain pacte fiscal Québec-municipalités devra «épargner les contribuables et réduire de façon importante les dépenses» des municipalités.

Ses déclarations faisaient suite à la publication d'une étude du Centre sur la prospérité et la productivité de HEC Montréal qui démontrait que les dépenses des villes avaient augmenté deux fois plus vite que l'inflation de 2009 à 2013.

Aux municipalités qui, depuis des années, réclament de nouvelles sources de revenus, le ministre Moreau a répondu qu'elles devraient également s'attaquer à la colonne des dépenses.

Or, une bonne partie de ces dépenses provient de la masse salariale des employés des villes. Et ces employés viennent d'affronter le gouvernement du Québec sur sa loi qui a imposé un partage des coûts moitié-moitié des régimes de retraite dans le milieu municipal.

La présidente de l'UMQ croit que la durée de ce futur pacte fiscal, qui débutera en 2016, dépendra de ce qu'il contiendra. «Les échéanciers sont très courts en termes de pacte fiscal» car les municipalités doivent commencer à préparer leur budget dès le mois de septembre, indique-t-elle.

«Ça va être l'été des négociations» pour les municipalités, a résumé Mme Roy.

Au ministre qui juge trop élevée la croissance des dépenses des municipalités, Mme Roy réplique qu'«il faut toujours aller voir c'est quoi la cause des dépenses».

«Ce qui est important quand on parle de la hausse des dépenses, c'est: 1- il faut avoir les outils qui touchent la rémunération; et 2- à chaque fois que le gouvernement prend des décisions, c'est nous qui payons en bout de ligne», réplique-t-elle au ministre Moreau.

Elle cite un exemple de ce qui cause une croissance des dépenses dans les municipalités: la politique de gestion des matières résiduelles. «Québec vote une politique sur les matières résiduelles; il se tourne et dit aux municipalités voici votre objectif: en 2020, enfouissement zéro. Alors ça, ce sont des dépenses directes pour les municipalités. Et la TVQ que l'on paie, c'est 500 millions $ de dépenses», ajoute-t-elle. De même, les normes environnementales qui ont été resserrées par Québec depuis quelques années ont fait croître les coûts dans les municipalités, objecte-t-elle.

Pour ce qui est de la rémunération, «on a besoin d'outils», plaide Mme Roy. Le processus actuel, basé sur l'arbitrage, lui-même fondé sur «l'équité externe», a pour effet de créer une spirale de croissance en suivant la municipalité qui paie le mieux. «On hausse les salaires et ça s'applique à tout le monde. C'est un tiers qui prend la décision pour les municipalités», critique Mme Roy.

La présidente de l'UMQ n'a pas voulu dire s'il fallait mettre fin à l'arbitrage, en modifier les conditions ou réclamer le droit au lock-out pour les administrations municipales. «En tout cas, il faut revoir les façons de faire. Tout peut être sur la table», opine-t-elle.

L'UMQ s'invite «au party de l'élection fédérale»



Le gouvernement fédéral ne sera pas oublié par les municipalités du Québec.

«On est à la veille des élections fédérales et, cette année, l'Union des municipalités a décidé de s'inviter au party de l'élection fédérale», a prévenu Mme Roy.

«Pour nous, c'est extrêmement important de dire haut et fort qu'il ne peut pas y avoir de programmes tripartites si c'est deux parties qui décident des priorités. Si c'est tripartite, les trois parties doivent décider aussi des priorités. Et il doit y avoir, au niveau du fédéral, plus d'argent investi dans les infrastructures», a plaidé la présidente de l'UMQ.

Le plan Chantiers Canada s'est vu accorder une somme de 5,35 milliards $ par année, en moyenne, pour les infrastructures provinciales et municipales de tout le pays, lors du dernier budget du ministre des Finances, Joe Oliver. De même, un Fonds pour le transport en commun a été institué, doté de 750 millions $ sur deux ans, puis 1 milliard $ par la suite, mais à compter de 2017-2018 seulement. Ce fonds doit permettre la construction de nouvelles infrastructures de transport en commun visant à réduire la congestion routière, mais dans les grandes villes.

Mme Roy rappelle que bien des dossiers gérés par le gouvernement fédéral intéressent les municipalités: antennes de télécommunications, tracé des pipelines, tracé des voies ferrées et des produits qui y sont transportés, fin de la livraison du courrier à domicile par Postes Canada et autres. «Nous allons interpeller les chefs de partis tout au long de la campagne fédérale», a-t-elle prévenu.