Le ministre de la Santé, Gaétan Barrette, a accusé un de ses illustres prédécesseurs, Claude Castonguay, de dire des «foutaises», mercredi, en associant le comportement du ministre Yves Bolduc aux malversations exposées devant la Commission Charbonneau.

M. Barrette s'est porté une nouvelle fois à la défense de M. Bolduc, qui a reconnu, mardi, qu'il devra rembourser une partie d'une prime de 215 000 $, reçue à titre de médecin de famille, parce qu'il n'a pas respecté la durée de prise en charge minimale pour certains patients.

Avant de se rendre à une réunion du conseil des ministres, M. Barrette, un ancien radiologiste, a tiré à boulets rouges sur M. Castonguay, qui a réclamé la démission de M. Bolduc, ainsi que sur le chef de la Coalition avenir Québec (CAQ), François Legault, et un de ses députés, Éric Caire.

«Tous ceux, jusqu'à Claude Castonguay, qui disent que c'est impossible de faire les deux - qualifiez-le, Yves Bolduc, de "workaholic ", je vais vous dire, c'est vrai - mais ne lui reprochez pas d'avoir travaillé au-dessus de la norme, a-t-il dit aux journalistes. Parce que si vous lui reprochez ça, vous me le reprochez à moi aussi parce que dans ma vie, je l'ai déjà faite, cette charge de travail.»

Après avoir accusé les deux caquistes de dire des «foutaises», M. Barrette a repris le même terme pour s'en prendre à M. Castonguay, un ancien ministre libéral de la Santé, à l'origine du régime public d'assurance maladie, qui a exigé la démission de M. Bolduc.

«C'est de la foutaise totale», a-t-il dit.

M. Barrette a accusé son prédécesseur d'avoir fait preuve de malhonnêteté intellectuelle en établissant un parallèle entre les malversations exposées par la Commission Charbonneau sur la construction et le comportement de M. Bolduc.

«C'est un scandale, a-t-il dit. Un individu de la stature de Claude Castonguay qui fait ce parallèle-là, c'est de la malhonnêteté intellectuelle pure. S'il n'est pas capable de prendre sa retraite, Claude Castonguay, quelqu'un devrait peut-être lui dire de la prendre.»

Lors d'un entretien téléphonique, par la suite, M. Castonguay a refusé d'engager le débat avec M. Barrette.

«Je ne veux pas engager de discussion avec le docteur Barrette. Tout ce que j'ai à dire, c'est que c'est un grossier personnage avec lequel il n'est pas possible d'engager un dialogue civil», a-t-il dit.

Dans une entrevue à la radio de CBC, à laquelle M. Barrette a fait référence mercredi, M. Castonguay affirme que les électeurs espéraient que l'élection des libéraux mettrait un terme aux malversations exposées devant la commission d'enquête présidée par la juge France Charbonneau.

«La Commission Charbonneau a permis de constater que des personnes ont comploté pour tenter de tirer le maximum du système public, a-t-il dit en anglais. Les gens ont voté pour les libéraux en pensant que ce serait terminé, ces choses, ces complots et petites combines. Et il semble que ce soit possible, non seulement pour des membres honoraires de l'Assemblée nationale, mais pour un ministre de l'un des plus importants portefeuilles.»

M. Barrette a soutenu que les propos de M. Castonguay constituent un dérapage.

«Dites-moi ce qui justifie que Claude Castonguay, dans une entrevue, fasse un parallèle entre la Commission Charbonneau et Yves Bolduc, a-t-il dit. C'est inacceptable d'un individu qui a déjà été lui-même ministre de la Santé.»

M. Barrette a également répondu aux critiques de François Legault et Éric Caire, pour qui M. Bolduc a négligé ses fonctions de député parce qu'il préférait augmenter sa rémunération par sa pratique médicale.

«Quand François Legault et Éric Caire disent que c'est impossible, c'est de la foutaise et que les deux prennent leur retraite, ils sont donc incapables d'occuper des postes ministériels», a-t-il dit.

M. Barrette a estimé qu'il est tout à fait possible d'assurer un suivi à temps partiel de 1500 patients, comme M. Bolduc l'a fait durant ses 19 mois dans l'opposition, tout en exerçant ses fonctions de député.

Selon le ministre, les médecins de sa génération et de celle de M. Bolduc ont mené des carrières au cours desquelles ils pouvaient prendre en charge 3000 patients.

«Des gens qui sont capables d'organiser leur vie d'une certaine manière peuvent le faire, a-t-il dit. La charge de travail qu'Yves Bolduc avait, ça peut être un équivalent à temps plein pour un jeune de 28 ans, mais pour quelqu'un de cette génération, c'est l'équivalent d'un temps partiel. Il existe des gens qui ont du plaisir à travailler et aujourd'hui, au Québec, on punit et on met au pilori quelqu'un qui a une capacité de travail qui est au-dessus de la moyenne.»

Lors d'un point de presse, M. Caire a été questionné sur le lien que M. Castonguay a établi entre la Commission Charbonneau et le comportement de M. Bolduc.

«Si vous me demandez: est-ce qu'Yves Bolduc a fait preuve de collusion ou de corruption? Je ne pense pas, a-t-il dit. Ce que je crois, c'est qu'Yves Bolduc a profité des failles du système pour se mettre de l'argent dans les poches. Ça, c'est ce que moi, je crois.»

Le chef intérimaire péquiste Stéphane Bédard a estimé que M. Bolduc a détourné des fonds, en acceptant des primes pour des patients qu'il devait prendre en charge pour une période plus longue que ce qu'il a assuré.

«Dans ce cas-ci, on est face à quelqu'un qui a abusé du système», a-t-il dit dans un entretien téléphonique.