Pour le Parti libéral de Philippe Couillard, les questions économiques et sociales passeront avant le débat constitutionnel. L'absence du Québec dans l'entente constitutionnelle de 1982 est une question importante, mais les libéraux devront en débattre entre eux avant d'arrêter la position du parti.

À l'entrée de sa première réunion avec ses députés, Philippe Couillard a soigneusement repoussé l'invitation de Pauline Marois et de plusieurs ministres péquistes d'avancer sur le terrain miné du débat constitutionnel. Il a indiqué que la signature par le Québec de l'entente constitutionnelle «ne fait pas de différence dans votre vie, ni dans la [sienne]», mais l'absence d'une province importante du Canada dans l'entente de 1982 est un «signe important pour le pays». Cette question doit être réglée, «mais cela doit se faire dans l'ordre», a insisté le nouveau chef du PLQ.

La veille, il n'avait pas voulu répondre quand on lui avait demandé si un nouveau référendum serait nécessaire pour ratifier une éventuelle entente avec Ottawa. «Est-ce que ça veut dire qu'il voudrait la faire entériner sans demander rien de plus? Je suis très étonnée. Ça ne correspond pas à la position traditionnelle du Parti libéral», a lancé mardi la première ministre Pauline Marois.

Bévue de Marois

Or, Mme Marois a elle-même mis le pied sur une mine, en spéculant à voix haute sur les conditions que son gouvernement jugerait acceptables pour adhérer à la Constitution. «Il faudrait peut-être la réécrire telle qu'elle reconnaissait à tout le moins un des deux peuples fondateurs, avec notre capacité d'intervenir en matière linguistique», a laissé tomber Mme Marois. Elle a bien vite repris son credo souverainiste. «Moi, je ne réécrirai pas la Constitution du Canada parce que ma formation politique ne veut pas signer la Constitution canadienne et ne veut pas l'adopter. Notre formation politique veut avoir sa propre Constitution», a-t-elle assuré.

Plus tôt, le ministre Bernard Drainville avait vite visé dans la porte laissée ouverte par Philippe Couillard, et avait accusé le nouveau chef de songer à faire adhérer le Québec à la Constitution par un simple décret gouvernemental. «C'est un mépris pour la démocratie. Il pourrait faire ça un vendredi à la fin de la journée, avant de partir pour une longue fin de semaine», avait ironisé M. Drainville.

Mardi, le chef libéral a opté pour la prudence. Les libéraux devront débattre à l'interne de cette question avant qu'une position soit arrêtée, a-t-il répliqué aux journalistes qui réclamaient des détails sur sa stratégie. Surtout, les questions économiques et les enjeux sociaux sont des questions «de première importance», des priorités par rapport à la Constitution.

Un débat à l'interne

Les questions d'identité sont importantes, mais «elles arrivent après les questions économiques et sociales. Elles préoccupent les Québécois et il n'est pas exact qu'un parti en soit propriétaire», a souligné M. Couillard. Les libéraux auront d'abord, à l'interne, leur débat sur l'identité du Québec, «son caractère spécifique et distinct».

Alexandre Cloutier, ministre des Affaires intergouvernementales, a taxé «d'improvisation» la démarche du chef libéral qui se lance dans «une grande conversation nationale» sans être capable de «dire ce qu'il revendique». Le PLQ a déjà formulé dans le passé des demandes constitutionnelles. Il y a eu les cinq conditions de l'accord du lac Meech, puis celles de l'accord de Charlottetown. «À quel prix est-il prêt à signer la Constitution?», a demandé M. Cloutier.