Chaque semaine, Nathalie Collard rencontre un acteur de l'actualité et lui pose 10 questions liées à la couverture dont il a été l'objet. La 11e question vient du public. Cette semaine, notre journaliste s'entretient avec Sylvain Gaudreault, ministre québécois des Affaires municipales et des Transports.

1) Les villes de Montréal et de Laval ont de nouveaux maires. Qu'est-ce que cela change pour vous?

Cela change la dynamique dans ces municipalités. Mais sur le fond des choses, la question de la confiance demeure toujours importante. Elle est à refaire, à reconstruire. L'arrivée de nouveaux maires peut changer les choses sur le plan du personnel politique, mais il reste que nous tous, élus municipaux et provinciaux, devrons rebâtir le lien de confiance avec les citoyens.

2) Il y avait peu de choses pour les villes et les transports en commun dans le budget de votre collègue Nicolas Marceau. Êtes-vous déçu?

Je ne suis pas du tout d'accord avec vous. Dans la section «transports» du discours du budget, l'élément le plus fort après les infrastructures, c'est l'augmentation de l'apport dans les transports collectifs. En ce qui concerne les municipalités, dans le plan budgétaire, il y a une section très importante portant sur le renouvellement du pacte fiscal avec les municipalités, dans lequel on accorde des leviers aux municipalités pour le financement des transports collectifs.

3) Les Montréalais se demandent quand est-ce que le métro sera prolongé. Avez-vous une réponse à leur donner?

On est en train de planifier tout ça. Je crois que d'ici à la fin de la décennie, on devrait être capable de rouler dans une nouvelle ligne bleue. C'est la première sur la liste.

4) Le chef de Projet Montréal, Richard Bergeron, a demandé qu'on revoie le projet de l'échangeur Turcot. Votre collègue Jean-François Lisée n'a pas fermé la porte. Qu'en dites-vous?

Trois choses: d'abord, ce qui m'importe, c'est la sécurité des usagers; ensuite, c'est la fluidité du transport; enfin, je ne veux pas faire un deuxième CHUM avec l'échangeur Turcot. Il ne faut pas reporter et reporter. En même temps, il faut qu'on trouve une façon de bonifier le projet afin d'atteindre une plus grande acceptabilité sociale. C'est dans cet univers qu'on navigue. Au cours des prochaines semaines, on va annoncer qu'on va de l'avant et on va expliquer de quelle manière. Je pense qu'on aura un échangeur pour 2018.

5) L'Union des municipalités du Québec a déposé son livre blanc hier. On y recommande de nouvelles sources de financement pour les villes, ainsi que davantage d'autonomie. Est-ce un mauvais moment pour formuler ces demandes, selon vous?

Je pense que c'est un bon moment sur le plan des principes. J'ai le mandat très clair et très important de la première ministre de déposer un projet de loi-cadre sur la décentralisation qui va concerner en premier lieu les municipalités. J'ai beaucoup de respect pour le monde municipal, je crois aux nouvelles sources de financement, mais cela ne signifie pas que je vais dire oui à tout ce que le livre blanc propose. Mais sur le plan des principes et des valeurs, on parle le même langage.

6) Un rapport préparé par SECOR et KPMG indique que plusieurs investissements ont été faits sans études préalables. Quel impact a ce rapport sur vos ministères?

La demande a été faite à tous les ministères de réviser leurs investissements. Les Affaires municipales et les Transports sont deux gros ministères en termes d'infrastructures et d'investissements dans les infrastructures. Nous espérons être en mesure de terminer le plus grand nombre possible de projets sans dépassements de coûts. On veut le faire rapidement. Mais, en même temps, il faut revoir un certain nombre de critères, surtout - et je l'ai déjà annoncé publiquement - en ce qui concerne les infrastructures qu'on appelle «de développement économique», qui comprennent plusieurs projets différents. Nous voulons revoir les critères d'attribution car, sous le régime libéral, ils étaient purement discrétionnaires et arbitraires. Je veux établir des critères transparents.

7) La commission Charbonneau va inévitablement s'intéresser à vos ministères. Ça vous fait peur?

Non. Je suis conscient de la responsabilité qui est la mienne. Je suis dans une dynamique et une culture de transparence et c'est ce que je vais continuer à faire. Si des éléments sortent sur le passé, sur les 10 ou 15 dernières années, on les traitera en conséquence et on s'assurera, avec les recommandations de la commission Charbonneau, de rectifier le tir.

8) On a dévoilé le contenu d'une note interne qui a circulé dans votre ministère et qui a toutes les allures d'une menace, à mots couverts, aux employés qui voudraient témoigner devant la commission Charbonneau. Qu'en pensez-vous?

Je pense qu'il faut d'abord retenir le message principal, qui dit qu'il faut collaborer aux enquêtes de la commission Charbonneau et que les employés seront accompagnés là-dedans. Mais si jamais il y a un manquement à l'éthique et à la déontologie, il faut aussi qu'il y ait des sanctions. Je pense que la lutte pour une plus grande transparence, pour l'éthique et la déontologie est non négociable, et c'est un message très clair qu'on a voulu envoyer. C'est cette culture qu'on veut implanter dans toutes les sphères du gouvernement.

9) Étiez-vous au courant de l'envoi de cette note?

Oui.

10) Cette semaine, une situation ridicule a été exposée avec cette histoire de poteau au beau milieu d'une route dans la petite municipalité de Cookshire-Eaton, près de Sherbrooke. Comment avez-vous réagi?

Neuf heures n'étaient pas sonnées que j'avais déjà envoyé aux fonctionnaires une note leur demandant si je devais y aller avec ma hache pour l'enlever. Le poteau a finalement été enlevé mardi après-midi. C'était télévisé, il y avait l'hélicoptère de TVA, c'était comme regarder Occupation double (rires). On ne fera pas de commission Charbonneau là-dessus, mais il faut qu'il y ait des messages qui se rendent, c'est une question de gros bon sens. Dans ce cas-ci, la compagnie ayant obtenu le contrat de réfection de la route du ministère des Transports va recevoir une évaluation de notre part.

TWITTER +1 de Samuel Collard @fromoutonblanc

Vous avez beaucoup de chats à fouetter... Comment trouvez-vous cela?

Depuis deux mois, il n'y a pas une journée où je ne vois pas la nécessaire convergence entre les affaires municipales et les transports. On ne peut pas imaginer l'aménagement des territoires et des villes au XXIe siècle sans penser au développement des transports, et vice versa. Loin d'être antinomiques, au contraire, ils sont très convergents. Je suis le premier ministre à cumuler les deux fonctions, c'est à moi de donner cette impulsion de convergence aux deux fonctions. Je savais que ça allait être très chargé, mais je suis cool là-dedans, je suis bien entouré.