Le premier ministre Jean Charest a refroidi les ardeurs des nationalistes catalans, lundi à Barcelone, en affirmant que les Québécois éprouvaient une «fatigue» à propos de la question nationale.

«Il y a chez nous, c'est mon constat, une fatigue du débat (national) comme tel», a-t-il déclaré en réponse à un journaliste catalan, reprenant des propos qu'il avait tenus plus tôt au quotidien La Vanguardia.

Selon lui, cette «lassitude» et «un désir de renouveau» expliquent en grande partie la déconfiture du Bloc québécois aux élections fédérales du 2 mai.

M. Charest a toutefois tenu à préciser qu'«il y a et il y aura toujours des Québécois qui croient que l'avenir du Québec est à l'extérieur du Canada en créant un pays indépendant».

Alors qu'il est en perte de vitesse au Québec, le mouvement indépendantiste gagne en popularité en Catalogne depuis un an. Les déclarations de Jean Charest, même si elles ne font que reprendre une analyse largement partagée au Québec, ont donc eu un certain retentissement à Barcelone. Depuis longtemps, la région espagnole semi-autonome voit dans le Québec une source d'inspiration dans ses efforts visant à accroître ses pouvoirs.

L'an dernier, le Tribunal constitutionnel d'Espagne a invalidé certains des statuts de la Catalogne, qui avaient été convenus entre Madrid et Barcelone, notamment en matière fiscale. La décision a ulcéré les Catalans, qui ont réagi en tenant une manifestation monstre à Barcelone. Depuis, l'appui à l'indépendance est passé d'une dizaine de points dans les sondages à plus de 30 pour cent.

Pendant la conférence de presse tenue lundi en compagnie du président catalan, Artur Mas, toutes les questions ont porté sur la question nationale. Au pouvoir depuis l'automne dernier, M. Mas se dit personnellement en faveur de l'indépendance de la Catalogne, mais le projet ne fait pas partie du programme de son parti.

Quand on lui a demandé en quoi il s'inspirait de l'expérience des souverainistes québécois, il n'a pas répondu clairement, se contentant de rappeler ses deux grands objectifs politiques: obtenir de Madrid un transfert de l'assiette fiscale -un privilège dont bénéficient déjà le Pays basque et la Navarre-, ainsi que le droit de tenir un référendum sur l'avenir de la Catalogne.

Interrogé par un journaliste, Jean Charest a refusé de se prononcer directement sur la situation catalane.

«Ce que vous vivez s'inscrit dans votre histoire, dans votre réalité, et c'est différent de ce que nous vivons au Québec, même si les rapprochements sont assez importants sur la langue et sur la culture», a-t-il dit, en rappelant que le Canada est l'une des fédérations les plus décentralisées au monde.

«Il existe, dans toute fédération, des tensions constantes entre le pouvoir central et le pouvoir des entités fédérées», a-t-il néanmoins admis.