Ottawa rétablit la couverture des soins de santé pour tous les réfugiés s'établissant au Canada, éliminant ainsi le système à géométrie variable mis en place par les conservateurs ces dernières années.

À compter du 1er avril, ceux qui cherchent refuge au pays auront tous accès aux mêmes soins, une mesure qui coûtera environ 5,9 millions de dollars par an.

L'année prochaine, certains soins de santé seront également élargis aux réfugiés sélectionnés avant qu'ils arrivent au Canada, comme l'examen médical préalable à l'arrivée et les vaccins. Cet autre aspect de la nouvelle mouture du programme fédéral de santé intérimaire s'élèvera à 5,6 millions à partir de 2017-2018.

« Cette réforme garantira que tous les réfugiés et demandeurs d'asile puissent bénéficier de services en fonction de leurs besoins en matière de santé », a fait valoir le ministre de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté, John McCallum, en point de presse jeudi.

Le gouvernement conservateur avait, dans un effort d'économie, substantiellement mis la hache dans le programme en 2012, espérant dégager ainsi 20 millions. Il distinguait notamment les réfugiés issus de pays considérés « sûrs » en restreignant encore davantage l'accès aux soins.

En 2014, la Cour fédérale a déclaré que cette réforme imposait un traitement « cruel et inusité » pour les réfugiés et leurs enfants, et mettait des vies en danger.

Le gouvernement conservateur a dû revenir sur certains aspects de sa réforme en créant notamment différentes catégories de réfugiés qui avaient des droits inégaux quant aux types de soins couverts. Lors de la dernière campagne électorale, les libéraux avaient promis d'éliminer ces différences et de rétablir le plein financement des soins de santé des réfugiés.

Selon la ministre de la Santé, Jane Philpott, même si les compressions des conservateurs visaient à faire des économies, cela s'avérait contre-productif, puisque la facture était simplement refilée aux provinces. D'autre part, puisqu'on ne faisait plus de suivi prénatal, par exemple, des cas problèmes qui auraient pu être diagnostiqués en amont s'empiraient, causant encore plus de frais pour l'État.

Qui plus est, cela créait un fardeau administratif très lourd, tant pour les réfugiés que pour les médecins, « au point où certains médecins ont simplement dû dire qu'il leur était impossible de continuer dans cette voie, et donc ne voulaient plus être impliqués dans les soins de santé des réfugiés », a ajouté la ministre Philpott.

Ottawa signale par ailleurs que l'argent dépensé pour le rétablissement de l'ancien système provient d'une enveloppe de 51 millions qui n'était pas complètement dépensée.

Comme son nom l'indique, ce programme de soins de santé est temporaire et prend fin lorsque le régime d'assurance maladie provincial prend le relais, ou dans le cas des demandeurs d'asile déboutés, lorsqu'ils quittent le pays.

L'annonce a fait plaisir aux groupes de défense des droits des réfugiés. Janet Dench, directrice du Conseil canadien pour les réfugiés, a rappelé que le gouvernement fédéral avait déjà rétabli l'accès aux soins de santé pour tous les réfugiés syriens à la fin de 2015, mais pas ceux provenant d'ailleurs. Le double standard créait « un malaise », selon elle.

Mais tout n'est pas rose. « De notre point de vue, la situation avant les compressions était loin d'être parfaite », a-t-elle ajouté. Certaines personnes filaient entre les mailles du filet, celles dont les demandes d'asile étaient jugées irrecevables parce qu'elles transigeaient par les États-Unis, par exemple. Elle croit également que davantage d'argent devrait être injecté pour la santé mentale.

Les partis d'opposition ont eux aussi plutôt bien accueilli l'initiative des troupes libérales. La néo-démocrate Hélène Laverdière juge toutefois que le gouvernement aurait pu agir plus vite. « Quand on fait un retour aux programmes antérieurs, ça ne prend pas des mois pour les remettre en place », a-t-elle argué.