Le ministre de la Défense nationale ne se formalise pas que le Canada ait été écarté d'une réunion ministérielle de certains membres de la coalition qui lutte contre le groupe armé État islamique.

Interrogé mardi en marge de la réunion du cabinet fédéral, au Nouveau-Brunswick, Harjit Sajjan a expliqué que la coalition tenait régulièrement de telles rencontres pour discuter des diverses menaces dans le monde. Le ministre n'a cependant pas expliqué pourquoi le Canada avait été tenu à l'écart de la réunion de mercredi à Paris.

Les ministres de la Défense de France, du Royaume-Uni, de l'Allemagne, de l'Italie, de l'Australie et des Pays-Bas rencontreront leur homologue américain, Ashton Carter, pour discuter de la lutte menée contre l'État islamique.

Le ministre Sajjan a expliqué mardi qu'il participera dans deux semaines à de telles rencontres à Bruxelles, siège de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN).

La rencontre de mercredi à Paris, a-t-il dit, n'est qu'une de ces nombreuses réunions entre membres de la coalition, qui ne se penchent pas seulement sur la situation actuelle en Syrie et en Irak mais aussi sur les menaces terroristes qui pèsent sur d'autres régions du monde.

Mais selon des sources au sein du ministère de la Défense et un analyste de ce secteur, cette «exclusion», si elle a pu choquer la susceptibilité de Canadiens, n'a peut-être rien à voir avec la décision du gouvernement libéral de retirer ses chasseurs bombardiers du Moyen-Orient.

L'OTAN et l'Union européenne sont confrontées à la présence accrue d'État islamique en Libye, et les Américains cherchent présentement des alliés au sein des milices locales, sans grand succès. Or, les pays invités à la réunion de mercredi ont tous un intérêt direct dans la géopolitique en Afrique du Nord, explique le diplomate à la retraite Eric Morse.

«Ça ne m'étonnerait pas du tout qu'il soit essentiellement question de la Libye (lors de cette réunion) à Paris, a-t-il estimé mardi. Mais notre politique étrangère est tellement indéterminée présentement que (nos alliés) ne croit pas sage ou utile de nous inviter pour nous demander éventuellement de faire partie d'une nouvelle initiative.»

Le ministre Sajjan a par ailleurs minimisé l'exclusion du Canada à la réunion de Paris en la qualifiant d'informelle. «Ces rencontres sont surtout destinées à faire le point sur ce qui se passe sur le terrain, et j'ai eu la chance de me rendre récemment dans la région afin d'obtenir un portrait de la situation et de parler aux commandants.»

Une porte-parole du département d'État américain a elle aussi parlé d'une rencontre informelle. «Il s'agit plutôt d'une réunion ponctuelle des ministres de la Défense», a-t-elle indiqué sous le couvert de l'anonymat.

L'opposition conservatrice a plutôt qualifié l'exclusion de rejet pur et simple du Canada. «Lorsque vous n'êtes pas un partenaire à part entière, vous n'êtes pas invités à la table, a estimé la chef intérimaire, Rona Ambrose. Les États-Unis et d'autres partenaires nous avaient demandé de se joindre à eux, et puis nous annonçons notre retrait des frappes aériennes, sans proposer de plan clair pour remplacer cette contribution.»

L'ex-diplomate Morse ne croit pas quant à lui qu'il s'agisse de représailles - après tout, dit-il, Washington tente par tous les moyens de garder le Canada au sein de sa coalition. «Ça peut sembler dur pour notre égo national mais (...) nous sommes souvent un bien petit joueur en matière de sécurité.»