L'ambassadeur du Canada aux États-Unis estime que les Américains doivent trouver une façon d'affranchir la politique du pouvoir grandissant de l'argent, une influence indue qui dessert les intérêts des deux pays, selon lui.

Gary Doer soutient que les Canadiens devront bien un jour mesurer l'ampleur de ce phénomène et élaborer de nouvelles stratégies afin de contrer le pouvoir immense de l'argent dans la politique américaine, notamment dans les activités de lobbyisme et lors des campagnes présidentielles.

Les partis politiques américains ont dépensé par exemple 2,3 milliards $ US en tout pendant la dernière campagne présidentielle, en 2012.

Au cours d'une allocution prononcée à Ottawa, mercredi midi, l'ambassadeur a encouragé les gens d'affaires, les universitaires et les Canadiens intéressés par les relations bilatérales à investir les cercles de leaders d'opinion aux États-Unis. «Les membres de ces groupes de réflexion seront au gouvernement bientôt, et ils constituent l'une des voies qui permettront de contourner le pouvoir omniprésent de l'argent - qu'il vienne des entreprises ou des individus», a estimé M. Doer.

Il a cité par exemple les millions de dollars qui ont été dépensés au fil des ans pour bloquer la construction d'un nouveau pont entre Detroit, au Michigan, et Windsor, en Ontario. Or, ce projet d'infrastructure est primordial pour les échanges commerciaux entre les deux pays, a-t-il dit. À cause de tout cet argent, Ottawa et les partisans du projet au Michigan n'ont pu soutirer un seul sou du Congrès américain, et c'est finalement le gouvernement canadien qui paiera tout seul la note, rappelle M. Doer.

L'ambassadeur croit aussi que comme le président Barack Obama souhaite laisser des traces tangibles de son passage à la Maison-Blanche, le temps serait peut-être propice pour l'élaboration d'une stratégie environnementale commune entre les deux pays, qui prévoirait notamment des politiques sévères en matière d'eau douce et des normes d'émissions de polluants pour les voitures.

M. Doer prévient par ailleurs que l'on devrait prendre très au sérieux la candidature de Donald Trump à l'investiture républicaine, car l'homme d'affaires recueillerait autour de 30 pour cent d'appuis, selon les sondages, et son discours trouve un écho certain auprès des militants du parti. Mais il admet que les primaires aux États-Unis se jouent dans les extrêmes, alors que la présidentielle se joue au centre de l'échiquier.

L'ambassadeur, dont le mandat à Washington doit prendre fin quelque part l'an prochain, estime que le nouveau gouvernement libéral devra d'ici là trouver la personne idéale pour le remplacer, alors que les républicains contrôlent le Congrès et que les démocrates dirigent la Maison-Blanche.

Évidemment, tout cela pourrait changer en novembre prochain lors de l'élection présidentielle, a reconnu le diplomate, qui a été pendant dix ans premier ministre néo-démocrate du Manitoba avant d'être nommé ambassadeur à Washington par Stephen Harper, en 2009.