La star de Hollywood Angelina Jolie a de nouveau fait couler beaucoup d'encre, la semaine dernière, quand elle a annoncé, dans une lettre publiée dans le New York Times, qu'on lui avait retiré les ovaires et les trompes de Fallope à titre préventif.

Des tests génétiques qu'elle avait subis avaient démontré qu'elle avait 50% de risque de souffrir d'un cancer des ovaires, cette même maladie qui a emporté sa mère, Marcheline Bertrand, à l'âge de 56 ans en 2007.

Ces mêmes tests l'avaient d'ailleurs convaincue de subir une double mastectomie préventive en 2013 puisqu'elle possédait aussi le gène BRCA1 défectueux, qui augmente dangereusement le risque d'avoir un cancer du sein.

Aux États-Unis, les personnes qui subissent de tels tests génétiques jouissent aussi d'une protection juridique contre la discrimination de la part de futurs employeurs ou des compagnies d'assurances. Mais ce genre de protection juridique n'existe toujours pas au Canada. Le Canada est d'ailleurs le seul pays du G7 à ne pas avoir de mesure pour lutter contre la discrimination génétique.

Le sénateur libéral indépendant James Cowan a bien tenté de corriger cette situation en présentant un projet de loi au Sénat il y a deux ans, mais son projet de loi S-201 a été complètement vidé de son sens par les sénateurs conservateurs récemment.

Résultat: le vide juridique persiste, malgré la promesse du gouvernement Harper, dans son discours du Trône d'octobre 2013, «d'empêcher les employeurs et les compagnies d'assurances de faire de la discrimination sur la base d'analyses génétiques». Les conservateurs avaient aussi fait une telle promesse aux élections fédérales de 2008.

Mais tout indique que rien ne pourra être fait à cet égard avant les prochaines élections du 19 octobre, malgré l'appel pressant de plusieurs médecins et chercheurs spécialisés dans le domaine de la génétique.

Le nombre de tests génétiques permettant de prédire les risques de cancers ou toute autre forme de maladie a explosé au cours des dernières années. Aujourd'hui, il existe 13 800 tests pour détecter quelque 4000 troubles de santé et 2600 gènes - une véritable révolution génétique.

Information privée

«Ce qui se passe est vraiment dommage, car il y a une véritable explosion de tests génétiques maintenant offerts, mais les gens qui souhaitent subir de tels tests n'ont pas de protection juridique contre la discrimination. Les tests qu'ils subissent peuvent être remis aux employeurs et aux compagnies d'assurances, s'ils l'exigent. Mais ils ne devraient pas avoir accès à cela, car cela doit être traité comme de l'information privée et confidentielle. À mon sens, il n'y a rien de plus personnel qu'un code génétique», a déclaré le sénateur Cowan à La Presse.

Depuis la première sortie d'Angela Jolie en 2013, le nombre de femmes dans le monde, y compris au Canada, ayant manifesté le désir de se renseigner au sujet du dépistage génétique «a monté en flèche», selon lui. Mais au Canada, plusieurs reculent une fois qu'elles apprennent que ces informations pourraient éventuellement se retrouver entre les mains d'un futur employeur ou d'une compagnie d'assurances.

La liste des maladies pour lesquelles il existe aujourd'hui un test génétique - le cancer de la prostate, le cancer du sein ou des ovaires, la maladie de Huntington, la SLA ou la fibrose kystique, par exemple - est très longue.

«Dans l'histoire de l'humanité, il est plutôt rare que la science fasse des découvertes qui projettent le monde dans une ère complètement nouvelle. Nous pouvons dire que c'est arrivé de notre vivant, avec la révolution génétique. [...] Mais l'absence de protection contre la discrimination génétique dissuade plusieurs Canadiens de tirer parti de ces avancées extraordinaires», déplore le sénateur James Cowan.

Dans les rangs conservateurs, on soutient que le projet de loi du sénateur aurait pour effet de réglementer le secteur de l'assurance, un domaine qui relève de la compétence des provinces.

Mais le sénateur rétorque que les provinces n'ont exprimé aucune critique quant à la portée de son projet de loi au cours des 22 derniers mois. «Toutes les provinces ont été informées de la teneur de mon projet de loi. Aucune d'entre elles ne s'est opposée à ce jour», a-t-il dit.