Le nouveau juge de la Cour suprême du Canada, Marc Nadon, ne travaillera pas tant que la contestation de sa nomination au plus haut tribunal du pays n'aura pas été entendue.

Un avocat de Toronto a lancé lundi des procédures pour faire annuler la nomination de M. Nadon, qui a été confirmé à son poste jeudi dernier par le premier ministre Stephen Harper.

M. Nadon était juge surnuméraire à la Cour fédérale d'appel au moment de sa nomination.

L'avocat qui a déposé la contestation, Rocco Galati, fait valoir que cette nomination est contraire notamment à la Loi sur la Cour suprême parce qu'un juge de la Cour fédérale ne peut accéder au plus haut tribunal du pays pour occuper l'une des trois places réservées aux juges québécois.

Ce que le gouvernement a fait est mal, estime Me Galati, qui dit amener cette cause en tant que citoyen et en tant que constitutionnaliste.

«Tous les citoyens ont le doit d'avoir une magistrature juste et indépendante», a dit Me Galati en entrevue.

Il dit avoir plaidé devant Marc Nadon à plusieurs reprises et n'avoir rien à lui reprocher comme juge.

Mais pour lui, les juges québécois qui remplissent l'une des trois places réservées doivent soit provenir de la Cour supérieure ou de la Cour d'appel du Québec, ou encore être avocats membres du Barreau du Québec depuis plus de 10 ans. Toutefois, selon Me Galati, si un candidat se qualifie parce qu'il est avocat depuis au moins 10 ans, il doit être un avocat - et non pas un juge qui siège sur une autre cour que celles visées.

«Quand vous êtes un juge qui siège depuis 20 ans, vous n'êtes pas un avocat», tranche-t-il. C'est l'un ou l'autre.

«S'ils peuvent faire cela avec le juge Nadon, ils peuvent nommer neuf juges de la Cour fédérale, qui n'ont pas été au Québec depuis 20 ou 30 ans. Qu'est-ce que cela fait à notre système fédéral?», se demande-t-il.

Le gouvernement avait requis une opinion juridique pour s'assurer qu'il était possible de nommer un magistrat d'une cour fédérale. L'ancien juge de la Cour suprême Ian Binnie avait ainsi indiqué que le juge Nadon pouvait être considéré car il est membre du Barreau québécois depuis bien plus que 10 ans.

Me Galati conteste cette opinion et demande plutôt qu'un renvoi formel soit fait à la Cour suprême sur cette question, ce qui serait la seule façon légitime de procéder, selon lui.

Il veut que la nomination du juge Nadon soit suspendue en attendant l'issue des procédures.

«Compte tenu de la contestation de sa nomination devant la Cour fédérale, le juge Marc Nadon a décidé de ne pas participer, pour le moment, aux affaires dont est saisie la Cour suprême du Canada», a annoncé le plus haut tribunal du pays dans un très court communiqué.

M. Nadon conservera son titre de juge et son salaire pendant la durée des procédures, a précisé un porte-parole de la Cour suprême.

Une porte-parole pour le ministre de la Justice, Peter MacKay, a défendu le choix du magistrat québécois.

«Le juge Nadon est qualifié et nous sommes certains qu'il servira la Cour avec distinction», a écrit Paloma Aguilar dans un courriel.

«Les experts en droit constitutionnel s'entendent à l'effet que la Loi sur la Cour suprême permet à un juge siégeant à la Cour fédérale d'être nommé à la Cour suprême du Canada - ce qui inclut l'opinion de l'ancien juge de la Cour suprême, Ian Binnie», a-t-elle ajouté.

Il s'agit déjà de la deuxième controverse autour de la nomination du juge Nadon.

En comité parlementaire portant sur sa mise en candidature, le juge avait déclaré avoir été repêché à l'âge de 14 ans par les Red Wings de Detroit, ce qui avait déclenché une tempête médiatique autour de la véracité de ses propos.

Il avait par la suite précisé ses paroles, indiquant qu'il n'avait pas été repêché au sens formel du terme, mais avait plutôt été approché pour «faire partie de l'organisation» de cette équipe de la Ligue nationale de hockey.