Un sénateur conservateur se prononce contre le projet de loi omnibus de son propre gouvernement en matière de justice.

Le sénateur québécois Pierre Claude Nolin affirme ne pas pouvoir appuyer l'imposant projet de loi C-10, principalement en raison d'une section portant sur la culture de la marijuana.

Le projet vient tout juste d'être accepté en deuxième lecture dans la Chambre haute, et sera étudié par les membres d'un comité sénatorial lorsque le Parlement reprendra ses travaux à la fin janvier.

M. Nolin a longtemps été en faveur de la fin de la prohibition contre le cannabis. Il était président d'un comité sénatorial en 2002 qui a suggéré de légaliser la substance.

Le projet de loi omnibus comprend neuf sections législatives distinctes, et impose plusieurs peines minimales pour un ensemble de nouveaux délits.

Cultiver de six à 200 plants de marijuana peut envoyer quelqu'un en prison pour un minimum de six mois, ou encore neuf mois si des circonstances aggravantes sont constatées, comme la culture de la marijuana à proximité d'enfants.

Des détracteurs ont souligné que les peines proposées étaient plus sévères que certaines peines minimales obligatoires pour des crimes à caractère sexuel envers des enfants.

«Les tribunaux et la police possèdent déjà les outils pour faire face aux problèmes majeurs de trafic et aux gangs», a déclaré M. Nolin lors du débat de deuxième lecture du projet de loi, vendredi.

«Ne débutez cependant pas le processus de modifier la Loi sur les stupéfiants, c'est une mauvaise idée. La prohibition est une mauvaise façon, cela ne fonctionne pas, et cela va créer plus de problèmes que quoi que ce soit d'autre.»

Le sénateur Nolin stipule qu'une bonne partie du million de Canadiens qui utilisent de la marijuana pour des raisons médicales et font pousser leurs propres plants devront se tourner vers des sources criminelles pour obtenir leur dose.

«Le projet de loi C-10 aura exactement l'effet inverse que celui désiré. D'ailleurs, les criminels sont déjà morts de rire en se rendant déposer leur argent car les amendements à la Loi sur les stupéfiants dans C-10 leur offriront un marché plus important», a ajouté le sénateur.

«Je suis malade, je veux atténuer ma douleur, et au lieu de faire pousser la marijuana moi-même, je vais l'acheter de l'ami d'un ami d'un ami. Est-ce ce que nous voulons? Moi, en tous cas, je ne veux pas ça.»

Le sénateur dit également être inquiété par l'impact sur les jeunes contrevenants. M. Nolin souligne qu'une majorité de gens âgés entre 12 et 17 ans ont essayé le cannabis, et que certains d'entre eux font pousser des plants sur les campus universitaires.

Pour M. Nolin, envoyer une jeune personne en prison pour six mois parce qu'elles ont été reconnues coupables d'un crime grave touchant la drogue et ont subi un procès dans un tribunal pour adultes n'est pas une bonne idée.

«Il y a seulement une solution, une solution à long terme. Faites disparaître la prohibition», a déclaré le sénateur sous les applaudissements du Sénat.

«Utilisez au moins une solution à court terme, c'est-à-dire de conserver le statu quo, de ne pas amender la Loi sur les stupéfiants. Cette loi n'est pas bonne, mais au moins, elle est là, et nous n'avons pas encore trouvé ce que nous allons faire à long terme, mais n'y touchez pas.»