Les problèmes des libéraux de Jean Charest au Québec commencent à créer des ennuis aux libéraux de Michael Ignatieff sur la scène fédérale.

Des sources libérales fédérales ont confié à La Presse au cours des derniers jours qu'ils commencent à se faire sermonner au Québec à cause des allégations de corruption et d'ingérence politique dans les nominations des juges, qui secouent le gouvernement Charest depuis quelques semaines.

Alors qu'ils croyaient s'être enfin remis du scandale des commandites qui a entraîné leur chute au Québec et permis aux conservateurs de Stephen Harper de prendre le pouvoir en 2006, les libéraux de Michael Ignatieff doivent maintenant expliquer à qui veut bien l'entendre qu'ils n'ont rien à voir avec ce qui se passe sur la scène provinciale.

«Les problèmes de Jean Charest commencent à nous affecter. On le voit bien sur le terrain. Cela nuit à la marque de commerce du Parti libéral. C'est dommage, car on avait remonté la pente après la difficile période du scandale des commandites», a confié une source libérale à Ottawa.

«Les gens ne font pas nécessairement la distinction entre les libéraux fédéraux et les libéraux provinciaux (...) Dans certains événements, il y en a qui te reprochent presque de travailler pour le parti ! C'est un peu déprimant», a ajouté une source libérale à Montréal.

Il y a deux semaines, un sondage publié dans le quotidien Le Devoir et réalisé par Léger Marketing révélait que le gouvernement Charest avait fracassé un record d'impopularité au Québec, le taux d'insatisfaction des Québécois atteignant 77%. Il s'agissait d'une hausse de 15 points de pourcentage du taux d'insatisfaction en deux mois, conséquence directe d'un budget impopulaire et des allégations de corruption dans l'industrie de la construction.

Selon ce même sondage, les libéraux de Jean Charest seraient renvoyés au purgatoire de l'opposition à l'Assemblée nationale si des élections avaient lieu aujourd'hui. Dans les intentions de vote, le Parti libéral du Québec ne récolte plus que 30% contre 40% au Parti québécois, 10% à l'ADQ, 9% à Québec Solidaire et 8% au Parti vert.

Sur la scène fédérale, les libéraux de Michael Ignatieff ont aussi vu leurs appuis dégringoler au Québec au cours des deux derniers mois, toujours selon le même sondage. Le Parti libéral du Canada n'obtient plus que 21% des intentions de vote, une chute de quatre points en un mois, et de six points depuis le début de l'année. Le Bloc québécois se maintient en tête avec 38% alors que le Parti conservateur et le NPD obtiennent tous les deux 17%.

Depuis qu'il est à la tête du Parti libéral du Canada, Michael Ignatieff a tenté de soigner ses relations avec les libéraux de Jean Charest afin d'accélérer la reconstruction de son parti au Québec et compter sur la puissante machine électorale des libéraux provinciaux durant la prochaine campagne. M. Ignatieff a même embauché un ancien ministre du gouvernement Charest, Jean-Marc Fournier, comme son principal conseiller pour le Québec. M. Fournier a conservé des liens étroits avec ses anciens collègues libéraux du Québec.

Politique nationale sur l'alimentation

Pour espérer remporter les prochaines élections fédérales, Michael Ignatieff doit donc se démarquer des conservateurs de Stephen Harper au pays et des libéraux de Jean Charest au Québec.

Le chef libéral a d'ailleurs annoncé une nouvelle mesure lundi qu'il compte mettre en oeuvre s'il prend le pouvoir aux prochaines élections. Après avoir promis de geler la réduction des impôts promise par le gouvernement Harper aux sociétés à partir du 1er janvier, de maintenir le registre des armes à feu pour les armes d'épaule que veulent abolir les conservateurs, d'effacer la dette étudiante des médecins et des infirmiers qui s'installent en milieu rural jusqu' à concurrence de 20 000 $, M. Ignatieff a promis lundi une nouvelle politique nationale sur l'alimentation.

Un gouvernement libéral investirait quelque 120 millions de dollars pour améliorer la sécurité alimentaire, faire la promotion de la saine alimentation, et viendrait en aide aux fermiers en encourageant les Canadiens à acheter des produits locaux.