Le chef du Nouveau Parti démocratique, Thomas Mulcair, a servi une mise en garde au gouvernement Marois lundi: si la Charte des valeurs québécoises s'écarte des recommandations de la Commission Bouchard-Taylor, le NPD entend s'y opposer farouchement.

En point de presse à Ottawa, M. Mulcair a pris soin de ne pas commenter directement le contenu du document, puisqu'il n'a pas encore été rendu public.

Mais le chef du parti, qui représente 57 des 75 circonscriptions fédérales au Québec, a rappelé qu'il avait lui-même fait une présentation à la Commission Bouchard-Taylor et qu'il était en accord avec les résultats et les recommandations des deux commissaires.

«S'il y a quoi que ce soit dans ce que Mme Marois proposera qui va à l'encontre de cela, pour nous ce sera une fin de non-recevoir et nous nous y opposerons fortement», a-t-il tranché.

M. Mulcair a souligné qu'il avait lui-même été «l'un des seuls anglophones du Québec à gravir les échelons de la fonction publique québécoise».

«Quand vous faites partie du 0,04% des anglophones dans la fonction publique du Québec, vous réalisez qu'il y a toujours du travail à faire», a-t-il ajouté.

Il s'est dit particulièrement préoccupé du risque que les femmes musulmanes deviennent des boucs émissaires dans le cadre de cette réforme. Certaines des informations qui ont coulé dans les médias la semaine dernière suggèrent que les signes religieux ostentatoires, comme le voile ou la kippa, seraient interdits chez les employés de l'État.

«Nous allons attendre de voir ce qui s'y trouve. Mais nos principes sont clairs, nous n'allons pas reculer et nous allons les exprimer très clairement», a réitéré le chef de l'Opposition officielle à la Chambre des communes, qui représente la circonscription montréalaise d'Outremont.

Le gouvernement du Québec doit présenter les grandes orientations du document en septembre, et un projet de loi dans les semaines suivantes.  

Mais même encore dans les cartons, la Charte soulève déjà la controverse, en particulier dans le reste du pays. L'ex-commissaire Charles Taylor a lui-même qualifié les mesures qui ont fait l'objet de fuites dans les médias d'«acte d'exclusion absolument terrible». «C'est quelque chose qu'on s'attendrait à voir dans la Russie de Poutine», a-t-il déclaré en entrevue à Radio-Canada.

Autres réactions fédérales

Les hauts gradés du Parti libéral du Canada et du gouvernement conservateur ont tous deux exprimé leurs préoccupations la semaine dernière.

Le premier ministre Stephen Harper a indiqué qu'il s'agissait d'un débat provincial, mais qu'à son avis il fallait inclure et non pas exclure les minorités culturelles.

«Les Canadiens croient que les libertés de conscience et de religion sont des valeurs universelles et nous espérons que ce sont des valeurs et des principes qui seront respectés», a renchéri Jason Kenney, l'un des ministres responsables du dossier du Multiculturalisme.

Le ministre Kenney a tracé un lien entre ces efforts de laïcisation de l'État québécois et les échecs du modèle communiste.

De passage à Québec, le chef libéral Justin Trudeau s'est dit inquiet et préoccupé: «On est en train, peut-être, de répondre à des besoins qui n'existent pas», a-t-il dit.