Fondateur de l'école d'art martial Ness Martial à Saint-Léonard et de l'organisme Ali et les princes de la rue, Ali Nestor est notre personnalité de la semaine.

Ali Nestor a 43 ans et un parcours qui ferait presque un bon roman.

Ce serait l'histoire d'un petit garçon né en Haïti, arrivé à Montréal à l'âge de 5 ans, élevé ensuite à Saint-Michel dans une famille de trois enfants dont les parents sont séparés. On y parlerait d'une arrivée difficile où une famille immigrée issue de la classe moyenne tombe au bas de l'échelle. Papa plongeur au Hilton. Maman à la manufacture. Puis il y aurait le début d'une passion pour les arts martiaux, née alors que Ali est encore tout jeune. « J'avais 8 ou 9 ans », explique-t-il en entrevue.

Ensuite, on feuilletterait la phase sombre du parcours de notre personnalité de la semaine. Des années dans la rue, dans des milieux criminels, les fameux gangs du nord de la ville où la mort fait partie de la vie. On y parlerait de ses deux séjours en centre jeunesse, puis d'une prise de conscience et d'une rencontre : la terrible réalisation que ses déboires minent la santé de sa mère adorée et l'arrivée d'un mentor dans sa vie, Michel Jetté, aujourd'hui disparu, mais qui sera un « intervenant marquant ».

C'est lui, cet éducateur spécialisé, explique Ali, qui l'a aidé à reprendre un chemin plus sûr, vers le sport, vers la paix et la sécurité, et qui l'a ensuite conseillé et appuyé dans sa mission d'aider les autres comme il avait été aidé.

Car Ali Nestor a fait carrière dans les sports martiaux, ça oui. Pensez championnats canadiens de boxe, titres et tutti quanti.

Mais sa vie, c'est aussi sa communauté, c'est l'école d'art martial Ness Martial à Saint-Léonard qu'il a fondée en 1997, où il encourage les jeunes à s'exprimer dans le ring plutôt que dans la rue. C'est aussi l'organisme Ali et les princes de la rue, lancé en 2001, voué à la lutte contre le décrochage scolaire au moyen de multiples activités, dont le programme L'école de la relève, formation sport-études où les jeunes peuvent à la fois continuer de suivre des études normales et faire des sports comme la boxe.

« On travaille avec des décrocheurs ou des jeunes à risque de 16 à 25 ans, depuis plus de 15 ans. »

- Ali Nestor

Mais la mission a évolué. Aujourd'hui, Ali et ses princes de la rue propose bien plus que de l'aide aux devoirs et autres parrainages. Lancé en 2010, le programme L'école de la relève est maintenant un établissement d'enseignement en bonne et due forme. Dans l'immeuble de Saint-Michel, le premier étage est consacré au sport et le second, au volet scolaire. La journée commence en classe, se poursuit côté sport, puis redevient scolaire.

C'est en juillet que l'organisme a été reconnu officiellement par le ministère de l'Éducation comme une école à part entière.

DE DÉCROCHEUR À CANDIDAT AUX ÉLECTIONS

Quand je lui demande si le programme marche bien, Ali Nestor est fier de parler de l'un de ses anciens, Mathieu Léonard, candidat de Projet Montréal aux prochaines élections ! Léonard, ex-décrocheur délinquant, s'est inscrit à 22 ans aux Princes de la rue et à L'école de la relève, où il a terminé son secondaire tout en faisant de la boxe. Aujourd'hui, non seulement il se lance en politique, mais il étudie à l'université. Au départ, il pensait faire son chemin comme indépendant. Mais Projet Montréal l'a recruté.

La semaine dernière, pour amasser des fonds pour L'école de la relève, notre personnalité de la semaine a organisé 12 rounds d'espoir pour les princes, un événement à la TOHU auquel ont participé 17 personnalités publiques, dont le premier ministre Justin Trudeau. (C'est Nestor qui avait entraîné le politicien pour son fameux combat contre le sénateur conservateur Patrick Brazeau en 2012.)

Tour à tour, des gens comme Mélanie Joly - oui, la ministre ! - ou Josélito Michaud sont descendus dans l'arène pour faire un round de boxe contre Nestor.

Certains jouaient aussi le rôle d'entraîneur, comme Trudeau, justement, ou le chanteur Dan Bigras, grand ami de Nestor avec qui il a fait un film, Le ring intérieur. Il y avait environ 800 personnes pour voir tout ça, raconte Ali. Un grand moment.

Photo Graham Hughes, La Presse canadienne

La ministre Mélanie Joly pendant son combat contre Ali Nestor dans le cadre d'un événement caritatif, le 23 août dernier

Ali Nestor en quelques choix

Son film préféré ? A Time to Kill, film tiré du roman de John Grisham, avec Samuel L. Jackson et Sandra Bullock.

Son livre préféré ? Moi, Christiane F., 13 ans, droguée, prostituée... de Christiane Felscherinow

La phrase qu'il préfère ? « La vie est un éternel cheminement et une quête vers ce qu'il y a de meilleur en soi. »

Son personnage historique préféré ? Martin Luther King

Son personnage contemporain préféré ? Barack Obama

Si vous deviez manifester, ce serait pour quelle cause et que serait-il écrit sur votre pancarte ? « Ma cause sera la paix et sur ma pancarte, j'écrirais : "Marchons vers la paix." »