(Ottawa) Le Mexique affirme que les demandes d’asile au Canada ont commencé à diminuer le mois dernier – une révélation qui survient dans un contexte de pression croissante sur Ottawa pour imposer de nouveau des visas aux citoyens mexicains.

Le ministère mexicain des Affaires étrangères a affirmé que la baisse du nombre de plaintes déposées en décembre est due à des « mesures conjointes » non définies prises par les deux pays.

Le ministre canadien de l’Immigration, Marc Miller, a répondu qu’il n’avait pas encore vu de preuves de ce déclin et est resté muet quant à savoir si l’un ou l’autre pays a modifié sa politique.

Les demandes d’asile en provenance du Mexique ont explosé ces dernières années, même si le taux de demandeurs mexicains obtenant réellement le statut de réfugié reste bien inférieur à celui des autres pays.

Cela s’explique en partie par la décision du gouvernement en 2016 de lever l’obligation de visa, permettant ainsi aux Mexicains de déposer plus facilement une demande d’asile au Canada.

Les conservateurs veulent que les libéraux annulent leur cette décision, arguant que ce changement a mené à des fraudes, à des abus et à des tensions sur le système d’asile.

Le ministère mexicain des Affaires étrangères a écrit jeudi soir dans un communiqué qu’il était important de préserver les avantages économiques d’une circulation aisée entre les deux pays.

Marc Miller a fait écho à ce point plus tôt cette semaine et a déclaré lundi que les deux pays étudiaient des options pour réduire le nombre de réclamations, ajoutant qu’il évitait de donner plus de détails pour éviter l’exploitation du système par des acteurs mal intentionnés.

Il n’a cependant pas confirmé jeudi si les politiques avaient changé à la suite de ces négociations diplomatiques.

« Toute action peut évidemment entraîner une réaction, a déclaré Miller. De toute évidence, il s’agit d’un sujet sensible. »

Miller a ajouté que « le Mexique n’est qu’une partie de l’histoire » de l’immigration irrégulière, et il a répété que de mauvais acteurs exploiteraient le système si Ottawa était totalement transparent avec les mesures qui le composent.

Lorsqu’on lui a demandé si les politiques avaient entraîné des changements dans le nombre de réclamations, Miller a répondu qu’il n’en avait pas encore vu.

L’administration Biden a averti que les trafiquants d’êtres humains liés aux cartels mexicains pouvaient exploiter le régime d’exemption de visa du Canada pour faciliter l’entrée de personnes aux États-Unis.

En effet, la frontière commune est en train de devenir un enjeu politique dans les deux pays, a déclaré David MacNaughton, qui a été ambassadeur du Canada à Washington pendant le premier mandat de Donald Trump à la présidence.

La frontière entre les États-Unis et le Mexique a longtemps été un élément central de la politique de Trump, et le sera probablement aussi pour celle du président Joe Biden alors qu’une revanche de leur bataille électorale de 2020 se dessine à l’horizon.

Cependant, les républicains au Congrès se sont efforcés d’intégrer la frontière entre les États-Unis et le Canada dans le débat sur l’immigration irrégulière au cours des derniers mois.

« De plus en plus, nous entendons des plaintes concernant la frontière nord » aux États-Unis, a fait remarquer David MacNaughton lors d’un webinaire organisé par l’Institut canadien des affaires mondiales.

« Ce n’est pas seulement un problème mexicain, c’est en fait le reflet, je pense, d’une sorte d’isolationnisme et de protectionnisme croissant aux États-Unis. » 

Le premier ministre du Québec, François Legault, a évoqué l’augmentation du nombre de demandeurs d’asile mexicains dans une lettre adressée la semaine dernière au premier ministre Justin Trudeau, avertissant que les services provinciaux offerts atteignaient un « point de rupture ».

La déclaration du Mexique a souligné que le Québec en particulier bénéficiait des échanges culturels, touristiques et scientifiques.

Le ministère affirme que le Mexique et le Canada sont d’accord sur la nécessité d’une « approche constructive et d’un dialogue global prenant en compte tous les facteurs » menant à l’immigration irrégulière.

Avec les informations de Laura Osman