Un sondage mené par Statistique Canada indique que 3,5 % des membres de la Force régulière des Forces armées canadiennes (FAC) ont été victimes d’agression sexuelle en 2022. Les femmes et les minorités sont davantage touchées.

1960

Après pondération, on estime qu’environ 1960 membres de la Force régulière, soit 3,5 % des quelque 56 000 militaires, ont été agressés sexuellement dans leur milieu de travail ou à l’extérieur de ce milieu lors d’évènements impliquant des collègues dans les 12 mois précédant le sondage. En incluant les membres de la Réserve, Statistique Canada a obtenu 23 000 réponses au cours du sondage tenu du 1er octobre 2022 au 26 janvier 2023.

Femmes et minorités

Les femmes sont nettement plus touchées que les hommes ; 7,5 % d’entre elles (640 cas/8533) contre 2,8 % d’hommes (1310 cas/46 785). Ces chiffres sont en hausse par rapport à ceux de sondages précédents. Dans la Force régulière, 34 % de femmes de la Force régulière affirment avoir subi au moins un comportement sexualisé ou discriminatoire. Chez les minorités et « populations plus vulnérables » pour reprendre un terme des FAC, 8,8 % des membres dont l’orientation sexuelle n’est pas l’hétérosexualité rapportent une agression ; suivent les jeunes de 25 à 29 ans (6,9 %) et les personnes avec une incapacité (5,9 %).

Peu signalés

Seulement 21 % des cas d’agression ont été signalés, par la victime ou un tiers. « On en conclut que l’environnement de travail est toujours affligé par les problèmes qu’ont identifiés mesdames Deschamps et Arbour », nous dit à ce sujet Stéfanie von Hlatky, professeure agrégée de science politique à l’Université Queen’s, à Kingston, et titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur le genre, la sécurité et les forces armées. Elle fait ici référence à un rapport sur l’inconduite sexuelle dans les FAC dévoilé en 2015. Par ailleurs, près de 66 % des membres ayant signalé une agression sexuelle à une personne en position d’autorité ont subi des conséquences négatives par la suite.

« Préoccupant, déplorable, extrêmement décevant »

Le sous-ministre de la Défense et plusieurs officiers de haut rang se disent « extrêmement préoccupés » par ces résultats et constatent que les femmes et les « populations plus vulnérables » sont « affectées de manière disproportionnée ». « Déplorable », « incompatible avec les valeurs » des FAC, une « prévalence extrêmement préoccupante » sont aussi des épithètes employées. On relève un point positif, à savoir que plus de personnes interviennent ou ont pris des mesures en étant témoins de « comportement inappropriés ». 

Dur pour le recrutement

Dans un échange de courriels avec La Presse, Stéfanie von Hlatky estime que « les résultats du sondage démontrent que les membres (des FAC) sont au courant des formations et des changements de politiques pour contrer l’inconduite sexuelle », mais que cela « n’apporte pas les résultats escomptés ». Elle relève par ailleurs que « les membres notent des améliorations dans la façon dont le harcèlement et les agressions sexuelles sont pris au sérieux », une bonne chose. Mais du même coup, elle note aussi que les trois quarts des femmes de Force régulière estiment que les FAC ont un problème d’inconduite sexuelle. « Donc, quand on parle de recruter plus de femmes dans les forces, l’argument de vente s’affaiblit », dit-elle.