Le policier de la Sûreté du Québec (SQ) Éric Deslauriers a-t-il agi en légitime défense lorsqu'il a tiré sur le jeune David Lacour, le 22 janvier 2014, comme le suggère la défense, ou a-t-il commis un homicide involontaire en déchargeant son arme à feu avec insouciance, comme le prétend la Couronne ?

C'est ce que la juge Joëlle Roy, de la Cour du Québec, aura à trancher au terme du procès du policier Deslauriers, qui s'est ouvert lundi à Saint-Jérôme. Pour l'heure, aucun témoin n'a encore été présenté. La juge a plutôt entendu une requête de la défense qui cherche à obtenir des détails sur le passé de la victime, qui avait 17 ans, au moment de sa mort.

Les faits sont survenus sur l'heure du midi, près de l'école Augustin-Norbert-Morin, à Sainte-Adèle, ce fameux jour de janvier. Éric Deslauriers aurait voulu intercepter le véhicule qu'il croyait volé. David Lacour, qui était au volant, aurait refusé d'obtempérer. Le jeune homme aurait été atteint au cou et au thorax.

La défense dira que le policier s'est défendu, car le jeune fonçait sur lui avec son véhicule. La Couronne a une autre version à présenter. « Ma preuve est à l'effet que le policier n'est pas devant le véhicule. Il est dans l'environnement, mais pas devant », a fait valoir la procureure de la Couronne, Julie Laborde, lundi.

PASSÉ TROUBLE

Certains détails du passé de David Lacour ont été révélés à la défense, comme le fait qu'il a volé de l'essence les 20 et 21 janvier 2014, soit l'avant-veille et la veille du jour fatidique. Il aurait été filmé par des caméras de surveillance. La Couronne refuse toutefois de révéler des détails sur le fait que l'ADN du jeune homme a été trouvé sur un mur d'un endroit où un homicide a été commis en 2012.

Tout ce qu'on a, c'est « sang, mur, lave, sèche », a plaidé l'avocat de la défense, François Dadour. « Pourquoi ne pas le dévoiler ? Était-il suspect, témoin ? », a demandé l'avocat, qui se dit confronté à une « situation hautement volatile ». 

« Je vois le rapport entre foncer sur quelqu'un en voiture et être connecté à un homicide. Ce n'est pas une partie de pêche », a dit François Dadour.

L'avocat voudrait aussi en savoir plus sur le fait qu'une gomme avec l'ADN de la victime aurait été trouvée sur les lieux d'une introduction par effraction en 2013, et qu'un mégot avec son ADN aurait été découvert sur les lieux d'un vol. Il est aussi question de l'état psychologique de la victime, et de sa possible toxicomanie. Au moment de sa mort, le métabolisme de David Lacour présentait des traces de cocaïne et de marijuana. « On voit une possible altération du jugement. L'accusé ne peut décrire comment cette information sera utile, puisqu'il ne la connaît pas », a fait valoir Me Dadour.

Me Julie Laborde s'oppose à cette divulgation. La mauvaise réputation de la victime, si c'est le cas, n'est, en principe, pas admise en preuve, et elle estime que la défense émet beaucoup d'hypothèses. Le policier Deslauriers ne savait pas à qui il avait affaire quand il a fait feu, donc, le passé de la victime ne peut l'avoir influencé. Et Me Laborde est d'avis que le fait que la victime ait pu avoir ou non une propension à voler « n'aidera pas la juge à évaluer si le comportement du policier accusé a été raisonnable ».

La juge Roy doit rendre sa décision aujourd'hui sur cette requête. Les témoins pourraient commencer à défiler plus tard dans la journée, aujourd'hui.

MEURTRE COMMIS PAR UN ADOLESCENT EN 2012

Selon nos informations, l'homicide en question serait celui qui a marqué l'année 2012 à Sainte-Adèle, soit celui du pharmacien et ex-conseiller municipal, Gary Quenneville.

L'homme de 60 ans a été tué dans son domicile, le 26 février 2012. Il s'était fait voler plusieurs fois chez lui, dans les mois précédents. Et la preuve a démontré qu'on lui avait aussi volé des biens, alors qu'il gisait mort dans la maison. Deux adolescents ont été accusés dans la foulée de cette affaire. Ils ont été assujettis à des peines pour adultes. Alexandre Dionne a plaidé coupable à une accusation de meurtre prémédité.

Il a avoué s'être rendu seul chez le sexagénaire pour le voler et possiblement le tuer, pendant que des amis le regardaient aller. L'autre, Maxime Bourdage, a plaidé coupable à des accusations de complot de meurtre et complicité après le fait. Ces deux jeunes habitaient dans un logement voisin du domicile de M. Quenneville.