Un mois avant sa mort, Emmanuelle Phaneuf a passé une semaine à Cuba avec une amie. Des photos et des vidéos prises lors de ce voyage ne seraient pas étrangères à l'état d'esprit dans lequel son ex-conjoint, François Tartamella, se trouvait lorsqu'il a tranché la gorge d'Emmanuelle Phaneuf et de la fille de cette dernière, âgée de 13 ans, en présence des deux jeunes fils du couple.

C'est du moins ce que la procureure de la Couronne, Me Sylvie Villeneuve, a suggéré mercredi à l'ouverture du procès de François Tartamella, 37 ans, accusé des meurtres au second degré d'Emmanuelle Phaneuf et de sa fille Laurie Phaneuf, survenus un matin de novembre 2011.

Selon la poursuite, le couple que formaient Emmanuelle Phaneuf et François Tartamella battait de l'aile depuis quelques mois. Ils se chicanaient souvent. La relation entre l'accusé et Laurie, issue d'une autre union, était aussi «difficile». Tous habitaient tous sous le même toit, dans un logement de la rue Beauharnois, à Longueuil. 

Du 3 au 10 octobre, Emmanuelle Phaneuf est allée à Cuba avec son amie Stéphanie et la mère de cette dernière. Les enfants sont restés au Québec : Laurie chez sa grand-mère, les garçons, âgés d'un an et de trois ans, avec leur père. «Le voyage (...) est un point tournant dans la relation», a dit Me Sylvie Villeneuve. Des photos et des vidéos du voyage auraient «provoqué des émotions» chez l'accusé. Était-ce de l'indifférence, du découragement, de la tristesse ou de la jalousie? Me Villeneuve a dit aux 12 membres du jury que leur tâche sera de le déterminer pendant le procès, présidé par le juge André Vincent.

Quoi qu'il en soit, la relation entre l'accusé et la victime ne s'est pas améliorée par la suite. Une semaine avant le drame, Emmanuelle Phaneuf a fait parvenir à l'accusé des papiers pour conclure leur séparation. Selon le ministère public, ils n'arrivaient pas à s'entendre sur la garde des enfants ni sur qui gardera le logement. Ils devaient se rendre en cour le 8 novembre.  

Ils ne s'y sont jamais rendus. Le matin du 4 novembre, à 6h15, un appel sans voix a été logé au 911. Lorsque les policiers sont arrivés sur les lieux, François Tartamella, les mains ensanglantées, leur aurait dit: «aidez-les, je les ai tués». La mort d'Emmanuelle Phaneuf et de Laurie, qui avait fêté ses 13 ans la veille, a été constatée sur les lieux. Elles auraient été poignardées à plusieurs reprises, notamment à la gorge. Les deux garçons du couple, qui n'étaient pas blessés, étaient en pleurs. 

François Tartamella acceptait mal la séparation, selon la mère de la victime, Manon Laflamme, qui a témoigné mercredi. Lorsqu'il a reçu par huissier les documents de séparation, il aurait appelé Mme Laflamme chez elle pour lui dire que «ça ne se passera pas comme ça», que sa famille avait de l'argent et qu'elle l'aiderait. 

Manon Laflamme a aussi parlé de la relation difficile entre l'accusée et Laurie. Elle a raconté qu'un soir qu'elle la gardait, Laurie lui aurait confié qu'elle n'aimait pas François Tartamella, qu'il était méchant avec elle et qu'elle se sauverait de la maison lorsqu'elle aurait 16 ans. 

Le couple avait aussi des ennuis financiers. À sa soeur Marie-Pierre, qui a aussi témoigné mercredi, Emmanuelle Phaneuf aurait dit que François Tartamella n'était pas d'accord avec l'idée qu'elle parte en voyage Cuba parce qu'ils n'en avaient pas les moyens. La victime aurait emprunté de l'argent à son père pour le réaliser.

La veille du drame, Emmanuelle Phaneuf aurait dit à sa soeur que son ex-conjoint devait quitter le foyer familial le weekend suivant. «Ça ne lui dérangeait pas qu'il reste», a dit Marie-Pierre Phaneuf, soulignant que sa soeur était «sereine» avec sa décision de se séparer.

Le procès reprend jeudi. L'accusé est représenté par Me Anne-Marie Lanctôt et Me Patrick Davis.