Parce qu'il est un «membre de haut niveau du crime organisé traditionnel italien» et qu'ils craignent qu'il reprenne du service et récidive avant la fin de sa sentence, les commissaires aux libérations conditionnelles imposent des conditions rarement vues à Francesco Del Balso.

Condamné à 15 ans en 2008 dans la foulée de l'opération Colisée, l'homme de 45 ans, considéré par la police comme un ancien capitaine du clan Rizzuto, obtiendra sa libération d'office dans les prochains jours, après avoir purgé les deux tiers de sa peine.

Ainsi, Del Balso devra rester en maison de transition jusqu'à ce que les commissaires décident qu'il peut retourner chez lui. 

Jusqu'à la fin de sa peine, en 2019, il ne pourra ni jouer, ni parier, ni fréquenter les casinos, et devra divulguer toutes ses transactions financières. Il devra occuper un emploi ou étudier à temps plein, ne pourra ni être un travailleur autonome, ni posséder sa propre entreprise, ni travailler pour un membre de sa famille. Il ne pourra se retrouver en situation d'autorité, rémunérée ou non, dans des décisions financières impliquant un simple citoyen, un organisme de charité, une entreprise ou une institution. 

Enfin, Del Balso ne pourra consommer aucune drogue, devra éviter toute personne qu'il croit posséder un casier judiciaire ou être liée à des activités criminelles, et ne pas fréquenter les établissements licenciés tels que les cafés de style européen. 

«Votre profil criminel indique clairement la présence de valeurs criminelles bien ancrées et un mépris des valeurs sociales», écrivent les commissaires dans une décision de huit pages rendue le 2 février.

Joueur important 

Durant l'enquête Colisée, qui s'est échelonnée de 2002 à 2006, Del Balso était responsable des paris en ligne de la mafia qui ont généré des profits de 27 millions en un an et demi, soit 1,5 million par mois, selon la preuve accumulée par les enquêteurs de l'Unité mixte d'enquête contre le crime organisé (UMECO) de la GRC. 

Il était également le patron de cellules d'importateurs qui ont corrompu des douanières et qui comptaient sur plusieurs complices employés de diverses compagnies à l'aéroport Montréal-Trudeau, par où entrait notamment la drogue. 

Officiellement commis dans le rayon des fruits et légumes dans un Intermarché, où les enquêteurs ne l'ont jamais vu travailler, Del Balso a flambé des centaines de milliers de dollars au Casino de Montréal et dans d'autres maisons de jeux du monde, durant les années qu'il a été suivi, lors de l'enquête Colisée. 

Durant ses premières années d'incarcération, le niveau de sécurité de Del Balso en établissement a été haussé à deux reprises, parce qu'il aurait été impliqué dans du trafic de drogue institutionnel, aurait recréé «une organisation similaire à un gang» pour contrôler une économie souterraine au pénitencier et aurait eu un comportement intimidant envers les agents correctionnels. En revanche, Del Balso a suivi un programme après 2010 et son comportement s'est passablement amélioré.

«La Commission est incapable de conclure que vous avez fait des changements fondamentaux à votre système de valeurs. Elle note que durant vos premières années d'incarcération, vous avez mis beaucoup d'efforts pour reproduire, en institution, le même genre de structure et de dynamique qui caractérisaient l'organisation dans laquelle vous avez été impliqué.» 

«Vous continuez à minimiser votre implication dans l'organisation et niez avoir commis des actes violents. Pour cette raison, et en raison de votre absence d'empathie relativement aux conséquences de vos actions et de celles de l'organisation à laquelle vous avez appartenu, la Commission se questionne si vos changements sont sincères ou s'ils sont un motif utilitaires», écrivent les commissaires.

Del Balso est détenu dans un pénitencier à sécurité minimum depuis janvier 2015 et a effectué plusieurs sorties sans escorte dans la communauté qui se sont bien déroulées. À sa libération, il dit vouloir compléter ses études secondaires et trouver un emploi.

Francesco Del Balso

• 45 ans

• Surnom : Chit

• Considéré par la police comme l'un des six principaux lieutenants de la mafia condamnés après l'opération Colisée. Faisait partie du groupe de Lorenzo Giordano, libéré dernièrement, et de Francesco Arcadi, dont la libération est imminente.

• 2001 : condamné à une peine de prison avec sursis pour possession d'arme et agression armée.

• 2008 : condamné à 15 ans de prison pour gangstérisme, complot pour importation de substances, trafic de stupéfiants, possession de biens criminellement obtenus et fraude envers le gouvernement, à la suite de son arrestation dans la rafle Colisée.

• C'est lui qui avait passé un coup de fil menaçant à l'entrepreneur de Québec, Martin Carrier, diffusé durant les travaux de la commission Charbonneau.