Québec solidaire «n'a de leçon d'indépendance à recevoir de personne», dit son co-porte-parole Amir Khadir.

Pour la deuxième fois de la campagne, M. Khadir a croisé l'autocar du Parti québécois. En visite lui aussi au congrès de l'Union des producteurs agricoles (UPA) à Lévis, il en profité pour réagir aux salves de Pauline Marois.

En interview mercredi dernier à Radio Centre-Ville (l'intégrale ici), M. Khadir a fait un clair appel aux fédéralistes: «Une fois qu'on a défini notre projet de société, est-ce qu'on a besoin de l'indépendance comme outil ou pas? Alors, vous voyez que, dans notre perspective, c'est l'indépendance si nécessaire, mais pas nécessairement...»

Pauline Marois a vite récupéré l'affaire. «M. Duceppe n'avait pas tort», a-t-elle dit, allusion à une récente charge de l'ancien chef du Bloc contre M. Khadir. Aux dernières élections fédérales, le député solidaire avait appuyé le NPD. M. Duceppe ne le lui a jamais pardonné. Il a affirmé il y a deux semaines que M. Khadir n'était pas un vrai souverainiste et qu'il ne le respectait pas.

Mme Marois n'avait alors pas adhéré à ces propos, mais elle a changé d'idée ce matin. «Ça fait un engagement assez tiède face à la souveraineté. Moi, je me poserais des questions, si j'étais un électeur souverainiste, avant d'aller voter pour une telle chose.»

Le chef d'Option nationale a aussi dénoncé M. Khadir. «Avec Québec solidaire, on constate que, comme avec le Parti québécois, nous sommes encore dans le domaine des peut-être», a déclaré Jean-Martin Aussant.

Courroucé, Amir Khadir a déclaré que, contrairement au Parti québécois, Québec solidaire s'est engagé à lancer, six mois après son élection, une assemblée constituante pour «se mettre en marche vers la souveraineté», a-t-il rappelé. «Mme Marois devrait prendre une résolution aussi engagée. Elle ne devrait pas tergiverser», a-t-il lancé. 

Alors pourquoi cette phrase ? Il explique que Québec solidaire veut accueillir les fédéralistes progressistes. Mme Marois a aussi courtisé cet électorat, sans jamais pour autant dire que la souveraineté n'est pas nécessaire.

M. Khadir dit qu'il invite les fédéralistes de gauche à se rallier à Québec solidaire pour promouvoir la «justice sociale». Ils pourront ensuite participer à l'assemblée constituante. Les membres de cette assemblée seraient élus. Ils devraient ensuite élaborer un projet de constitution et de statut politique pour le Québec. Le résultat serait soumis au peuple par référendum.

«On fait le pari que la partie de notre peuple qui veut un projet généreux, ouvert et porté vers l'avenir comme celui de Québec solidaire, on va les convaincre en temps utile que l'indépendance du Québec est parfaitement nécessaire», a-t-il expliqué.

Le scrutin du 4 septembre n'est pas une élection référendaire. Un vote pour Québec solidaire n'est donc pas «nécessairement» un vote pour la souveraineté, a-t-il résumé. Ce vote se ferait plus tard. «Si on peut déduire de ça que moi, je comprends que l'indépendance n'est pas nécessaire, c'est une erreur totale. Ça fait 10 ans que je le répète sur toutes les tribunes. Ce que je dis, c'est qu'il y a de la place dans cette démarche vers l'indépendance pour les gens qui ne sont pas convaincus, mais qui sont assez ouverts pour dire: on va faire le débat ensemble.»

Quelques fédéralistes avaient quitté son parti lorsque cette position avait été adoptée en 2009, a-t-il raconté.

Ce n'est pas le premier accrochage sur la souveraineté entre ces deux partis. L'hiver dernier, M. Khadir avait affirmé que le PQ ne ferait jamais la souveraineté.

Un «beau risque pour le peuple»

Est-ce une nouvelle forme du «beau risque»? a demandé un journaliste? «C'est un beau risque populaire. Tout risque qu'on prend avec notre peuple est un risque généreux pour l'avenir du Québec», a-t-il répondu.

«C'est un risque plus emballant pour le Québec que le beau risque qu'a pris René Lévesque en 1984 en s'associant avec des fédéralistes comme Brian Mulroney, a-t-il poursuivi. On prend un risque, celui d'inclure une plus grande partie de notre population et dire: on est confiant, nous sommes des indépendantistes. Nous croyons que notre velléité d'indépendance repose sur du solide et, en temps utile, on va convaincre ceux qui sont sincères et réfléchissent pour le bien commun.»

M. Khadir se dit inspiré par l'ancien député péquiste de Mercier, Gérald Godin, et le député le «plus progressiste» du premier gouvernement Lévesque, Pierre Marois.