Les quelque 9000 enseignants membres de l'Alliance des professeurs de Montréal sont prêts à faire la grève durant une journée, le 1er mai, même s'ils savent que cette grève sera illégale, en vertu du Code du travail.

La convention collective nationale des enseignants du primaire et du secondaire est en vigueur jusqu'au 31 mars 2020, comme l'ensemble des secteurs public et parapublic. C'est la Fédération autonome de l'enseignement (FAE), à laquelle est affiliée l'Alliance des professeurs de Montréal, qui l'a négociée avec le gouvernement du Québec.

La convention collective n'est donc pas échue. Or, les travailleurs ne peuvent pas débrayer lorsqu'une convention collective est encore en vigueur.

«C'est sûr qu'en vertu du Code du travail, actuellement, la grève est jugée illégale. Mais nous, on conteste ça. Pour nous, cette grève-là, elle est légale», a soutenu la présidente de l'Alliance des professeurs de Montréal, Catherine Renaud, au cours d'une conférence de presse vendredi.

Elle s'est dite non seulement consciente du contexte, mais aussi prête à mener la bataille juridique devant les tribunaux, le cas échéant. «Et si besoin est, nous allons emprunter les recours nécessaires pour faire valider», a-t-elle ajouté.

Elle a souligné que c'est en toute connaissance de cause que ses membres ont pris la décision de débrayer durant une journée, le 1er mai, lors d'une assemblée tenue jeudi soir.

Milliers de dollars d'amendes

«Quiconque déclare ou provoque une grève ou un lock-out contrairement aux dispositions du présent code, ou y participe, est passible pour chaque jour ou partie de jour pendant lequel cette grève ou lock-out existe, d'une amende», indique-t-on dans le Code du travail.

La vice-présidente de l'Alliance, Pascale Besner, a elle-même évoqué le montant des éventuelles amendes, qui ont été dévoilées aux membres lors de l'assemblée générale, soit 100 $ par membre qui participe à une grève illégale, 10 000 $ par dirigeant et 50 000 $ pour l'organisation.

Le syndicat veut argumenter qu'il existe une différence avec une grève illégale, puisqu'il s'agit de négociations locales avec la Commission scolaire de Montréal, et non d'une négociation nationale avec le gouvernement du Québec.

Les négociations locales font suite aux négociations nationales et visent, comme leur nom l'indique, à convenir d'arrangements locaux ou à discuter de matières locales. Et c'est là que le bât blesse avec l'employeur, la Commission scolaire de Montréal (CSDM).

Mme Renaud rapporte que ses membres ont été irrités par la volonté de la CSDM de donner une échéance au 30 avril pour conclure une entente, à défaut de quoi des membres, notamment à l'éducation des adultes, perdraient des droits. Elle affirme que les arrangements locaux qui avaient été négociés dans le passé «tomberont» à cette échéance s'il n'y a pas entente le 30 avril.

Parmi ces points en litige, on trouve un arrangement local au sujet de la semaine de relâche scolaire, par exemple, ou un arrangement local quant à une liste prioritaire qui permet aux enseignants à l'éducation des adultes à statut précaire de faire plus d'heures.

Parents outrés

La Fédération des comités de parents du Québec s'est dite «extrêmement préoccupée» par l'éventualité de cette «grève illégale».

«Les enseignants n'ayant pas le droit d'aller en grève pour négocier leur convention collective locale, il s'agit d'une grève illégale et d'une décision intolérable», a fait savoir la fédération, par voie de communiqué.

«Si rien n'est fait pour empêcher cette grève, près de 75 000 élèves seront en congé forcé, le 1er mai. Cette décision démontre un non-respect du contrat social et un mépris de la réussite des enfants», a ajouté la fédération.

Soutien de la FAE

La Fédération autonome de l'enseignement, à laquelle est affiliée l'Alliance des profs, dit la soutenir, malgré le contexte. Elle n'a d'ailleurs pas voulu commenter l'aspect de l'illégalité du débrayage.

«Le mandat de grève confié par l'assemblée générale des membres de l'Alliance à leurs représentants témoigne de la volonté des profs de se faire respecter par l'employeur, de soutenir leur équipe de négociation et d'en arriver à une entente négociée avec la CSDM. La FAE prendra tous les moyens pertinents pour soutenir le droit à la négociation des enseignants, qui sont représentés avec détermination et courage par leur syndicat local», a commenté Sylvain Mallette, président de la FAE.