Comme un ultime symbole illustrant la fin bien réelle de la mission canadienne à Kandahar, les soldats se sont affairés dès le lendemain du jour du Souvenir à démanteler le monument commémoratif érigé à la mémoire des Canadiens tués en Afghanistan depuis le début de la mission en 2002.

Dans un nuage de poussière et le boucan assourdissant des outils, les 158 noms et visages gravés dans la pierre noire ont été délicatement retirés du monument commémoratif sur lesquelles ils prenaient place et doucement déposés dans des boîtes.

Malgré leur physique imposant et leur habitude aux travaux difficiles, les soldats ont manipulé ces plaques avec un soin et une minutie hors du commun.

«C'est une expérience très profonde d'être responsable de démanteler un mémorial aussi grand que ça», a expliqué le lieutenant-colonel Mark Flint. Lui-même connaissait une trentaine des soldats morts au combat, à qui le cénotaphe rend hommage.

Les boîtes contenant les plaques noires, de même que la structure de ciment et de marbre sur laquelle elles étaient déposées, seront expédiées par avion à Ottawa dans environ une semaine. Le gouvernement fédéral a annoncé son intention de reconstruire le monument de façon permanente dans la capitale, mais il n'a pas encore déterminé de lieu précis. Si le cénotaphe n'arrive pas au Canada en bon état, on pourrait choisir d'en faire simplement la réplique exacte.

«Je pense que c'est symbolique, et c'est émouvant, aussi», a confié le Brigadier-général Chuck Lamarre, commandant de la Force opérationnelle de transition de mission (FOTM).

«Si on prend ce monument-là et on le ramène au Canada, c'est pour s'assurer justement que les Canadiens aient bien en tête le sacrifice, mais aussi le travail que leurs soldats ont fait ici», a-t-il noté.

Le cénotaphe comprend, en plus des noms des soldats, ceux de la journaliste Michelle Lang, d'un diplomate et d'un employé du secteur privé morts en sol afghan. Le nom du tout dernier soldat canadien décédé au pays il y a deux semaines, le caporal-chef Byron Greff, sera gravé prochainement.

Au centre du monument figure une imposante roche, qui ne sera pas envoyée au Canada, mais prendra plutôt le chemin de Kaboul, où environ 950 militaires canadiens participent à une mission d'entraînement des troupes afghanes jusqu'en 2014.

Elle revêt un aspect symbolique, puisque cette pierre aurait été utilisée par les talibans pour faire dévier de son chemin, vers une bombe artisanale, le véhicule des tout premiers soldats à avoir été tués en Afghanistan en 2003.

Dans l'éventualité où il y aurait d'autres décès au cours de la mission d'entraînement à Kaboul, le lieutenant-colonel Flint présume qu'un nouveau monument sera érigé, peut-être à nouveau autour de cette pierre. «Connaissant les gens à Kaboul, ils vont probablement faire le même genre de chose», a-t-il noté.

Opération de démantèlement

Le démantèlement du monument commémoratif n'est qu'un tout petit aspect du travail qui s'effectue toujours par les Canadiens à l'aérodrome de Kandahar. Environ un millier de militaires y travaillent activement depuis la fin officielle de la mission de combat en juillet dernier à défaire les installations afin d'en renvoyer une bonne partie au pays.

Une portion de l'équipement est expédiée à Kaboul, pour donner un coup de main à la mission d'entraînement, notamment des véhicules, des armes, des munitions et des équipements de protection.

Ce qui ne vaut pas la peine d'être rapatrié au Canada est vendu aux Américains demeurant sur la base, ou encore donné aux forces afghanes et aux organismes de charité locaux.

Si l'armée maintient le rythme qu'elle s'est imposée, le démantèlement devrait être terminé pour le 12 décembre de cette année.

«L'un des éléments clés est de se préparer pour une nouvelle mission, probablement pour aussi tôt que novembre 2012. C'est essentiellement le temps que nous avons estimé pour renvoyer l'équipement, le remettre en ordre et entraîner nos gens pour être capables de repartir à nouveau», a lancé le Brigadier-général Chuck Lamarre.

D'ici là, la base de l'OTAN à Kandahar se vide graduellement de ses Canadiens, avec une nouvelle vague de départ toutes les 48 heures.