Au lendemain d'une sortie publique de sinistrés des inondations historiques du printemps dernier, en Montérégie, qui ont dénoncé la lenteur du gouvernement à les indemniser, La Presse a visité deux ménages qui n'ont toujours pas reçu d'aide du gouvernement. Témoignages de citoyens en détresse.

Jean-Guy Gévry, 72 ans, revenait de chez le médecin, hier après-midi. «J'ai plusieurs problèmes de santé. Je n'ai plus assez d'oxygène dans le sang. J'ai des étourdissements et des maux de tête», résume l'homme, qui ne peut réprimer sa toux. Selon son médecin, ces troubles sont liés à la présence de moisissures dans sa maison.

En entrant dans la demeure de M. Gévry à Saint-Blaise, on est frappé par la forte odeur de moisissure. Impossible de réaliser l'entrevue à l'intérieur. Et pourtant, M. Gévry vit dans cette maison.

«Depuis quelques jours, je dors dans ma roulotte dans la cour. Mais il fait déjà froid. Je ne vais pas pouvoir rester ici tout l'hiver», dit-il.

Une bataille après l'autre

L'évaluateur du gouvernement a estimé que le domicile de M. Gévry pourrait être rétabli simplement en réparant quelques fissures dans les fondations. Mais l'entrepreneur qui est venu faire une estimation des travaux n'est pas de cet avis. «Il dit que je dois refaire les fondations en entier. J'ai des fissures sur tous les murs. Mon plancher est gondolé. Ce n'est pas en patchant que ça va se régler», résume M. Gévry.

Pour éviter qu'il ne passe l'hiver dans sa roulotte, les travaux doivent débuter rapidement. «Mais l'entrepreneur doit d'abord prouver à Québec que refaire les fondations au complet est la seule solution. Québec doit ensuite donner son O.K. Je vais attendre combien de temps, moi, encore?», dit M. Gévry.

Ancien combattant, il a l'habitude de se battre. «Mais là, je n'ai plus l'énergie», souffle-t-il.

Comme plusieurs autres sinistrés, il a toujours de la difficulté à obtenir des informations au ministère de la Sécurité publique.

«Mais je n'ose plus me fâcher. J'ai peur que mon dossier soit remis en bas de la pile, dit-il. Quand j'étais inondé, je me battais contre l'eau. C'était concret et je pouvais trouver des solutions. Mais là, on ne peut pas se battre. Tout le monde nous dit que ce n'est pas de leur faute. C'est la faute de qui, d'abord?»

Eau, toux et moisissures

À quelques kilomètres de là, à Iberville, les fondations de la maison de Pierre et Lyne Raymond ont été totalement fissurées par les inondations. À un point tel que dès qu'une pluie forte tombe, leur cave est immédiatement inondée. «Ça entre de partout», résume M. Raymond.

La présence constante d'eau dans la cave depuis sept mois cause un important problème de moisissures. «J'ai du mal à respirer. Je tousse tout le temps», dit M. Raymond.

Le couple envisage de déménager. Mais il est limité dans ses choix, car M. Raymond est en fauteuil roulant. Un entrepreneur est venu visiter la résidence et est prêt à commencer les travaux. «Mais il se bat avec le gouvernement pour être un peu payé à l'avance. Il ne peut pas faire tout sur le bras», résume Mme Raymond.

Conséquence: le couple attend. «On a beaucoup de fatigue accumulée. La patience va lâcher bientôt», note Mme Raymond.

Le cabinet du ministre de la Sécurité publique, Robert Dutil, n'a pas rappelé La Presse hier. Mais dans un communiqué publié mardi, il a indiqué que les démarches de remboursement doivent être rigoureuses «étant donné que l'aide financière octroyée provient de fonds publics».