Parce qu'elle pourrait être «considérablement affectée» par le rapport de la commission Charbonneau, la Ville de Montréal demande à y avoir le statut de participante. Ses avocats pourraient ainsi accéder à l'ensemble de la preuve, proposer ou contre-interroger des témoins, convoquer des experts et faire des plaidoiries.

Ils auront 15 minutes, le 4 juin prochain, pour convaincre la Commission de la pertinence de cette demande.

La Commission d'enquête sur l'octroi et la gestion des contrats publics dans l'industrie de la construction, présidée par la juge France Charbonneau, a été annoncée le 19 octobre 2011. Il s'agissait de la réponse du gouvernement Charest à plus de deux ans de reportages dévastateurs sur la collusion et la corruption d'entrepreneurs et d'élus, notamment.

«À l'échelle du Québec, la Ville de Montréal est l'un des principaux donneurs d'ouvrage en matière de construction, peut-on lire dans le sommaire décisionnel remis aux membres du comité exécutif. Son intérêt important et direct aux travaux de la Commission est évident [...]. La Ville rencontre donc tous les critères d'un participant.»

La décision de demander ce statut a été prise par le comité exécutif mercredi dernier. On rappelle dans ce document que le conseil municipal de Montréal s'est unanimement prononcé à deux reprises, le 1er décembre 2009 et le 2 février 2010, sur la nécessité d'instituer une telle enquête publique. L'intérêt de la contribution de la Ville aux travaux est «indéniable», juge-t-on. Obtenir le statut de participante permettra également à la Ville d'avoir accès à toute la documentation déposée devant la Commission «pour poursuivre son travail de révision des processus d'octroi de contrats en vue de contrer la collusion, la corruption ou les conflits d'intérêts».

Une quinzaine de demandes

La commission Charbonneau offre deux statuts aux personnes et aux groupes qui ont un intérêt à ses travaux: participant et intervenant. Le premier implique un «intérêt important et direct» ainsi que la possibilité d'être touché par le rapport. Dans le second cas, l'intérêt doit simplement être «réel» ou reposer sur une expertise particulière. À la date limite, hier à 17h, 15 personnes ou organismes avaient demandé un statut particulier, notamment l'Association de la construction, le Barreau du Québec, la FTQ-Construction, le gouvernement du Québec et le maire de Mascouche, Richard Marcotte.

Tous pourront s'expliquer le 4 juin prochain. La commission Charbonneau ne donnera pas sa réponse séance tenante, mais «peu après», a précisé son porte-parole, Richard Bourdon.

La semaine dernière, le comité exécutif de Montréal a en outre mandaté son service des affaires juridiques pour représenter les fonctionnaires et employés appelés à témoigner. Le 15 mai dernier, le conseil municipal avait confirmé que les élus dans cette situation pourraient également obtenir de l'assistance judiciaire. Celle-ci n'est toutefois pas garantie à ceux qui obtiendraient le statut de participant ou d'intervenant: ils devront démontrer que la protection assurée par la Loi sur les cités et villes s'applique à leur cas.