L'ancien vice-président et associé de la firme de génie-conseil Dessau, Rosaire Sauriol, figure incontournable du développement des affaires à Laval, sous le règne de Gilles Vaillancourt, évite la prison. M. Sauriol a plaidé coupable mercredi pour «un acte ponctuel de corruption» pour lequel il doit verser une amende de 200 000 $.

La sentence de M. Sauriol est une suggestion commune faite par son avocat et le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) à la Cour supérieure. Les parties ont négocié une réduction des charges contre l'aveu de culpabilité de M. Sauriol.

Ainsi, les chefs d'accusation de complot, de complot en vue de commettre une fraude, fraude et corruption dans les affaires municipales sont tombés. L'exposé conjoint des faits (largement caviardé) déposé au tribunal, confirme que la participation de M. Sauriol au système de partage des contrats «se résume par un acte ponctuel de corruption commis au printemps 2008» (voir encadré).

«C'est un processus de négociation qui est reconnu et qui a été réitéré par les tribunaux notamment la Cour Suprême. [...] Cela permet une économie judiciaire et des ressources institutionnelles», a indiqué Me Claude Dussault, procureur du DPCP. «Ce dossier chemine à notre satisfaction», a-t-il ajouté.

LA COLLUSION

Rosaire Sauriol reconnaît toutefois que Dessau, firme fondée par son père Paul-Aimé Sauriol en 1957, a obtenu de nombreux contrats d'ingénierie de la Ville de Laval à l'abri de la concurrence. Il savait que son frère Jean-Pierre qui présidait la firme (qui n'est pas accusé), versait une ristourne d'environ 2 % de la valeur des mandats obtenus à un intermédiaire (dont le nom est frappé d'une ordonnance de non-publication) associé au parti politique du maire Vaillancourt, le PRO des Lavallois.

 

Malgré ces éléments, Rosaire Sauriol a plaidé coupable à un abus de confiance et le juge James Brunton lui a imposé une amende de 200 000 $ payable d'ici 30 jours. «Il n'a été qu'un commissionnaire», a déclaré son avocat.

Âgé de 55 ans, M. Sauriol n'est plus ingénieur. Il travaille comme conseiller technique. Il a été forcé de quitter Dessau en 2013 à la suite de son témoignage devant la commission Charbonneau. Dessau lui a racheté ses actions à la valeur aux livres. Une partie a toutefois été retenue afin de faire face à d'éventuelles poursuites.

Rosaire Sauriol a été arrêté et accusé en même temps que 36 autres personnes, tous des hommes, dont l'ex-maire Gilles Vaillancourt, des ingénieurs, des avocats, des entrepreneurs, des fonctionnaires et un notaire, au printemps 2013, dans le cadre de l'enquête Honorer.

La preuve du DPCP révèle l'existence d'un système de collusion entre des entreprises qui agissaient à la connaissance du maire Vaillancourt.

EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS

Outre M. Sauriol, trois autres co-accusés ont reçu mercredi leur sentence relativement au dossier Honorer. Il s'agit de Guy Desjardins, Mike Mergl et Giuseppe Molluso. Chacun d'eux a obtenu une réduction des charges en plaidant coupable. Ils devront purger une peine dans la collectivité.

 

Ainsi, M. Desjardins écope d'un an, M. Mergl, de 21 mois et M. Molluso, de 24 mois. Ils ont tous reconnu avoir participé au stratagème de collusion.

Guy Desjardins a déposé des soumissions de complaisance lorsque d'autres compétiteurs étaient désignés gagnants. En contrepartie, la compagnie Asphalte Desjardins pour laquelle travaillait M. Desjardins, s'assurait que d'autres entrepreneurs ne brassaient pas d'affaires dans la couronne nord.

Quant à M. Mergl, il était à la tête de Mergad qui a obtenu une «multitude» de contrats entre 2001 et 2009 grâce au système de collusion. M. Mergl a reconnu avoir versé personnellement une ristourne de 2 % aux ingénieurs Marc Gendron puis Roger Desbois qui agissaient comme collecteurs. Son avocat a indiqué au juge Brunton qu'il s'agissait d'«un écart de conduite qu'il regrette amèrement».

La Ville de Laval a intenté une poursuite contre M. Mergl en regard de sa participation au système de partage des contrats.

Finalement, Giuseppe Molluso, dirigeant des entreprises Simard-Beaudry et Louisbourg appartenant à Tony Accurso -également accusé dans Honorer- a plaidé coupable pour avoir participé à la fraude dans l'octroi des contrats à Laval. M. Molluso a obtenu le droit de garder contact avec M. Accurso qui est le parrain de l'une de ses filles.

L'avocat de M. Molluso a indiqué en cour qu'une entente est intervenue entre les entreprises de Tony Accurso et la Ville de Laval dans le cadre du programme gouvernemental de remboursement volontaire à la suite de manoeuvres dolosives. «Un chèque généreux a été versé à la satisfaction de la Ville», a indiqué l'avocat de M. Molluso. Le montant est confidentiel selon les règles établies pour ce programme ; il sera dévoilé lorsque le programme prendra fin, soit l'année prochaine.

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NDLR: Dans un article intitulé Rosaire Sauriol évite la prison et paie une amende de 200 000 $, publié sur Lapresse.ca mercredi 20 septembre, il est mentionné que la Ville de Laval a une entente avec les anciennes entreprises de Tony Accurso. Or, l'entente conclue ne vise que Giuseppe Molluso à titre personnel, qui était un dirigeant des entreprises de M. Accurso. De plus, la poursuite de Laval contre la famille Mergl dont il est question, ne concerne pas Mike Mergl mais bien ses frères René (Ronnie) et feu Anthony Mergl de l'entreprise Nepcon. Nos excuses.