Le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE) recommande que le ministère des Transports du Québec (MTQ) dépose un plan de compensation pour les pertes d'habitat du poisson et des milieux humides, et ce, avant que Québec ne l'autorise à aller de l'avant avec un programme de 468 millions pour la réfection de la route 389, entre Baie-Comeau et Fermont.

Dans un rapport rendu public cette semaine, la commission du BAPE qui a étudié ce projet inscrit au plan d'action 2015-2025 de la plus récente mouture du Plan Nord ne fait pas de recommandation formelle ni pour ni contre sa réalisation.

Dans l'éventualité où le gouvernement du Québec autoriserait le projet, le BAPE énonce diverses recommandations qui visent à assurer que sa réalisation respecte les principes du développement durable.

En plus d'un plan de compensation, il recommande la production d'une synthèse des impacts sur les milieux humides et hydriques pour l'ensemble du projet et la mise en place d'un comité de suivi des impacts, auquel la communauté innue de Pessamit serait invitée à participer.

Depuis les années 40

La route 389 fait environ 570 kilomètres de long, entre Baie-Comeau et Fermont. Il s'agit d'une route à deux voies asphaltée sur la majorité de son parcours. C'est la seule route d'accès aux monts Groulx, aux grands barrages de la Manic, à de nombreux sites de chasse, de pêche et de villégiature de la région de Manicouagan, et l'unique lien routier avec la ville minière de Fermont, à la limite du Labrador.

Construite à partir des années 40 au gré des besoins de l'industrie forestière, puis du développement hydroélectrique, la route 389 a été réalisée « par différents intervenants successifs, sur plusieurs années, sans norme précise, et sur un territoire dont la topographie est très accidentée ».

La route 389 n'est plus adaptée aux besoins actuels, selon le MTQ. Les accotements sont trop étroits et de largeur variable, les pentes trop abruptes, et les courbes trop prononcées. Le tracé est très sinueux et les distances de visibilité, insuffisantes. Enfin, considérant qu'elle est utilisée par beaucoup de camions, elle offre très peu de zones de dépassement.

Le Programme d'amélioration de la route 389 prévoit une reconstruction complète des 22 premiers kilomètres de la route, entre Baie-Comeau et Manic-2, et des interventions ponctuelles sur des tronçons totalisant 92 kilomètres, sur les 190 kilomètres de route qui séparent Manic-2 de Manic-5.

Le programme du MTQ prévoit aussi une reconstruction complète de la route entre Fire Lake et Fermont, sur une distance de presque 70 kilomètres, qui n'a pas été assujettie à l'examen du BAPE. Un autre tronçon de 14 kilomètres qui doit être reconstruit et reprofilé, au nord de Manic-5, a aussi été complètement soustrait à l'examen environnemental.

Des études d'impacts limitées

Le rapport critique durement l'approche « par segments » adoptée par le MTQ pour la réalisation du projet. Le MTQ a découpé le programme pour la route 389 en cinq tronçons, dont seulement trois ont fait l'objet d'études d'impacts. De plus, deux des tronçons étudiés ont eux-mêmes été découpés en 50 « segments » en tout, dont la moitié n'étaient pas assujettis à cette procédure environnementale.

Une telle approche, selon le BAPE, ne permettra pas « une planification intégrée et responsable du développement du territoire de la Côte-Nord ».

La commission n'est pas plus tendre envers le ministère du Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, qui a permis au MTQ de limiter la portée des études d'impacts sur les milieux naturels, en assujettissant seulement une partie du projet de la route 389 à l'examen du BAPE.

« La commission d'enquête est d'avis que l'ensemble des tronçons et des segments du Programme de la route 389 entre Baie-Comeau et Fermont devrait être considéré comme un seul projet », lit-on dans le rapport.