Le maire de Saint-Bruno-de-Montarville, qui recevait un abonnement annuel gratuit du club de golf privé Mount Bruno Country Club (MBCC) jusqu'à l'abandon récent de la pratique, n'était pas le seul dans son cas. Et à l'instar de Martin Murray, peu de maires ont accepté un tel « cadeau » au cours des dernières années.

À Laval, par exemple, l'ancien maire Gilles Vaillancourt a été membre « honoraire » pendant de nombreuses années du club Laval-sur-le-Lac, l'un des plus prestigieux du Québec, mais n'aurait jamais utilisé ce privilège pour y jouer au golf.

« M. Vaillancourt, même s'il a été membre honoraire, il ne s'en est jamais servi [de sa carte de membre], a indiqué Luc Lapointe, directeur général du club, au cours d'un entretien. Je l'ai vu au golf ici à quelques occasions, mais il était toujours l'invité de quelqu'un. »

Le nouveau maire Marc Demers n'est pas membre d'un club de golf, affirme son porte-parole, François Brochu. Selon Luc Lapointe, la pratique d'offrir un tel abonnement à Laval-sur-le-Lac n'a plus cours depuis quelques années. « Ça fait peut-être trois ans qu'on a arrêté ça. »

À Montréal, le bureau du maire a signalé que Denis Coderre n'était membre d'aucun club de golf.

Rappelons que depuis 2011, les Villes ont l'obligation d'avoir un code d'éthique, qui interdit notamment aux élus de recevoir des cadeaux dont la valeur est supérieure à 200 $, à moins qu'ils ne soient inscrits dans un registre public.

LE MALAISE DES ÉLUS

En entrevue avec La Presse, Suzanne Roy, mairesse de Sainte-Julie depuis 2005, admet franchement qu'elle-même s'est fait offrir une carte de membre du club La Vallée du Richelieu. « C'était une pratique même chez nous. Mais on ne l'utilisait pas, je recevais la carte et je la mettais dans le tiroir. » La mairesse reconnaît qu'au début, elle ne se posait pas de questions éthiques sur le sujet. « Mais quand on a adopté notre code d'éthique [en 2011], là, je me suis dit : on va prendre la peine de dire au club de golf de ne plus faire cette démarche. »

À Saint-Lambert, cette pratique n'a plus cours depuis 2002, tandis qu'à Beloeil, la mairesse Diane Lavoie, qui est en poste depuis 2009, affirme n'avoir jamais reçu pareille invitation. À Terrebonne, où il y a plusieurs terrains de golf, le maire n'est membre d'aucun club, affirme le responsable des communications, Joël Goulet.

Cependant, quelques clubs continuent d'offrir à « leur maire » un abonnement gratuit pour y jouer au golf. C'est le cas du club Pinegrove, qui chevauche les villes de Saint-Jean-sur-Richelieu et de Carignan, en Montérégie. Le nouveau maire de Carignan, René Fournier, affirme qu'il a bien reçu une carte du club, mais qu'il n'a pas l'intention de s'en servir.

Selon les informations recueillies par La Presse, l'ancienne mairesse Louise Lavigne n'a jamais utilisé sa carte de membre « honoraire ».

À Rimouski, dans le Bas-Saint-Laurent, la directrice du club l'Empress, Diane Dugas, admet qu'elle a voulu offrir un abonnement gratuit au maire Éric Forest, mais que celui-ci tient à payer son droit de jeu quand il s'y rend jouer au golf.

Suzanne Roy, qui est aussi présidente de l'UMQ, signale qu'on n'envoie pas de consignes aux élus sur un sujet aussi précis. « Nous avons plutôt des balises générales, qui font partie de notre code d'éthique. »

Selon elle, les élus ont deux options. Le cadeau est déclaré officiellement et inscrit dans un registre public « accessible à tous », ou sinon les élus doivent dire non et refuser d'être membres honoraires d'un club de golf. « On le voit maintenant, dans les circonstances d'aujourd'hui, on ne veut pas qu'une telle pratique puisse être mal interprétée. »

La Presse a révélé la semaine dernière que le maire de Saint-Bruno, Martin Murray, et le club de golf Mount Bruno Country Club (MBCC) avaient décidé récemment de mettre fin à une pratique presque centenaire qui permettait au maire de la ville d'être automatiquement « membre honoraire de courtoisie » de ce club privé, où l'abonnement annuel coûte plusieurs milliers de dollars. Le maire pouvait jouer au golf gratuitement, mais les repas étaient à ses frais.

Le club compte parmi ses membres le sénateur Paul Massicotte, qui est aussi promoteur d'un projet immobilier contesté à Saint-Bruno, dans le bois des Hirondelles. L'ancien maire Claude Benjamin, qui reconnaît être allé jouer au golf au MBCC à « quatre ou cinq reprises » pendant ses deux mandats (2005-2013), affirme cependant n'y avoir jamais rencontré M. Massicotte.

Ce que dit le code d'éthique de l'UMQ

Article 5.3.4

« Il est interdit à tout membre d'accepter tout don, toute marque d'hospitalité ou tout autre avantage, quelle que soit sa valeur, qui peut influencer son indépendance de jugement dans l'exercice de ses fonctions ou qui risque de compromettre son intégrité. »

Article 5.3.5

« Tout don, toute marque d'hospitalité ou tout autre avantage reçu par un membre du conseil municipal et qui n'est pas de nature purement privée [...] doit, lorsque sa valeur excède 200 $, faire l'objet dans les 30 jours de sa réception, d'une déclaration écrite par ce membre auprès du greffier ou du secrétaire-trésorier de la municipalité. »