Soixante-quatre personnes ont annulé leur réservation au camping de Carleton-sur-Mer au lendemain de la fermeture de la frontière entre le Canada et les États-Unis, le 17 mars dernier, aux tout premiers jours d’un confinement dont on ne voit pas encore la fin. Soixante-quatre, c’est considérable… mais c’est nettement en deçà du nombre de réservations qu’on a observées ce jour-là : 191.

« On est un camping très, très populaire, remarque Alain Bernier, directeur du développement économique et du tourisme de Carleton-sur-Mer, responsable du camping municipal. Et cette année, peut-être encore plus. Dès qu’il y a une annulation, la place est reprise. » Le camping compte 310 places. Il affiche déjà presque complet pour juillet et août.

À Camping Québec, on explique qu’il est trop tôt encore pour savoir de quoi sera faite la saison. Sera-t-elle meilleure que les autres années, en raison du flux de touristes qui, incapables de sortir de la province, prendront leurs vacances au Québec ? Ou à l’inverse, moins bonne que les autres, en raison du nombre élevé d’annulations, causé par la crainte de la population de contracter le virus dans ces lieux de rassemblement ?

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Florence Samson de Camping Québec : « Il est fort probable que les campeurs ne puissent pas faire de rassemblements et que les évènements soient annulés. »

« Toutes les éventualités sont étudiées », explique Florence Samson, coordonnatrice aux communications de Camping Québec. Pour le moment, on se demande surtout si saison il y aura et quelles mesures devront être déployées. « Comme les campings sont des mini-villages ou parfois même des mini-villes, ils devront se conformer aux mêmes exigences que les municipalités : si les piscines municipales sont fermées, les piscines seront aussi fermées dans les terrains de camping, même chose pour les restaurants, lieux de rassemblement, etc. »

Le président-directeur général de l’Alliance touristique du Québec, Martin Soucy, se montre toutefois optimiste. 

C’est probablement l’un des secteurs pour lesquels on peut être le plus confiant : on pourra probablement déployer une tente l’été prochain…

Martin Soucy, PDG de l’Alliance touristique du Québec

Camping Québec travaille d’ailleurs actuellement à préparer un Guide de gestion des opérations en temps de pandémie pour que les exploitants de terrains de camping puissent adapter leurs installations. « On s’attend à ce qu’il y ait encore des restrictions importantes quand on ouvrira. Et peut-être qu’on n’ouvrira pas [au maximum de notre] capacité », remarque Alain Bernier.

« Il est fort probable que les campeurs ne puissent pas faire de rassemblements et que les évènements soient annulés, renchérit Florence Samson. Mais ils pourront tout de même profiter de la tranquillité de leur emplacement et des activités de plein air ». En d’autres mots : le Noël des campeurs n’aura probablement pas lieu. Mais on pourra probablement faire du canot, un feu de camp, etc., en respectant les règles de distanciation physique.

Un marché important

Au Québec, le camping génère des retombées économiques de 1 milliard de dollars, et sa pratique va croissant. Rien qu’à Carleton-sur-Mer, le camping génère 1 million de revenus pour la municipalité, et quatre fois plus dans la communauté. Les répercussions s’annoncent importantes sur l’économie locale si la saison de camping débute tardivement ou, pire, si elle est annulée. « On espère que les gens viendront plus nombreux en septembre, remarque Alain Bernier. C’est une période magnifique ici. »

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À Carleton-sur-Mer, le camping génère 1 million de revenus pour la municipalité, et quatre fois plus dans la communauté.

Le bilan des annulations et des réservations enregistré à la Société des établissements de plein air du Québec (SEPAQ) depuis la mi-mars semble plutôt neutre. 

Il demeure que, pour la [SEPAQ] comme pour l’industrie touristique en général, on s’attend à un été difficile. »,

Simon Boivin, porte-parole de la SEPAQ 

La société d’État compte 7000 sites de camping dont le taux d’occupation moyen était de 50 % pour la période s’étirant de mai à octobre 2019. Il va sans dire que juillet et août sont plus populaires, mais il reste encore des emplacements disponibles. Pour les unités de prêt-à-camper (chalets EXP, Étoile, etc.), le taux d’occupation était de 70 % l’an dernier pour la période allant du 1er mai au 31 octobre.

À la SEPAQ, les réservations annulées jusqu’à cinq jours avant l’arrivée prévue seront remboursées en totalité, à l’exception des frais de réservation de 7 $. Ailleurs, les frais sont générés de façon indépendante par les campings et varient d’une entreprise à l’autre. De son côté, Parcs Canada a suspendu toutes les réservations jusqu’au 1er juin : les séjours prévus d’ici là seront remboursés sans que le client ait à en faire la demande. Parcs Canada recense 920 emplacements de camping traditionnel, occupés à 88 % en moyenne en juillet et août 2019.

Quelques statistiques

936 : Nombre de terrains de camping pour la saison 2019 au Québec, dont 187 de plus de 200 emplacements

118 851 : Nombre total d’emplacements disponibles au Québec

72,6 % : Taux d’occupation moyen des campings pour la saison 2019

Source : Tourisme Québec