Au premier coup d'oeil, dans la chaleur de l'été austral, Mendoza a des allures de petite ville européenne bien tranquille, comparée à la vibrante Buenos Aires, mais attendez qu'elle s'éveille pour faire la fête! Quand la Vendimia (fête des vendanges) bat son plein début mars, c'est la folie dans les rues. L'événement attire des visiteurs des quatre coins de l'Argentine et d'ailleurs!

Mendoza trône presque au pied de la Cordillère des Andes, à plus de 1000 kilomètres de Buenos Aires. Capitale de la région de Cuyo, «région des sables» en langue mapuche, elle fournit un terroir de choix, avec un climat très sec, pour la viticulture, introduite au XVIe siècle par les prêtres espagnols. La presque totalité des vins argentins y sont d'ailleurs produits. Avant de filer vers les vignobles, proches de Mendoza, il faut prendre le temps de visiter un peu cette ville attachante à l'architecture plutôt récente, l'ancienne cité ayant été détruite par un séisme en 1861.

 

Un quadrilatère de rues symétriques, bordées de hauts platanes et bien ombragées, forme le centre. Entre rues et trottoirs, l'eau s'écoule dans un incroyable réseau de caniveaux, hydratant la végétation urbaine. Un grand parc, la Plaza Independencia, sert d'épicentre à la ville, avec quatre plus petits (Italia, San Martin, Chile, Espana) symétriquement situés à quelques rues. On peut en faire le tour à pied, s'y reposer sur un banc, admirer leurs arbres et sculptures. Après avoir fait ses emplettes dans les rues piétonnières, on peut s'éloigner un peu en louant un vélo, avec audioguide sur MP3. Le parc General San Martin, qui couvre 400 hectares sur une colline dominant la ville, rend hommage à la mémoire de ce gouverneur du Cuyo qui prit la tête de l'Armée des Andes et libéra du joug espagnol l'Argentine, puis le Chili et le Pérou. L'aménagement paysager est une pure merveille, avec sculptures et fontaines monumentales, qu'on découvre à pied ou en vélo avant de se reposer au bord d'un lac, à l'ombre d'un palmier.

Dégustation à vélo

C'est à bicyclette aussi qu'on visitera l'un des plus grands vignobles de la région de Mendoza, celui de la famille Zuccardi, qui exporte nombre de ses vins au Québec. La région est quasi désertique, avec quelques oasis de verdure et des vignes à perte de vue. La bodega des Zuccardi, qui produit 15 millions de litres de vin par an, est une véritable entreprise familiale d'Argentins d'origine italienne, avec une organisation hors pair pour recevoir les oenologues amateurs. Elle offre une panoplie de forfaits, de la simple dégustation à un atelier de cuisine avec repas au restaurant situé en plein coeur du vignoble, en passant par un panier pique-nique, un survol du vignoble en ballon ou une dégustation à bicyclette.

Optons pour cette dernière! Une fois les vélos choisis, on se dérouille les jambes en traversant une «forêt de vignes». Les ceps sont de vrais troncs hauts de deux mètres. La vigne court comme une tonnelle à l'horizontale, les raisins poussant sous les feuillages, avec une ventilation améliorant la photosynthèse. C'est à pied qu'on parcourt le premier rang de vignes «pédagogiques». L'un des panneaux accrochés en hauteur détaille les cépages du vignoble, dont le Malbec, seigneur et roi en terre argentine. L'autre explique le système très original d'irrigation utilisé ici pour faire pousser des raisins dans le désert! Le vignoble cache en effet un réseau de canaux souterrains et les vignes semblent s'en porter à merveille. Malgré un ensoleillement exceptionnel, elles subissent toutefois de grandes différences de température dans une même journée. Il faut compter avec le froid la nuit et la grêle le jour, «parfois grosse comme un citron», souligne notre guide. Pour les protéger de la grêle, des filets sont tendus au-dessus des rangs, mais quand il y a risque de gel, la technique consiste à aller allumer des centaines de mèches huilées à l'intérieur de drôles de récipients en fer-blanc suspendus à intervalles réguliers dans les rangs des vignes. De quoi, pour les raisins, passer la nuit au-dessus du point de congélation!

Après une courte balade en vélo, le premier arrêt dégustation à l'ombre des vignes permet d'entrer de plain-pied dans l'univers rafraîchissant de deux Chardonnay, un jeune 2008 fleurant bon le citron et un 2007, plus boisé. À l'arrêt suivant, place au rosé sec (Santa Julia 2008, cépage Syrah), à saveur de petits fruits. Suit un congénère tout aussi Syrah et fruité, mais plus souple en bouche, avec deux ans de plus.

Retour à la bicyclette, un brin euphorique déjà. Au troisième arrêt, on tombe littéralement dans le rouge, avec le seigneur des lieux, un Malbec 2007 organique, suivi par le clou de la dégustation : un Reserva Malbec 2007 à saveur mi-figue, mi-chocolatée, ayant passé 10 mois en fût de chêne.

La dégustation apéritive se clôt par un petit jeu de piste à la recherche de quelques vendangeurs. La récolte n'est pas facile, surtout dans la chaleur ambiante. Munis de grands plateaux suspendus autour du cou et à hauteur de la taille, ils y déposent les grappes de raisins qu'ils ont coupées les bras en l'air...

De retour au centre d'accueil, une visite s'impose à la galerie d'art occupant l'ancien cellier à haut plafond. Les artistes-exposants sont invités à créer leur propre étiquette de vin. À la boutique, on goûte encore au vin mousseux extrabrut, méthode Charmat italienne, avant de visiter les installations de pressage et de conservation du vin, puis le cellier actuel, comptant plus de 6000 barriques en chêne. Certaines renferment un vin fortifié au Malbec, le Malamado, au nom inspiré d'un jeu de mots en espagnol sur ce «mal-aimé Malbec à la manière d'un porto». Les sédiments restant dans les cuves après fermentation sont utilisés pour fertiliser le sol du vignoble, mais aussi pour une ligne de cosmétiques «viticoles», dernière née de la diversification de l'entreprise, avec les huiles d'olive.

À l'heure du lunch, le restaurant du vignoble vaut le détour, offrant de copieux repas à prix raisonnables, avec deux menus, l'un de fine cuisine régionale et l'autre gastronomique, avec accords mets et vins. Le premier est déjà gargantuesque, avec bouchées, empanadas et parilla (grillade) à volonté. Ses grillades d'un assortiment impressionnant sont accompagnées de légumes grillés et de salade. Suit une divine crème glacée et raisins, accompagnée d'un Malbec en vendanges tardives... On peut ensuite opter pour une sieste au jardin ou courir à la boutique pour rapporter quelques souvenirs viticoles, voire faire les deux successivement...

 

Information pratique

S'y rendre

° Vols de Montréal pour Santiago du Chili via New York avec Lan Airlines, via Toronto avec Air Canada; puis Lan Airlines ou Aerolineas Argentinas pour Mendoza. Autre option : Montréal-Mondoza par Buenos Aires.

° On peut opter pour la traversée (magnifique) de la Cordillère des Andes en voiture ou en bus, de Santiago à Mendoza.

Visites de vignobles

° Vignoble Familia Zuccardi : Mendoza , tél. 54 261 441 0000 www.familiazuccardi.com

° Altura Wine Tourism : pour se laisser guider dans l'univers du vin argentin à partir de Mendoza , tél. 54 9 261 6 181 000 www.argentinawinetourism.com

Fête des vendanges

° Vendimia 2010 : les 5 et 6 mars, avec spectacles, défilés et élection de la reine des vendanges www.vendimia.mendoza.gov.ar/vendimia

Guides

° Fabuleuse Argentine : Ulysse - 2010

° L'espagnol pour mieux voyager en Argentine : Ulysse - 2010