Lancée en 2013, l'application mobile 1 Second Everyday a mis cinq ans à se hisser parmi les applications payantes les plus téléchargées sur iPhone... à force de persévérance et en gagnant le coeur de ses utilisateurs, un à la fois. Introduction à un journal vidéo nouveau genre, qui encapsule les souvenirs au rythme d'une seconde par jour.

1 Second Everyday serait une application mobile de montage vidéo comme une autre si elle n'avait ce mode d'emploi particulier: elle permet de sélectionner une seule et unique seconde de contenu vidéo par jour - parmi toutes les vidéos présentes sur le téléphone - pour ensuite créer un film «compilation» couvrant une période de temps donnée.

Quand Marianne Brault a entendu parler de cette appli, elle a aussitôt su comment elle allait s'en servir. Enceinte jusqu'aux oreilles, elle a décidé qu'elle documenterait la première année de vie de sa fille. «J'ai filmé ma fille de novembre 2017 à novembre 2018, puis j'ai partagé la vidéo sur Facebook. Ce fut très apprécié ! J'étais surprise du nombre de gens qui se sont rendus jusqu'à la fin. Une seconde par jour pendant un an, ça fait quand même plus de six minutes!»

Cette déclinaison précise - une mère qui filme son enfant - est l'une des plus fréquentes parmi les utilisateurs. Mais en parcourant le fil Instagram de 1 Second Everyday, on découvre une infinité de possibilités: certains font la chronique de leur quotidien, d'autres filment un voyage (comme l'a fait le réalisateur Brian L. Tan, qui a accepté de présenter sa vidéo à La Presse), les prouesses de leur animal ou... l'avancement d'un tricot!

Le résultat est saisissant. «Je deviens très émue chaque fois que je regarde ma vidéo, confie Marianne Brault. La première année de vie d'un enfant passe rapidement, mais on a souvent l'impression que les journées se fondent les unes dans les autres. Quand je regarde la vidéo, ça me rappelle plein de petits moments que j'aurais pu oublier autrement.»

De projet personnel... à concurrent de Facebook?

Avant d'être une application, 1 Second Everyday a été le projet personnel du créatif publicitaire Cesar Kuriyama pendant l'année sabbatique qu'il a prise en 2011 pour réfléchir à son avenir professionnel. Il était alors obsédé par le fait d'oublier des bribes de sa vie: «Je déteste ne pas me souvenir de ce que j'ai fait dans le passé», a-t-il expliqué lors d'une conférence TED.

Pour contrer le problème, Cesar Kuriyama s'est donné le défi de filmer chaque jour une seconde de sa vie, pour le reste de sa vie. «Si je vis jusqu'à l'âge de 80 ans, j'aurai une vidéo de cinq heures qui capture 50 années de ma vie. Ce projet m'a vraiment énergisé jour après jour, quand je me réveille, pour essayer de faire quelque chose d'intéressant de ma journée.»

En cours de route, le projet est aussi devenu une manière de protester contre les gens qui ont le réflexe de toujours tout filmer ce qu'ils vivent. «J'avoue que j'étais un peu comme ça dans le passé... et j'ai décidé que la meilleure façon pour moi [...] de ne pas être comme ça, c'est tout simplement d'enregistrer cette seconde [et de ranger mon téléphone].» Sentant qu'il tenait un filon, Cesar Kuriyama a lancé une campagne Kickstarter afin de créer une application permettant aux utilisateurs de créer leur propre version de son journal numérique. Une campagne auréolée de succès, avec plus de 11 000 contributeurs et près de 60 000 $ en financement.

Cinq ans plus tard, 1 Second Everyday figure parmi les applications payantes les plus téléchargées sur iPhone aux États-Unis (28e au moment d'écrire ces lignes). Et Cesar Kuriyama a de grandes ambitions pour la suite. Lors de son passage à The Pitch, qui est une baladodiffusion dans la lignée de Dans l'oeil du dragon, il a déclaré vouloir faire concurrence à Facebook. 

«Tout le modèle d'affaires de Facebook et Twitter est de capter notre attention. Je vois un besoin dans le marché [pour quelque chose de plus authentique]. Je vois tellement d'amis qui abandonnent les réseaux sociaux [...] Et quand je leur demande ce qu'ils aimeraient avoir à la place, ce qu'ils me répondent correspond à ce que nous sommes comme plateforme.»

Cesar Kuriyama est reparti bredouille de l'émission. Les utilisateurs, toutefois, continuent de s'approprier le journal vidéo de mille et une façons. Car si Marianne Brault se dit moins assidue que pendant la première année de sa fille, elle a bien hâte d'utiliser l'appli pour filmer son prochain voyage. C'est le propre des journaux personnels; on trouve l'usage qui nous convient.

L'application est offerte sur iPhone et Android en version gratuite avec des fonctionnalités payantes.

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